Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

IL FALLAIT DEUX AUTEURS FRANÇAIS ET UNE MAISON D’ÉDITION BELGE POUR RÉINVENTER LE POLAR BRITISH.

Maggy Garrisson (tome 2)

DE LEWIS TRONDHEIM ET STÉPHANE OIRY, ÉDITIONS DUPUIS, 48 PAGES.

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La réussite, pour ne pas dire la grâce, qui entoure Maggy Garrisson, personne ne l’a vraiment vue venir, pas même ses auteurs. « Il s’agissait surtout de rentrer dans Spirou et de travailler avec Lewis, nous a expliqué le dessinateur Stéphane Oiry. Ce ne devait être au départ que quelques histoires courtes. Même Lewis n’était pas adepte du polar, ce n’est pas vraiment sa culture. Mais tout est dans le ton, et puis il y avait peu d’équivalent en bande dessinée, que ce soit dans les personnages ou ce Londres très contemporain. Je crois que tout ça a fini par l’inspirer. » Et a en tout cas transformé l’essai en série à suivre: Maggy en est désormais à son deuxième tome. Et on en redemande.

« J’ai un homme dans mon lit, un sac de 50 000 livres sterling sur ma table basse. Pourtant, je n’arrive pas à apprécier à 100 %. Comme s’il y avait plein de petits bouts de sac plastique dans le pudding de ma grand-mère. » Ainsi commence le deuxième chapitre des non-aventures de Maggy Garrisson, détective privé sans licence, au physique moyen mais à l’humour pinçant, adepte des pubs, des petites frappes et des petites arnaques, surtout si c’est elle qui peut en tirer bénéfice. Une morale qui n’appartient qu’à elle et à ses auteurs et qui fait peser sur ce nouveau chapitre une ambiance désormais lourde. Car derrière l’ironie, les pintes et les enquêtes minables, un théâtre inquiétant voire lourd se met en place, où la confiance, ce bien précieux, devient difficile à partager…

Ken Loach en gaufrier

« Pour nous, la série peut durer encore longtemps, si l’éditeur et le public continuent à suivre, mais le troisième tome achèvera certains cycles scénaristiques », précise Stéphane Oiry, dont les 18 mois vécus à Londres nourrissent brillamment le réalisme de la série. « Je parle plutôt de « simili-réalisme », je n’ai pas trouvé d’autre terme! Pour les décors par exemple, c’est vraiment toute une cuisine, très précise, mais où tout est réinventé. Le pub où se joue une grande partie de cette intrigue n’existe pas, ni la rue, mais le tout est typique du quartier. » La réussite de la série tient en tout cas beaucoup à l’assimilation de ses références revendiquées, de la série télé Bored to Death au cinéma de Ken Loach et Mike Leigh, en passant par le comics indé de Burns ou de Jaime Hernandez. Et aussi, surtout, aux choix graphiques de son dessinateur, à la palette large: un trait noir très épais et un découpage en gaufrier de douze cases rigide et faussement répétitif jouent pour beaucoup dans l’atmosphère de Maggy, BD d’ambiance par excellence.

OLIVIER VAN VAERENBERGH

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