Critique | Livres

Capricorne raccroche

© Le Lombard
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

SÉRIE | Andreas clôt sa saga ésotérique, culte pour beaucoup, indéchiffrable pour les autres. Mais il prévient déjà: « Fermer une porte, c’est ouvrir une fenêtre. »

« On a ramené le chat dans le monde réel. Mais il est retourné dans « l’autre monde ». Cela a créé une boucle temporelle. Il a dû mal fonctionner, là-bas. Je ne vois pas d’autre explication. » Ainsi commence le vingtième et dernier tome officiel de Capricorne, la saga entamée il y a presque 40 ans par Andreas et que ce dernier clôt comme il l’avait débutée: avec, effectivement, très peu d’explications mais beaucoup d’ésotérisme, de mystères, de boucles temporelles et de mondes parallèles, au sein desquels, comme Capricorne, il est franchement aisé de se perdre. À moins de relire, attentivement, les 20 albums de Capricorne, les huit albums de Rork et l’une ou l’autre histoire complète formant ensemble la « sphère-puzzle » parfaite comme elle apparaît dans cette série -un artefact récurrent dont la perfection n’apparaît qu’une fois toutes les pièces mises en place. Pour cette ultime histoire longue -« Il est temps d’arrêter, ce fut le fil rouge de toute ma carrière, mais j’ai encore des déclics. Il n’est pas impossible qu’on retrouve Capricorne à travers des histoires courtes, aux interstices de l’histoire principale« -, Capricorne, dont on ne peut jamais connaître la véritable identité, revient donc à New York, la ville dont il était censé être l’un des protecteurs contre les forces occultes, et là précisément où tout avait commencé, à la librairie Byble, dont son ami Astor est étrangement absent. Ce New York-ci serait-il différent de ce New York-là, coincé dans une autre réalité, comme il y en a eu tant dans cette saga ésotérique? Poser la question, c’est essayer d’y répondre, avec une ultime révélation qui affolera les fans: « On sait maintenant que les histoires de Rork se passent dans le monde de Capricorne, et non l’inverse. »

Retour à Rork

L’astrologue Capricorne est en effet apparu non pas dans la série qui porte son nom depuis 1997, mais bien sept ans plus tôt, dans le sixième album de Rork, lui-même baptisé… Capricorne. Rork, qui fut un choc lors de son apparition dans le journal Tintin en 1978, où l’on avait jamais vu « ça » -que ce soit dans le sujet, un enquêteur de l’occulte digne de Lovecraft, ou dans la forme, des récits dans un noir et blanc proche de la gravure, au découpage tout en verticalité-, et qui fut la première pierre d’un édifice patiemment construit pendant près de 40 ans où rien, on le comprend aujourd’hui, ne fut laissé au hasard. « J’avais cette fin, qui n’en est pas vraiment une, dans la tête depuis très longtemps, presque les débuts, nous résumait lors de son passage trop furtif à Angoulême le discret Andreas, bien résolu à se réinventer encore une fois en bande dessinée, à 65 ans. J’essaie désormais de faire autre chose. Là, je travaille sur des histoires complètes que je n’ai pas scénarisées, ça me change! Et si Capricorne devait revenir, ce serait uniquement en ligne, avec des récits créés pour Internet. »

D’ANDREAS, ÉDITIONS DU LOMBARD, 48 PAGES. ***

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content