Fifty Shades of Grey « enfants non admis »? La Commission de contrôle jugée obsolète

Fifty Shades of Grey © DR
FocusVif.be Rédaction en ligne

La Commission de contrôle des films, chargée de juger quelles oeuvres sur grand écran sont « permises aux moins de 16 ans », fait l’actualité pour avoir décidé jeudi que Fifty Shades of Grey, l’adaptation de la trilogie érotique d’E.L. James, serait labellisé « enfants non admis » dans les cinémas belges.

La nouvelle, relayée vendredi par Het Nieuwsblad et Het Belang van Limburg, était accompagnée des critiques du ministre flamand de la Culture Sven Gatz, qui estime que la commission de contrôle « est devenue une chose archaïque ».

Elle est limitée « à donner son avis sur les films en salles », déplore le ministre, qui souhaiterait une charte permettant aux professionnels du secteur de déterminer eux-mêmes pour quels publics une oeuvre est adaptée.

Un tel (nouveau) système de classification a déjà été préparé, indique-t-on vendredi du côté du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles. « La compétence a été transférée aux Communautés, officiellement le 1er juillet 2014 », rappelle Edith Pirlot, juriste au CCA et spécialiste de la question. « Dans les faits, rien n’a cependant changé et la Commission de contrôle des films, pour tout le territoire fédéral, est toujours gérée dans la pratique au sein de la Communauté flamande. »

Si cette tâche est devenue la prérogative des autorités flamandes dans le courant des années 2000, après moult détours judiciaires, c’est parce que les Communautés s’étaient appropriées la classification des films au fil des années 80 et 90, avant que le Conseil d’Etat ne juge en 2004 qu’elles n’y avaient pas droit et que cela relevait toujours du niveau fédéral. La commission intercommunautaire, qui distribuait jusqu’alors le label « enfants admis » aux sorties en salles, a malgré tout poursuivi son oeuvre comme si de rien n’était pendant plusieurs années.

Le système étant toujours en grande partie basé sur une loi de 1920, qui stipule qu’il est interdit aux moins de 16 ans d’aller au cinéma (une loi de 2007 a ensuite nuancé cette interdiction, stipulant qu’elle « ne s’applique pas à la diffusion ou à la projection dans une salle de cinéma ou dans un lieu accessible au public de films autorisés par une commission »). Ce n’est donc pas tout à fait correct de dire qu’un film a été déclaré « enfants non admis », car officiellement la commission a juste décidé de ne pas « autoriser » le film aux moins de 16 ans, et il tombe donc sous l’interdiction initiale.

Le système, complexe et assez flou, a encore subi quelques modifications législatives et est officiellement repassé sous l’autorité du fédéral en 2007, suivant l’arrêt du Conseil d’Etat. Il a ensuite été décidé que la patate chaude devrait revenir pour de bon, et dans les règles de l’art du partage de compétences, aux Communautés à l’occasion de la sixième réforme de l’Etat. Ce dernier passage, officiel depuis juillet 2014, n’a pas encore été mis en pratique.

La transition a pourtant été préparée, indique Edith Pirlot. Et comme « tout le monde s’accorde sur le caractère obsolète » de la classification actuelle, cette préparation a également été accompagnée du développement d’un nouveau système plus en phase avec les réalités d’aujourd’hui. « De 2008 à 2013, un groupe de travail, au sein d’une nouvelle ‘Plateforme du Cinéma’, s’est régulièrement réuni », précise-t-elle. « Cette plateforme rassemblait des professionnels du cinéma (producteurs, distributeurs, auteurs) et les différents niveaux de pouvoir (fédéral et Communautés). Un nouveau système de classification a notamment été imaginé, qui ne serait pas basé sur des contrôles, mais sur des recommandations. Les distributeurs décideraient eux-mêmes sur base du guide établi, avec logos et catégories d’âge, pour quel public le film est recommandé. Il y aurait bien sûr la possibilité de déposer plainte auprès des autorités s’il semble que les principes n’ont pas été respectés. »

Selon la juriste, tout le secteur est en attente de la mise en pratique de ce nouveau système et d’un accord pour que la classification continue de se faire de manière uniforme sur tout le territoire, mais sous l’égide des Communautés. Sans agenda précis toutefois, il semblerait qu’il y ait notamment une volonté de mettre les choses en branle du côté de la COCOM (Commission communautaire commune de Bruxelles-Capitale), indique Edith Pirlot.

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