
Hommage à Emilie Dequenne en 6 films qui ont marqué les cinéphiles

La mort d’Emilie Dequenne à 43 ans laisse le cinéma belge, et bien au-delà, dans un état de sidération. Retour sur quelques-uns de ses plus beaux rôles, qui ont marqué d’une empreinte indélébile les esprits cinéphiles.
L’actrice belge Emilie Dequenne, révélée par les frères Dardenne et primée à de multiples reprises en Belgique et à l’international, s’est éteinte à 43 ans dimanche soir des suites d’un rare cancer, après une carrière riche d’une cinquantaine de films.
Rosetta
Drame social de Luc et Jean-Pierre Dardenne. 1999.
Emilie Dequenne a à peine bouclé ses humanités quand elle décroche, contre toute attente, le premier rôle du film des frères Dardenne à la fin des années 1990. Originaire du Hainaut, où elle se forme à la comédie dans une troupe amateur, elle enthousiasme les Liégeois lors d’un casting par son énergie folle. Les cinéastes cherchaient un véritable «petit taureau» pour incarner Rosetta, vendeuse de gaufres à l’instinct de survie guerrier qui renvoie aussi bien au sublime personnage du Mouchette de Robert Bresson (1967) qu’aux plus belles heures du néoréalisme italien. D’emblée, la caméra l’adore, et le monde du cinéma lui ouvre les bras en lui offrant le Prix d’interprétation féminine à Cannes. Ou comment passer en un seul rôle du drame social au conte de fées.
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Le Pacte des loups
Aventure horrifique de Christophe Gans. 2001.
Venue de nulle part, elle aurait pu tout aussi bien n’être que la comédienne d’un seul film avant de retomber dans l’oubli. Pourtant, dès son deuxième long métrage, Emilie Dequenne s’affirme en actrice tout-terrain avide de se réinventer afin de mieux explorer les infinies possibilités de ce qu’il s’agit bien désormais de nommer un métier. De la jeune déclassée en lutte de Rosetta à la noble et romantique Marianne de Morangias du Pacte des loups, la mue est impressionnante. Ce grand écart l’impose, déjà, comme l’une des actrices les plus passionnantes de sa génération. Le film, lui, tient de la singulière curiosité, superproduction à la française que ses imperfections n’ont pas empêché de rencontrer un beau succès public, et même de se forger un petit culte.
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La Fille du RER
Thriller intimiste d’André Téchiné. 2009.
Emilie Dequenne donne notamment la réplique à Catherine Deneuve et Michel Blanc dans cette étude de caractère aux allures de thriller intimiste qui s’inspire d’un fait divers bien réel. Elle y campe une jeune banlieusarde qui, par désœuvrement et désir d’attention, s’invente une agression à caractère antisémite dans le RER. Absolument parfaite en mythomane d’un jour dont la coupable invention ouvre sur la fragilité et le malaise, l’actrice belge confirme le caractère profondément insaisissable de son travail d’orfèvrerie à l’écran. Traçant sa route incertaine sur sa paire de rollers, elle capte le regard par aspiration et confère une belle ambivalence à cette intrigante autopsie de la petite fabrique du mensonge qui renvoie à la crise de sens traversée par l’ensemble du corps social.
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A perdre la raison
Drame criminel de Joachim Lafosse. 2012.
«Quelquefois si dures/Que chaque blessure/Longtemps me dure.» Une séquence sans doute, plus que toutes les autres, résume la qualité hors norme de sa prestation dans A perdre la raison, librement inspiré de l’affaire Geneviève Lhermitte. Celle des larmes de Murielle, s’effondrant au volant de sa voiture en chantant Femmes, je vous aime de Julien Clerc. Face à Tahar Rahim et Niels Arestrup, elle compose, tout en pudique détresse, cette femme emmurée qui étouffe, future mère infanticide qu’il s’agit ici moins de juger, ou de condamner, pour la monstruosité de ses actes que d’essayer de comprendre. Son rôle dans ce film qui convoque en sous-main les codes de la tragédie antique lui vaudra légitimement un nouveau Prix d’interprétation féminine à Cannes, dans la section Un certain regard cette fois.
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Pas son genre
Comédie romantique de Lucas Belvaux. 2014.
Le chant est vecteur de joie et déborde de vie dans Pas son genre, adaptation d’un roman de Philippe Vilain. Emilie Dequenne, lumineuse, y campe Jennifer, une coiffeuse du nord de la France amatrice de soirées karaoké qui s’éprend d’un professeur de philosophie parisien un peu coincé. La provinciale est plus futée qu’elle ne veut bien le laisser paraître et l’intello moins insensible qu’il ne le croit, mais quelque chose de l’ordre de la lutte des classes se rejoue immanquablement dans leur relation amoureuse… Dequenne retrouvera le réalisateur belge Lucas Belvaux trois ans plus tard pour Chez nous, long métrage concerné par la dédiabolisation inquiétante de l’extrême droite qui prouve encore une fois l’admirable versatilité de registres de la comédienne née à Belœil.
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Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait
Marivaudage contemporain d’Emmanuel Mouret. 2020.
Emilie Dequenne décroche méritoirement le César de la meilleure actrice dans un second rôle pour l’irrésistible dixième long métrage d’Emmanuel Mouret. Son jeu intense et subtil, qui lui permet de passer d’une émotion à une autre avec une aisance et une justesse peu communes, s’intègre idéalement dans ce marivaudage contemporain où les confidences très intimes s’enchâssent avec bonheur. Adepte de savoureux dialogues fleuves à l’anachronisme assumé, le film, choral, raffiné, éminemment intelligent, s’intéresse aux multiples facettes du sentiment amoureux, la circulation des mots et du désir finissant peu ou prou par s’y confondre. Un rôle secondaire mais épatant pour l’actrice, tout comme le sera deux ans plus tard son mémorable personnage de mère brisée dans Close de Lukas Dhont.
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