Double actualité éditoriale pour Libon, l’un des auteurs les plus drôles et doués de l’écurie Spirou, encore trop méconnu du (très) grand public. Qui a donc ici une double occasion de se rattraper.
Tous les jeunes parents ont connu ça –on leur souhaite en tout cas: le plaisir fou de se blottir au lit avec ses enfants pour la dernière lecture du soir. Surtout, voire uniquement, si ce moment-là se fait dans des éclats de rire et avec un livre, ou très vite avec une bande dessinée, apprécié autant par l’enfant que par l’adulte. Les auteurs capables de ce petit miracle sont peu nombreux: Peyo, Franquin, Macherot ou Geerts pour rester dans le sillon de cette «école de Marcinelle» très belge, et puis, ce Français de Libon. Lire ou relire cet auteur-là, c’est des coups à vous faire refaire des enfants! Du moins si on a besoin d’une excuse pour se jeter sur ses albums en tant qu’adulte, même vieux. La preuve par les deux parutions de Libon de ce printemps.
La première tient de l’actualité: voilà déjà le cinquième tome de ses Cavaliers de l’Apocadispe, son trio de gamins qui jettent un sort au quotidien autant qu’à l’orthographe et à la prononciation. Une suite d’histoires courtes plus poilantes les unes que les autres, quelque part entre Le Petit Nicolas et Bob l’éponge, qui les voient cette fois et pour l’essentiel se frotter au thème de l’écologie et de la sauvegarde de la nature quand ils ne tombent pas des arbres, ne se calent pas la tête dans des seaux ou ne se chopent pas un 2/20 pour leur bref exposé, dont voici l’intégralité: «La nature nous ofre mille trésor comme les fruits et si on cherche bien on peu faire des portes de voitures avec un peu d’imagination.»
La deuxième parution de Libon tient de l’archive, voire du culte. Dupuis a eu la bonne idée de rééditer les trois albums de Jacques, le petit lézard géant parus entre 2008 et 2010 et probablement introuvables, dans une intégrale de 150 pages, un format très contemporain et idéal pour le (re)découvrir. Là aussi en récits courts et complètement décalés, Libon y narre les rencontres de Jacques, petit lézard devenu géant (1 mètre 30, imaginez pour lui) à la suite d’une «mini-expérience atomique» dans «une petite base militaire secrète perdue au fond des bois» et dans laquelle l’agenda des troufions se partageaient entre «ranger sa chambre» et «reprise des essais nucléaires». Libon, auteur né dans les blogs et les pages de Tchô y développait déjà cet humour singulier, mélange de dessins immédiatement poilants (et, avec les années, de plus en plus beaux et précis), de dialogues très drôles et de cet esprit d’enfance, innocent et bourré d’humanité, qui s’évapore chez trop d’adultes. Pas chez Libon.
Les Cavaliers de l’Apocadispe – T. 5: Au grand air
De Libon éditions Dupuis, 72 pages.
La cote de Focus: 4/5
Jacques le petit lézard géant – l’intégrale
De Libon, éditions Dupuis, 152 pages.
La cote de Focus: 4,5/5