Critique | Cinéma

Mon crime: présumée coupable

4 / 5
© National
4 / 5

Titre - Mon crime

Genre - Comédie

Réalisateur-trice - François Ozon

Casting - Rebecca Marder, Nadia Tereczkiewiz, Isabelle Huppert

Sortie - En salles

Durée - 1h42

Critique - Jean-François Pluijgers

Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

François Ozon adapte une pièce des années 30 dans une comédie virevoltante portée par son impeccable duo d’actrices, Rebecca Marder et Nadia Terecskiewicz.

Incroyable François Ozon qui, depuis quelque 25 ans maintenant –Sitcom, son premier long métrage, remonte à 1998-, maintient un rythme de production annuel unique dans le cinéma français, sans que la qualité de ses films ne s’en ressente. Après le drame dans Tout s’est bien passé et l’hommage cinéphile décalé dans Peter von Kant, Mon crime le voit aujourd’hui renouer avec la comédie, dans une veine voisine de celle qui lui avait particulièrement réussi dans 8 Femmes.

Comme pour ce dernier, le cinéaste est allé chercher son inspiration au théâtre, puisant dans le répertoire des années 30 une pièce de Georges Berr et Louis Verneuil, déjà portée à l’écran en 1937 par Wesley Ruggles sous le titre True Confession. S’ouvrant sur le meurtre d’un célèbre producteur parisien dans sa somptueuse demeure (figurée par… la villa Empain, à Bruxelles), le film gravite autour de deux jeunes femmes sans le sou: Madeleine Verdier (Nadia Tereszkiewicz), une aspirante comédienne plus jolie que talentueuse courant les castings en pure perte, et rapidement soupçonnée du crime dès lors qu’elle avait rendez-vous avec le mogul. Et Pauline Mauléon (Rebecca Marder), sa coloc, avocate au chômage qui, vu le tour pris par les événements, entreprend d’assurer la défense de son amie. Pas une mince affaire face aux assauts de mauvaise foi du juge Rabusset (Fabrice Luchini), trop heureux d’avoir trouvé en l’actrice une coupable idéale, l’affaire échappant toutefois au contrôle en une succession de rebondissements rocambolesques…

Une réalité qui résonne

S’emparant du texte et de la situation avec une jubilation manifeste, François Ozon entraîne le motif de la fausse coupable en terrain hautement fantaisiste, pour en tirer un petit bijou de comédie loufoque. Mise en scène inventive -chaque relecture du crime offre au réalisateur et à son chef opérateur, Manu Dacosse, l’opportunité de revisiter l’art du muet-, reconstitution inspirée et assortie des clins d’œil d’usage, dialogues virevoltants: tout est plaisir dans ce film qui offre par ailleurs à ses comédien·ne·s un terrain de jeu sur mesure. L’occasion, pour Nadia Tereszkiewicsz et Rebecca Marder, d’exprimer l’étendue de leur talent, tandis que Fabrice Luchini et Isabelle Huppert (sous les traits d’Odette Chaumette, star du muet sur le retour) signent des compositions ébouriffantes. Mais si, mieux encore qu’une screwball comedy enlevée, Mon crime est une éclatante réussite, c’est aussi parce que le réalisateur veille à en traduire la modernité, faisant résonner la réalité des années 30 avec l’époque contemporaine, et explorant les rapports de pouvoir et d’emprise dans les relations hommes-femmes dans une perspective résolument féministe. Pour signer un crime presque parfait.

De François Ozon. Avec Nadia Tereszkiewicz, Rebecca Marder, Fabrice Luchini. 1 H 42. Sortie: 08/03.

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