Aisha Franz, éditions L'Employé du Moi
Work-Life Balance
256 pages
Avec Work-Life Balance, Aisha Franz fait de son spleen un vrai objet de bande dessinée.
Le travail, la vie, l’équilibre. Tel est le mantra qu’on peut lire sur la robe (le pyjama?) du docteur Sharifi, une psy un peu perchée qui reçoit trois patients, tous en quête dans cette nouvelle BD d’Aisha Franz de cet impossible équilibre entre travail et vie lorsqu’on a la grosse vingtaine célibataire et prolétaire dans notre monde contemporain. Anita fait de la céramique mais espérait faire de l’art, et ne supporte plus la réussite des autres; Rex devait devenir le programmeur en chef de Virtuapy, un logiciel de thérapie en ligne développé pour une super start-up hyper moderne et même “shoe less”, mais celle-ci le vire en lui piquant ses idées; et enfin, Sandra, “graduate database strategist” dans la même boîte de rêve, est en plein “bore-out” et ne vit que par le regard des autres, quitte à faire chanter et harceler sexuellement un de ses collègues. Ces trois âmes en peine, en perte de repères et rongées par la frustration, cherchent donc l’équilibre chez une psy qui n’a pas l’air d’en déborder.
Si la bande dessinée allemande et plus globalement contemporaine fourmille de ce genre de récits existentialistes et généralement dépressifs –non, ça n’est pas drôle d’être un jeune adulte égocentré, précarisé et sans idéaux aujourd’hui-, Aisha Franz en est assurément le fer de lance, et une des perles du catalogue très moderne de L’Employé du Moi. Car celle-ci fait de son spleen un vrai objet de bande dessinée, usant de toutes les spécificités du médium pour magnifier son trait simple voire naïf, mais porteur comme peu d’autres d’une vraie émotion et d’un vrai regard. Dans le genre, un must.
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