Critique | Musique

[L’album de la semaine] Tyler, the Creator – Flower Boy

Tyler, the Creator © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

HIP HOP | Connu pour son humour trash et sa grande gueule, Tyler, The Creator baisse la garde sur son excellent Flower Boy. Dites-le avec des fleurs…

À 26 ans à peine, Tyler, The Creator donne parfois l’impression d’avoir toujours été là. Depuis qu’on l’a découvert en chef de meute du collectif Odd Future, au début des années 2010, il n’a jamais vraiment quitté le devant de la scène. À sa manière, toutefois. En fou du roi. Un électron libre, à l’humour parfois limite, jamais avare d’une provoc’ (misogyne, homophobe, etc.). Au cool de skater californien, il a ajouté des éléments gore de série Z et un sens trash de l’absurde. Il a amené une gueule aussi, allure de goofy inquiétant, regard de serial killer et timbre de voix à la profondeur abyssale.

Mais le rappeur peut avoir aussi ses côtés fatigants. Les plus courtes sont souvent les meilleures, et à force, Tyler, The Creator a pu parfois donner l’impression de se faire bouffer par son personnage dingo. Génial par à-coups, mais lassant sur la longueur. C’est aussi un peu le bilan de ses trois premiers albums officiels. Aucun n’a eu de mal à sortir du lot. Mais tous s’amusaient à être davantage extravagants que tout à fait séduisants. Excitants, certes, mais aussi parfois lourds sur l’estomac. Il y a deux ans, Cherry Bomb montrait toutefois des ouvertures inédites, de nouvelles dispositions à, non pas arrondir les angles, mais peut-être moins fanfaronner. Le nouveau Flower Boy les confirme. Rarement a- t-on entendu Tyler à la fois si confiant, et si disposé à baisser la garde.

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Sur Where This Flower Blooms, en tout début d’album, Tyler laisse ainsi tomber cette sentence: « don’t be too cool, you may freeze« … Fini de faire le comique à tout prix. À la fois solaire et mélancolique, Flower Boy voit Tyler se poser, rêvasser, tout en ruminant son ennui (« bored and getting desperate as hell« , sur Boredom) et sa solitude (« I’m the loneliest man alive« , sur 911/Mr. Lonely). Cela n’exclut pas des passages plus tordus, comme l’angoissant single Who Dat Boy, qui rappelle l’amour du rappeur pour les productions des Neptunes. Mais ils ne prennent plus toute la place.

On a beaucoup parlé de ce que Flower Boy lèverait, ici et là, le voile sur la sexualité de Tyler, The Creator. Le rappeur, qui n’a jamais hésité à truffer ses textes de « faggots » (« tapettes », pour faire court), y ferait ainsi son coming out. « I’ve been kissing white boys since 2004« , explique-t-il sur I Ain’t Got Time. Le morceau Garden Shed semble encore plus explicite (« Garden shed for the garçons/Them feelings that I was guardin’/Heavy on my mind »). Mais s’il retient l’attention, c’est plus encore par les libertés que Tyler, The Creator y prend vocalement: lui-même semble surpris de s’entendre chanter avec tant de fragilité (« Damn, run me back!« ). « Tell these black kids they could be who they are », insiste-t-il encore sur Where This Flower Blooms.

Certains ont évoqué le fameux album de la maturité. Mais on parle bien de Tyler, The Creator, rappeur extravagant pas près de rentrer dans les clous. D’autres diront éventuellement qu’il a mis de l’eau dans son vin, qu’il a fait quelques concessions. Mais on peine à voir lesquelles. Sinon, celle d’être davantage lui-même.

Distribué par Sony. ****

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