Critique | Cinéma

The Eternal Daughter: le tour de force de Tilda Swinton

4 / 5
© Sandro Kopp
4 / 5

Titre - The Eternal Daughter

Réalisateur-trice - De Joanna Hogg

Casting - Avec Tilda Swinton, Carly-Sophia Davies, Joseph Mydell.

Durée - 1h36

Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Joanna Hogg poursuit son œuvre singulière avec The Eternal Daughter, incursion dans le cinéma gothique habitée par Tilda Swinton.

Si elle est aujourd’hui unanimement saluée, Joanna Hogg compte parmi ces artistes s’étant révélées sur le tard. Sortie de la National Film and Television School au mitan des années 80 –Caprice, son film de fin d’études, avec Tilda Swinton déjà, remonte à 1986-, la cinéaste londonienne travaillera pendant de longues années pour la télévision britannique, attendant d’avoir la quarantaine largement entamée pour réaliser son premier long métrage, Unrelated, en 2007. Depuis, elle n’a cessé de tracer un sillon éminemment singulier, Archipelago et Exhibition pavant le chemin qui devait conduire à The Souvenir, diptyque placé sous le double signe de l’intime et de l’autofiction qui verrait la réalisatrice, désormais adoubée par Martin Scorsese, accéder à la reconnaissance internationale.

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Atmosphère étrange

Découvert à la Mostra de Venise en 2022, The Eternal Daughter, son sixième long métrage, s’il peut apparaître comme le prolongement de The Souvenir dont il reprend certains personnages, n’en traduit pas moins une évolution sensible dans le chef de la cinéaste. Sans s’écarter de la veine intime qui constitue sa marque de fabrique -le film est inspiré de sa relation avec sa mère-, Hogg s’y ouvre au cinéma de genre, pour signer un film de fantômes dans la grande tradition gothique, citant aussi bien la nouvelle They de Rudyard Kipling que Night of the Demon de Jacques Tourneur ou The Innocents de Jack Clayton comme références. Le film s’ouvre d’ailleurs de manière on ne peut plus classique, un taxi s’avançant au cœur de la nuit dans la campagne anglaise noyée par la brume. Direction un vaste manoir isolé reconverti en hôtel, où Julie, une réalisatrice en proie au doute, et Rosalind, sa mère d’un âge respectable (jouées toutes deux par Tilda Swinton), ont choisi de se poser quelques jours. L’accueil que leur réserve la réceptionniste (Carly-Sophia Davies) est d’une froideur confinant à l’hostilité. Et si le cadre, qu’elles semblent seules à habiter, éveille des souvenirs familiers pour les deux femmes, Julie ne tarde pas à être ébranlée par l’atmosphère des lieux…

Au départ d’un argument en apparence minimaliste, Joanna Hogg livre un film envoûtant, baignant dans une ambiance d’une inquiétante étrangeté. Si, tenante d’un fantastique feutré, la cinéaste respecte les codes du genre, elle les détourne aussi subtilement, regagnant les rivages de l’autofiction pour explorer, tout en nuances délicates, cette relation mère-fille. Une entreprise portée par une mise en scène d’une souveraine élégance, à laquelle la composition en miroir de Tilda Swinton, véritable tour de force, apporte un supplément de trouble. Sous ses dehors modestes, The Eternal Daughter est un beau film sur les fantômes intimes qui n’en finissent pas de nous hanter…

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content