[le jeu de la semaine] Dérapages romantiques

Michi-Hiro Tamaï Journaliste multimédia

Développé pendant trois ans dans un van entre le Canada et le Mexique, Art of Rally est une déclaration d’amour à la culture des rallyes.

Les voitures thermiques ne sont plus dans l’air du temps. Et un pan entier du gaming en témoigne. Rois des consoles de salon à la fin des années 90, les jeux de rallye photoréalistes deviennent un genre de niche. Mais force est de constater que V-Rally, Sega Rally ou encore Colin McRae Rally n’ont pas de fils spirituel moderne. Aujourd’hui, le curseur glisse plutôt vers le fantasme. Celui en mode vaporwave de Drift Stage ou encore en 3D polygonale rétro d’Hotshot Racing. Entre visuels épurés et ambiance zen, Art of Rally s’inscrit dans cette mouvance indé. Une ode entrant presque en contradiction avec les paysages grandioses de Mère Nature que proposaient ses prédécesseurs.

Art of Rally est d’abord le fruit d’une incroyable histoire de création. Dune Casu, son codeur, l’a en effet développé pendant trois ans alors qu’il voyageait du Canada au Mexique dans un van qu’il avait lui-même bricolé, n’arrivant pas à se payer un logement à Vancouver. Il a ainsi embrassé le mouvement vanlife qui pousse un nombre croissant de gens à devenir nomades outre-Atlantique. D’un père louant sa villa pour payer les études de médecine de sa fille au personnage de la veuve de l’oscarisé Nomadland de Chloé Zhao, les profils divergent. Loin, très loin du cliché du punk à chien.

[le jeu de la semaine] Dérapages romantiques

Into the wild

Codé entre le Colorado, l’Utah, l’Arizona et le Mexique, Art of Rally respire le voyage, notamment par ses effets de lumière sublimes doublés de tilt-shift (un effet maquette). Sa vue aérienne émerveille lorsqu’on fait danser des arbres avec ses phares, de nuit sur de la neige. Filant au Japon, en Sardaigne, en Finlande, en Allemagne et en Norvège, le jeu plutôt orienté arcade offre des sensations de pilotage d’une précision redoutable. Doser correctement l’accélération, gérer le timing du dérapage et freiner au bon moment: l’exercice de funambule est constant.

Cette conduite au cordeau est d’autant plus nécessaire au vu de la soixantaine de véhicules à débloquer, offrant chacun des comportements spécifiques. Empattement, poids, propulsion ou quatre roues motrices sont autant de variables capables d’altérer les tenues de route. Vu son budget limité, Dune Casu n’a pas su se payer les licences automobiles de ses rêves. Nissan Fairlady Z, BMW 2002 et autres Renault 5 Turbo n’y sont pas moins reconnaissables. Mieux, Casu rebondit intelligemment sur l’absence de marques officielles pour notamment imaginer des coupés de rallye communistes et yougoslaves plutôt stylés.

De plus, aidé d’une petite équipe et d’une fervente communauté sur Discord, Casu réécrit à sa manière l’Histoire des rallyes de 1967 à 1996. Il imagine ainsi des successeurs au groupe B, catégorie de voitures de rallye surpuissantes et mortelles qui a finalement été interdite au milieu des années 80. Les puristes frémiront également face à l’absence de copilote, ici remplacé par cette vue aérienne permettant d’anticiper les virages. Une prise de liberté vite oubliée tant Art of Rally se vit comme une carte postale au romantisme automobile jamais vu à ce jour.

Art of Rally

Sport moteur. Édité et développé par Funselektor Labs, âge: 3+, disponible sur Mac, PC, Xbox Series X/S, PlayStation 4, PlayStation 5 et Nintendo Switch. ****(*)

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