« Le festival d’Angoulême part en couilles »

POUR RÉPONDRE À L'ÉVOLUTION DU SECTEUR, LES FESTIVALS BD SONT CONDAMNÉS À SE REMETTRE EN QUESTION. © DR
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

Difficile de le dire autrement après le ramdam de ces derniers jours -le jury a fait scandale pour n’avoir sélectionné aucune femme auteure de BD parmi les 30 prétendants au Grand Prix-: le festival d’Angoulême part en couilles.

Si l’expression situe bien la polémique -sexiste- de l’année, le plus grand « festival international de la bande dessinée » qui ouvrira ses portes le 28 janvier est habitué aux remises en question: choix du jury et/ou du président, rififi économique entre les organisateurs et la Ville, grogne des auteurs contre la dictature des séances de dédicaces gratuites, foire commerciale qui fait de l’ombre à la création, paupérisation du secteur…

A chaque édition sa polémique, sa grève voire sa menace de boycott, comme ce fut le cas cette fois. Et le malaise n’a pas été dissipé avec le rétropédalage maladroit des organisateurs, d’abord en incluant quelques femmes dans leur short list, ensuite en abandonnant carrément le principe: les auteurs, désormais, éliront le prochain président (ou la prochaine présidente) d’Angoulême sans pré-sélection, ouvrant la porte aux lobbies et peut-être au grand n’importe quoi.

Malaise donc, qui s’étend depuis quelques mois à l’ensemble des festivals BD qui répondent peu ou prou à l’évolution socio-économique rapide du secteur ou aux exigences des auteurs. Lesquels semblent enfin prendre les choses et les festivals en main. Ainsi, à Liège (ville qui se cherche depuis des années un événement BD à la hauteur de son vivier d’auteurs), c’est un collectif de dessinateurs locaux (Borrini, Batem, Saive, Jampur Fraize…) qui prend en charge L’Usine à Bulles, un nouveau festival international de la BD dont la première aura lieu du 9 au 11 septembre prochain, concurrençant ainsi la Fête de la BD bruxelloise, qui continue elle aussi à se chercher une véritable identité.

En France et à Nantes, ce sont aussi des auteurs locaux (Brüno, Bonneval, Pedrosa…) qui s’apprêtent à inaugurer une nouvelle Maison Fumetti qui sera entièrement consacrée à l’art de la bande dessinée, loin des traditionnels festivals et foires aux dédicaces. Bref, le monde de la BD évolue, et les festivals, qui en étaient jusqu’ici la principale vitrine populaire, sont condamnés à en faire autant.

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