Adam Driver, interprète d’Enzo Ferrari: « Le danger est une chose qui m’attire beaucoup »

© Belga

Acteur au magnétisme hors norme et à l’élégance éminemment singulière, Adam Driver campe Enzo Ferrari devant la caméra de Michael Mann.

Un dimanche de décembre. À l’autre bout du fil, Adam Driver, une pointe de sourire dans la voix: “Salut, comment ça va? Moi c’est la forme.” Depuis son ascension fulgurante amorcée il y a douze ans dans la série Girls de Lena Dunham, l’acteur américain semble ne plus tourner que chez les meilleurs: Jeff Nichols (Midnight Special), Jim Jarmusch (Paterson), Martin Scorsese (Silence), Steven Soderbergh (Logan Lucky), Noah Baumbach (While We’re Young, Marriage Story), Terry Gilliam (The Man Who Killed Don Quixote), Spike Lee (BlacKkKlansman), Leos Carax (Annette)… Quand il ne joue pas du sabre laser dans la saga Star Wars. Alors qu’on le retrouvera prochainement au centre de l’ultra attendu Megalopolis de Francis Ford Coppola, il se paie aujourd’hui rien moins que le premier rôle du nouveau film de Michael Mann.

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Le danger est une chose qui m’attire beaucoup. J’ai tendance à me méfier du confort et de la sécurité.” – Adam Driver

Dans Ferrari, Driver incarne donc Enzo Ferrari, au cœur de l’été 1957. Soit, plongé dans une série de problèmes tumultueux, un homme qui va, devant la caméra virtuose de Mann, jusqu’à évoquer une espèce de figure mythologique ou de héros d’une tragédie antique. Brisé, passionné, entouré d’une aura de mort… “Ce qui est sûr, en tout cas, c’est qu’Enzo Ferrari était pleinement conscient de la mythologie qu’il était occupé à construire à travers sa marque. C’est quelque chose que Michael avait vraiment à cœur de souligner dans ce film. C’est-à-dire qu’Enzo se comporte de manière très différente en fonction des contextes dans lesquels il se trouve. Quand il est au travail ou sur les circuits, il est d’évidence constamment préoccupé par l’image qu’il renvoie, qui est une image d’assurance et de force. Dans son intimité avec sa maîtresse, Lina Lardi, il se montre, par contre, sous un jour beaucoup plus détendu. Et il est peut-être encore plus vrai quand il se recueille sur la tombe de son fils Dino.

Afin de préparer ce rôle exigeant pour lequel, moins de trois ans après le House of Gucci de Ridley Scott, il renoue avec l’accent italien, Adam Driver dit avoir consulté pas mal d’archives, regardé des photos, des vidéos… Mais il souligne surtout à quel point sa rencontre avec Piero Ferrari, le second fils d’Enzo, qui fut longtemps le fils caché, a été déterminante. “Piero était très impliqué dans le processus d’élaboration du film. Il s’est montré particulièrement ouvert au moment d’évoquer la nature de sa relation avec son père. Il nous a vraiment ouvert la porte menant au monde d’Enzo. Et puis il est l’actuel vice-président de Ferrari, donc il nous a donné accès à certains objets importants ou à des véhicules très spécifiques, en plus de nous présenter à des gens fortement impliqués au sein de l’entreprise…

Une mentalité de compétiteur

Sur Michael Mann et son cinéma, le comédien ne tarit pas d’éloges. “Je suis un grand admirateur de son travail depuis longtemps déjà. Ses films, selon moi, ont toujours le chic pour trouver le parfait équilibre entre des questions de fond et de forme. Ils sont accessibles et s’adressent à tous, mais portent aussi toujours la marque d’une grande intégrité d’auteur et d’un véritable amour de l’artisanat. J’aime sa manière de pousser le langage du cinéma jusque dans ses derniers retranchements. Il y a toujours dans ses films des moments de pure beauté plastique, où les dialogues s’effacent au profit du mouvement. Heat et The Insider comptent pour moi parmi ses plus impressionnantes réussites. Et je dois dire que, sur le tournage de Ferrari, nous avons développé des liens très forts. J’estime avoir énormément de chance de travailler au sein de la même industrie qu’un homme comme lui. Vous savez, Hollywood peut parfois être un microcosme tellement superficiel… Côtoyer Michael, c’est aussi réapprendre à aimer pleinement son métier, et le monde du cinéma.

Avec un nom de famille qui semble avoir été taillé pour les bagnoles et le bitume, Driver campe un Enzo Ferrari aussi élégant que tourmenté. À travers son regard profondément concerné, le film fait particulièrement bien ressentir les risques énormes pris par les pilotes au volant de leurs véhicules durant les courses, entre ivresse de la vitesse et goût paroxystique du danger. “Le film, je crois, pose des questions qui dépassent le simple cadre de la course automobile. Il souligne par exemple à quel point la question des risques que l’on est prêt à prendre dans l’existence est une question très importante. Personnellement, je dois dire que le danger est une chose qui m’attire beaucoup. J’ai tendance à me méfier du confort et de la sécurité. Côté bagnoles, j’ai toujours aimé conduire vite, les sensations très particulières que ça procure. Quand j’étais ado, juste après avoir eu mon permis, je collectionnais les amendes pour excès de vitesse, c’était plus fort que moi. Mais aujourd’hui j’ai des enfants, et je suis plus prudent. Le sport automobile ne m’intéresse pas plus que ça, par contre. Je ne suis pas vraiment les courses. Tout est beaucoup plus sécurisé aujourd’hui qu’à l’époque d’Enzo, évidemment, où les pilotes étaient de véritables kamikazes. Durant le tournage du film, Michael insistait toujours beaucoup sur l’idée qu’Enzo avait vraiment la mentalité d’un compétiteur. Il m’a d’ailleurs mis derrière le volant d’une voiture de course dans le but de me faire mieux comprendre le personnage. Ferrari n’est au fond rien d’autre que l’histoire d’un homme dont le parcours est semé d’embûches, entre les problèmes qu’il cumule du côté de sa vie intime et la crise déterminante que traverse son entreprise. Or Enzo parvient toujours à rester concentré et vigilant afin d’éviter de tomber dans les pièges. Il ne se laisse jamais distraire. Il est capable de conserver son sang-froid dans les moments les plus délicats. Il est toujours dans le présent. En somme, il fait en permanence montre dans sa vie des qualités affichées par un bon pilote sur un circuit. C’est vraiment la manière dont nous avons choisi d’aborder ce personnage.

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