Ingrid Bergman, histoire d’une légende en cinq films

Dans Casablanca, Ingrid Bergman incarne Ilsa Lund Laszlo. © Warner Bros/First National Pictures

Ingrid Bergman est sans doute l’actrice suédoise qui a le plus marqué Hollywood. Forte de trois Oscars, deux en tant que meilleure actrice et le dernier en tant que meilleur second rôle, elle a joué dans plus de cinquante films et a été élue quatrième du classement des 100 actrices de légende par l’AFI. A travers cinq de ses films qui ont aussi bien marqué sa carrière que sa vie privée, retraçons l’immense parcours de cette légende suédoise du cinéma.

Au cours des semaines qui vont suivre, des articles fleuriront dans cette nouvelle rubrique dédiée à la culture suédoise. Pourquoi? Principalement parce que la Suède est le pays dans lequel Margo, notre stagiaire, a choisi de partir dans quelques mois en Erasmus. Dans L’instant suédois, le cinéma, la musique ou encore la littérature seront décortiqués dans une tentative de faire le tour de la question viking.

Casablanca

Bien que sa carrière était déjà lancée depuis quelques succès comme Intermezzo en Suède, puis son adaptation américaine du même nom, ou encore Docteur Jekyll et M. Hyde dans lesquels elle tient des rôles principaux, Ingrid Bergman n’était pas le premier choix de Hal B. Wallis, producteur du film, pour incarner la fameuse Ilsa. Michèle Morgan était en effet pressentie et ce n’est que lorsque Wallis a pris connaissance du cachet de l’actrice française qu’il s’est dirigé vers Bergman pour accompagner Humphrey Bogart à l’écran. Sous contrat avec le producteur David O. Selznick, qui l’avait repérée dans la version suédoise d’Intermezzo, celui-ci autorise à la comédienne de jouer dans Casablanca. En échange, la Warner, à la production de Casablanca, accepte de lui prêter l’actrice Olivia de Havilland.

L’alchimie entre Humphrey Bogart et Ingrid Bergman a fait du couple une référence cinématographique. Dans l’édition DVD collector, le critique Roger Ebert explique voir en Bergman une actrice « lumineuse » qui « peint le visage de Bogart de ses propres yeux. » Lors d’une des dernières scènes critiques du film, alors que l’avion s’apprête à décoller, l’émotion est claire sur le visage de Bergman. Et pour cause, note Roger Ebert, « elle pouvait être confuse puisque ni elle ni personne sur le plateau ne savait qui allait monter dans l’avion avant le dernier jour du tournage. Bergman a joué dans ce film sans savoir comment il se terminerait et cela a eu pour effet de rendre toutes ses scènes émotionnellement plus convaincantes. »

Si le long métrage a été pour la première fois diffusé sur grand écran en 1942, il est encore et toujours l’un des plus grands classiques triplement oscarisés du cinéma. L’American Film Institute le classe d’ailleurs en deuxième place des plus grands films américains, derrière Citizen Kane et devant Le Parrain. « On a dit de Casablanca que c’était un film parfait évoquant l’amour, le patriotisme, le mystère et l’idéalisme avec une intégrité et une honnêteté que l’on trouve rarement au cinéma, exprimait Lauren Bacall, actrice et dernière épouse de Humphrey Bogart, citée par In the mood for cinema. Je suis d’accord. Des générations se plongeront dans le drame du Rick’s Café Américain. Et au fil du temps, le charme de Casablanca, de Bogey et de Bergman continuera à nous ensorceler. C’est ça, la vraie magie du cinéma. »

Anecdote

La suédoise Bergman tenait la grandeur de son peuple. Dépassant Bogart de trois centimètres, ce dernier était obligé de porter des talonnettes lorsqu’il était à ses côtés. Un coussin était mis à sa disposition pour les scènes assises.

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Hantise

Dans ce thriller psychologique adapté d’une pièce de théâtre, Ingrid Bergman incarne Paula, une femme fragile, mentalement manipulée par son époux qui tente de la rendre folle afin de récupérer l’héritage de sa défunte tante, une célèbre cantatrice dont le collier tant convoité a mystérieusement disparu.

Habituée aux personnages a priori plus simples, Bergman épate la critique et remporte son premier Oscar en tant que meilleure actrice. Une récompense amplement méritée vu sa prestation face à l’excellent et charismatique Charles Boyer, nominé pour l’Oscar du meilleur acteur. Le long métrage était également en lice pour l’Oscar du meilleur film. Preuve de son influence culturelle, si Hantise, de son titre original Gaslight, n’a pas remporté la prestigieuse récompense, il a néanmoins donné en anglais l’expression « gaslighting » qui signifie manipuler quelqu’un jusqu’à ce que cette personne doute de sa propre raison.

Grâce à ce rôle, Ingrid Bergman capte l’intérêt du maître de l’angoisse Alfred Hitchcock et jouera dans trois de ses films (La Maison du docteur Edwardes, Les Enchaînés, Les Amants du Capricorne). Elle atteint alors des sommets dans sa carrière.

Anecdotes

A l’époque, Charles Boyer avait déjà joué dans plus d’une quarantaine de films. Son nom est donc naturellement placé en tête d’affiche. David O. Selznick, qui a prêté Bergman à la MGM, exige que le nom de l’actrice soit placé au-dessus de celui de Boyer, sans quoi il retirerait Bergman de la distribution. C’est l’actrice qui met un terme à ce conflit, « désireuse de jouer avec Boyer quelle que soit sa place sur l’affiche » explique AlloCiné.

A nouveau, lors du tournage, Boyer devait monter sur une caisse pour égaler la taille de Ingrid Bergman.

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Stromboli

Classique du réalisateur italien Roberto Rossellini, Stromboli marque un tournant important dans la carrière d’Ingrid Bergman. Considérée comme une mère et épouse modèle, l’actrice fait scandale à Hollywood dans les années cinquante en entamant une liaison adultère avec le metteur en scène. Une correspondance, devenue célèbre, est à l’origine de cette relation:

« Cher M. Rossellini, J’ai vu vos films Rome, ville ouverte et Païsa, et les ai beaucoup appréciés. Si vous avez besoin d’une actrice suédoise qui parle très bien anglais, qui n’a pas oublié son allemand, qui n’est pas très compréhensible en français, et qui en italien ne sait dire que « ti amo », alors je suis prête à venir faire un film avec vous.

Ingrid Bergman »

Exilée en Italie, l’Amérique ne veut plus de cette femme immorale, Ingrid Bergman tournera quatre autres films l’un à la suite de l’autre avec Rossellini, entre temps devenu son époux. Parmi ces longs métrages, Voyage en Italie, est considéré aujourd’hui comme le pionnier du cinéma moderne.

De sa relation avec Rossellini naîtrons trois enfants: Roberto Ingmar, Isota et Isabella Rossellin, devenue elle-même actrice. Le couple divorcera quelques années plus tard, Rossellini ayant jeté son dévolu sur une autre femme.

Anastasia

En 1956, Ingrid Bergman revient de force à Hollywood avec son rôle d’Anastasia, dans le film du même nom, grâce auquel elle gagne le pardon du public américain ainsi que son deuxième Oscar de la meilleure actrice. Dans Anastasia, le spectateur accompagne à chaque instant le personnage de Bergman à travers ses émotions et ses doutes.

« La performance de Bergman en tant qu’héroïne du film n’est rien d’autre que superbe, alors qu’elle incarne une femme profondément atteinte par la folie et le désespoir qui se débat contre le doute et l’illusion avec courage, fierté et amour, écrivait à l’époque le critique Bosley Crowther pour le New York Times. C’est une performance joliment réalisée, digne d’un Oscar, et particulièrement gratifiante vu la longue absence de Bergman dans des films recommandables. »

D’autres verront pourtant dans cette interprétation une trop grande envie de demander pardon au public. « Malheureusement, le jeu de Ingrid Bergman ne laisse pas de place pour la spéculation. Avec cette performance, elle tente de gagner la sympathie de l’audience en montrant un personnage aux souffrances interminables », exprime un blogueur cinéphile, estimant que Bergman « ne donne pas au personnage la profondeur qu’elle aurait pu », l’actrice étant à ses yeux trop concentrée sur son apparence « qu’elle veut positive face au spectateur ». Le critique modère cependant ses propos en ajoutant: « Ingrid Bergman donne un performance de star dans un film qui n’existe que pour la laisser briller. Même si elle n’accomplit pas entièrement toutes les possibilités du personnage, elle amène néanmoins Anna dans des scènes intenses et dramatiques qui prouvent de façon très efficaces son talent indéniable. »

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Sonate d’automne

Sonate d’automne, du réalisateur suédois Ingmar Bergman, marque le clap de fin de la longue carrière cinématographique d’Ingrid Bergman ainsi que son unique collaboration avec le célèbre réalisateur.

Sur le plateau, l’entente entre le réalisateur, monstre sacré du cinéma suédois, et Ingrid Bergman n’était pas toujours cordiale. Liv Ullmann, fille du metteur en scène, raconte que son père et Bergman ne partageaient pas la même vision du personnage joué par Ingrid, Charlotte, une mère pianiste de renom ayant sacrifié sa vie de famille au profit de sa carrière. Ces disputes houleuses ont eu pour effet d’approfondir le rôle d’Ingrid et nombreux le considèrent comme sa performance la plus aboutie. Sa prestation lui vaudra d’ailleurs sa 7e et dernière nomination à l’Oscar de la meilleure actrice.

L’actrice décède en 1982, soit quatre ans après la sortie du film, des suites d’un cancer du sein dont elle était déjà porteuse durant le tournage.

Anecdote

Bien que leurs noms soient communs, et leurs prénoms ressemblants, aucun lien de parenté ne rassemble Ingrid et Ingmar Bergman. Plus amusant, la femme d’Ingmar s’appelait également Ingrid Bergman.

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