Ce qu’il faut retenir de la 70e Berlinale
Très (très) inégale, la 70e édition du Festival international du film de Berlin a fini par livrer son lot d’épisodiques satisfactions. Tour d’horizon.
>> Lire également notre interview d’Hillary Clinton et notre portrait de Blanche Gardin.
Clôturée très symboliquement sur l’Ours d’or attribué à There Is No Evil, le film de l’Iranien interdit de sortie de territoire Mohammad Rasoulof, la 70e Berlinale était avant tout celle de la passation de pouvoir entre Dieter Kosslick, qui a occupé la direction artistique du festival 18 ans durant, et le duo composé de la Néerlandaise Mariette Rissenbeek et de l’Italien Carlo Chatrian, venu de Locarno. Un vent nouveau aux effets pas toujours perceptibles, cette édition anniversaire aux tons résolument sombres et plombés se voyant sans surprise mais surtout sans guère d’éclat placée sous le signe du politique et de la diversité.
Composée de 18 longs métrages, la Compétition officielle avait ainsi parfois des allures de gros fourre-tout peu digeste, lesté de propositions indignes de ce genre d’événement. Que faisaient là, par exemple, l’assommant Undine de Christian Petzold, le nawak Siberia d’Abel Ferrara, le gros soufflé tout vide Berlin Alexanderplatz de Burhan Qurbani ou l’inutilement braillard et grimaçant Bad Tales des frangins Damiano et Fabio D’Innocenzo? Quant au risible The Roads Not Taken de la Britannique Sally Potter, il était un peu à cette Berlinale 2020 ce que The Last Face de Sean Penn avait pu être au Cannes 2016: un embarras complet. En séance spéciale, le Pinocchio de Matteo Garrone avec Roberto Benigni a lui aussi déçu, tout comme l’insignifiant My Salinger Year de Philippe Falardeau en ouverture.
Mais de la révélation Eliza Hittman (Never Rarely Sometimes Always) à la confirmation Kelly Reichardt (First Cow) en passant par le fulgurant réveil du duo Kervern et Delépine (Effacer l’historique) ou même par l’irrésistible pied de nez offert par Hong Sang-soo (The Woman Who Ran), les raisons de se réjouir n’ont pourtant pas manqué. Mieux: baptisée Encounters, la nouvelle petite section défricheuse imaginée par Rissenbeek et Chatrian a, elle, totalement convaincu, avec pour idée bienvenue de délaisser les sujets de société rebattus afin de s’intéresser davantage à des questions de langage et de forme. Comme dans le huis clos radical et décadent du Roumain Cristi Puiu, Malmkrog, ou le cioranesque The Trouble with Being Born de l’Autrichienne Sandra Wollner, drame réfrigéré où une jeune androïde nue multiplie les très malaisantes poses lascives.
Revue express du festival en quelques instantanés coups de coeur, toutes sections confondues.
First Cow, de Kelly Reichardt.
Éternelle oubliée des palmarès festivaliers, Kelly Reichardt (Meek’s Cutoff, Certain Women) a pourtant signé avec First Cow l’une des propositions les plus abouties de la Compétition. Soit, dans l’Amérique des pionniers, une fable sur le commerce et l’amitié aux résonances on ne peut plus contemporaines. Du grand cinéma, à la simplicité de façade.
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Petite fille, de Sébastien Lifshitz.
Dans la section Panorama, le Français Sébastien Lifshitz (Presque rien) s’intéressait à la question de la dysphorie de genre à travers le portrait documentaire d’une jeune fille née dans un corps de garçon. Entre témoignages sans fard et combats douloureux menés au quotidien, il livre une lumineuse leçon de vie et d’amour. Magnifique, tout simplement.
Hillary, de Nanette Burstein.
La Berlinale, c’est désormais aussi un éventail choisi de quelques séries phares des mois à venir. Comme The Eddy, la production Netflix en partie réalisée par Damien Chazelle (La La Land). Ou encore Hillary, passionnant docu Hulu en quatre épisodes qu’Hillary Clinton elle-même était venue défendre pour l’occasion. Assurément l’un des temps forts de cette 70e édition.
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À l’abordage, de Guillaume Brac.
Présentée au Panorama, cette chronique d’un été, rohmérienne en diable, embarque de jeunes acteurs débutants sur les routes. Spontané, drôle, attachant, un tout petit film qui fleure bon les vacances fauchées et les amourettes branques. Et qui illustre avec générosité et tendresse que les voies du coeur sont, décidément, bien impénétrables.
Hope, de Maria Sødahl.
Au Panorama, toujours, la compagne du cinéaste norvégien Hans Petter Moland revenait par le biais de la fiction sur son récent face-à-face avec la mort, alors qu’on la disait condamnée par un cancer. Pour un percutant drame familial qui a le courage et l’honnêteté de ne jamais chercher à être aimable, de ne rien idéaliser. Sortie belge avant l’été.
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Petit Samedi, de Paloma Sermon-Daï.
Premier long métrage d’une jeune réalisatrice belge originaire d’un petit village de la commune d’Andenne, ce documentaire local aux racines familiales sélectionné au Forum trouve la bonne distance pour évoquer l’addiction profonde d’un frère, mais aussi la désarmante co-dépendance qui unit un fils à sa mère. Une franche réussite.
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Yalda, la nuit du pardon, de Massoud Bakhshi.
Inspiré d’une véritable émission de téléréalité iranienne, ce film primé à Sundance et montré à Berlin dans la section Generation14 plus dénonce l’hypocrisie profonde d’une société traditionnelle obsédée par des questions d’honneur mais qui se vautre dans la fange d’un grand cirque médiatisé où le pardon ne s’accorde qu’en direct devant des millions de spectateurs. Glaçant.
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