Valentin, l’autre Musso

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Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

Il y a Guillaume, il y a aussi Valentin. Dans un style -le thriller- très différent des bluettes du grand frère. Mais avec la même envie de mainstream.

Le murmure de l’Ogre de Valentin Musso. Éditions du Seuil, 429 pages. ***

Nice, 1922. Un spécialiste des pathologies mentales rejoint son ami commissaire des brigades mobiles pour l’aider à résoudre des crimes étranges et surtout nombreux: d’abord deux prostituées puis un enfant, la gorge tranchée, le corps recouvert de signes. Signes que seul un aviateur anglais, aussi riche qu’érudit, a réussi à déchiffrer: on peut y lire des vers de Virgile sur la descente des mortels aux Enfers et d’autres d’Enée dans le lac Averne… Allez hop, tout le monde dans la Panhard, pour remonter la piste de l’Ogre, serial tueur français des années 20… Les affiches qui ont orné les gares parisiennes ne laissent planer aucun doute sur les ambitions du Seuil: faire de la nouvelle recrue maison un nouveau best-seller! Mais ce Musso-là ne fait pas dans « la comédie romantique teintée de fantastique », comme Valentin caractérise les romans de son frère Guillaume: « Moi, mes émois littéraires me viennent de la littérature noire, des thrillers, qui avaient très mauvaise presse. »

Votre thriller est à la fois contemporain, avec son serial killer et son profiler avant la lettre, et historique. Pourquoi ce choix?

C’était une formidable époque de transition. 1922, ce n’est plus La Belle époque, ce ne sont pas encore les Années Folles, Nice est en pleine mutation, les sciences et la police également. C’est le début des empreintes digitales, des laboratoires de police scientifique, de la psychanalyse. Un basculement passionnant, très romanesque.

Et très documenté. Vous n’avez pas eu peur des anachronismes?

Tous les termes psychiatriques sont d’époque. Je me suis aussi énormément inspiré de faits réels, j’en cite beaucoup. La figure de Landru plane sur le roman. Les médecins l’ont qualifié d’irresponsable, mais la justice ne les a pas suivis: trop de pression des médias, du politique. Irresponsable mais responsable quand même. C’est un des thèmes du livre.

Vous êtes d’accord si on qualifie votre thriller de « mainstream »?

Bien sûr, c’est un livre pour le grand public. Il y a des références culturelles, historiques, mais je ne voulais pas que ça devienne pesant ou didactique. J’ai aussi essayé de renouer avec une certaine écriture populaire, feuilletonesque. Une littérature méprisée alors, appréciée aujourd’hui.

On en vient à votre nom. Il est lourd à porter ou vous ouvre des portes?

Il a été un peu des deux sans doute, mais les questions ont changé. Ce n’est déjà plus le centre des interviews, j’en suis à mon troisième roman. L’important, c’est que l’on soit dans des genres très différents, ça évite les comparaisons.

On risque de comparer vos chiffres de vente désormais.

Je n’envisage pas ça comme ça, ça n’a jamais été l’enjeu. Cela ne change en tout cas rien à ma manière d’écrire, c’est le principal. Et si l’on cherche tous les deux le grand public, ça s’est fait comme ça, naturellement. Notre maman était bibliothécaire, c’est tout.

Mainstream mais quand même

Dead Zone, Stephen King (1983)
C’était encore une littérature méprisée, puis Stephen King a tout changé: et les chiffres de vente, et le regard des critiques. Il a certes un vocabulaire assumé comme limité, mais son influence reste énorme. Dead Zone a été le déclic littéraire de Valentin Musso. On ne sait pas pour son frère.

Les rivières pourpres, Jean-Christophe Grangé (1998)
L’autre grande influence de Musso (Valentin), commune a à peu près tous les auteurs français de thrillers grand public. La Ligue de l’Imaginaire, un collectif d’auteurs comme Maxime Chattam, Franck Thilliez ou Bernard Werber, s’y réfère directement. Et font tous aujourd’hui les grosses ventes de l’édition française.

L’origine du silence, Jed Rubenfeld (2011)
Un thriller inconnu de Musso (pas Guillaume, l’autre), et pourtant très semblable dans les intentions -être lu, même sur la plage- et les repères -celui-ci se passe à New York en 1920, à l’aube du premier attentat terroriste contre Wall Street. Et vaut la peine d’être lu, même sans maillot.

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