Critique | Cinéma

[le film de la semaine] Atlantis: Ukraine morne plaine

Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Dans un futur proche, un ancien soldat tente de survivre à l’horreur de la guerre dans un territoire ukrainien dévasté.

Si, de Maidan à Donbass, Sergei Loznitsa a abondamment documenté la réalité ukrainienne, d’autres cinéastes du cru s’en sont emparé par l’intermédiaire de la fiction. C’est le cas notamment de Valentyn Vasyanovych dont Atlantis, qui sort aujourd’hui sur nos écrans, remportait le prix Orizzonti à la Mostra de Venise en 2019. Inscrit au confluent de la science-fiction et du drame de guerre, le film se déroule dans un futur proche, se déployant dans un horizon post-apocalyptique alors que, le conflit avec la Russie tout juste terminé, Serguey, un ancien soldat souffrant de stress post-traumatique, tente sans grand succès de s’adapter à une réalité nouvelle. Et de sillonner les routes défoncées de cette terre dévastée au volant d’un camion-citerne avec lequel il achemine de l’eau potable, devenue une denrée rare. Circonstances ingrates qui vont l’amener à rencontrer Katya, employée d’une organisation humanitaire exhumant et répertoriant les innombrables cadavres peuplant ce qui ressemble désormais à une mer de boue et de mines, afin qu’ils bénéficient d’une sépulture en bonne et due forme. Et les autopsies de se succéder en une litanie sinistre et répétitive, rythmant un film couleur désolation…

[le film de la semaine] Atlantis: Ukraine morne plaine

Un film suintant le désastre

Atlantis est une expérience de cinéma suffocante, un ciel continuellement bas donnant sa tonalité d’ensemble à un film dont le cadre suinte le désastre, tant humain qu’environnemental, consécutif à la guerre. Cette réalité, Vasyanovych l’embrasse avec une grande rigueur esthétique, immergeant le spectateur dans une succession de tableaux qui sont autant de longs plans fixes. Un procédé à la teneur quasi-hypnotique, pouvant atteindre par endroits à une beauté paradoxale -ainsi, par exemple, lors d’une baignade incongrue dans une benne de grue au milieu d’un champ de ruines, ou encore lors de plans filmés avec une caméra à infrarouge. Non sans que l’auteur ne veille à laisser l’espoir timidement s’insinuer dans cet horizon dépressif. Une incontestable réussite, dont il est inutile de préciser combien elle résonne avec l’actualité la plus brûlante. L’intégralité des recettes de cette sortie sera d’ailleurs reversée directement aux producteurs ukrainiens du film. Comme le seront celles de Reflection, dernier opus en date de Vasyanovych que l’on devrait découvrir prochainement sur nos écrans, quelques mois après sa sélection en compétition à Venise. Le réalisateur y envisage la guerre du Donbass à travers le regard d’un chirurgien tentant de recoller les morceaux de son existence au lendemain d’une expérience de prise d’otage traumatisante. Pour un film non moins abouti formellement, mais quelque peu complaisant celui-ci…

Atlantis

Film de guerre. De Valentyn Vasyanovych. Avec Andriy Rymaruk, Liudmyla Bilek, Vasyl Antoniak. 2019. 1h46. Sortie: 13/04. ****

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