Critique | Livres

Emmanuel Guibert, l’enfance de l’art

© Cÿp/Brüsel
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

« L’enfance d’Alan », nominé pour l’album de l’année à Angoulème, ne pourra pas repartir sans prix: la grâce continue d’habiter cette aventure éditoriale et humaine.

L’ENFANCE D’ALAN DE EMMANUEL GUIBERT. ÉDITIONS L’ASSOCIATION. 160 PAGES. *****

On pensait que L’enfance d’Alan était le point final en forme de début de La guerre d’Alan, sorti il y a quatre ans à l’Association. Mais on avait tout faux: Emmanuel Guibert n’en a pas fini avec la vie de l’anonyme américain Alan Ingram Cope, rencontré presque par hasard, en vacances, il y a une quinzaine d’années. Que du contraire: « Je n’en suis qu’à la moitié du guet, même pas tout à fait. Le prochain volume sera consacré à son adolescence, vraisemblablement. » Emmanuel Guibert a donc décidé de consacrer une grande partie de sa vie d’auteur à celle d’Alan. Une incongruité pour beaucoup, une entreprise finalement « logique » dans le cas de Guibert, esthète d’une rare sympathie, maniant avec chaleur l’art de la conversation. Qu’elle se prolonge des mois durant ou qu’elle ne dure qu’une poignée d’heures. Depuis son dernier passage à Bruxelles, son Enfance a logiquement été nominée pour le prochain Grand Prix au festival d’Angoulême. Festival dont il sera d’évidence un jour, et pourquoi pas cette année, le Président.

Pourquoi avoir attendu de publier les trois albums de La guerre d’Alan avant de parler de sa jeunesse?

Je lui consacre une véritable biographie, j’essaierai d’être le plus complet possible. Ici, je rétrograde dans le temps, je couvre -comme on dit dans le prêt-à-porter- la période de 0 à 11 ans, avec des allusions à ses antécédents. Je savais depuis le début que ce serait comme ça, dans cet ordre. Le prochain relatera vraisemblablement son adolescence. Je raconterai tout, mais dans l’ordre qui me convient.

Pourquoi consacrer un tel travail biographique à un inconnu? Pourquoi lui?

C’est l’amitié, c’est comme ça. Il m’a beaucoup appris en cinq ans, c’est un homme avec qui j’ai passé des heures très précieuses. Et quand il est mort, j’ai trouvé que ce n’était pas une raison valable pour en rester là. Mais je n’aurais pas continué si j’avais constaté que ce n’était pas intéressant. Or plus j’avance, plus je le trouve captivant.

On vous sent vous-même passionné par les récits d’enfance, que ce soit à travers celle d’Alan ou quand vous travaillez pour la jeunesse…

L’enfance, tout vient de là, donc autant y retourner, et le plus souvent possible! En ce qui me concerne, j’ai été un enfant heureux, très content d’arriver en ce bas monde, de faire connaissance avec mes parents et puis de découvrir l’attachement pour les êtres, l’amitié. C’est le vivier, c’est de là que l’on vient, là qu’on pèche. Pas question pour moi de m’en éloigner bien longtemps. Et il y a une valeur ajoutée merveilleuse qui est d’avoir à cultiver d’autant plus la clarté qu’on s’adresse à des enfants. Ça sert pour tout le reste.

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