« Les vacances d’un serial killer », nouveau roman de Nadine Monfils

© Marie Devroede

Avec son nouveau roman, notre collaboratrice nous entraîne à la côte belge dans une famille pas comme les autres. Nous l’avons rencontrée sur son stand de la Foire du Livre à l’occasion de la sortie du livre. Sortez vos tongs, vos shorts à fleurs et votre parapluie…

Nadine Monfils est un petit bout de femme aux apparences sages mais au caractère bien trempé. Pas question de tenir sa langue ou de se laisser marcher sur les rêves. Elle n’a qu’une vie et ne tient pas à avoir de regrets. Vivant entre Montmartre et le Brabant Wallon, elle n’a jamais perdu sa passion pour la Belgique. Nadine Monfils est loin d’en être à son premier roman. Après de nombreux polars, des recueils poético-érotiques et un livre pour enfant, elle revient à un genre qu’elle affectionne tout particulièrement, l’humour noir.

Son nouveau roman s’intitule Vacances d’un serial killer et raconte les mésaventures de la famille Destrooper qui prend le départ pour des vacances bien méritées à la Mer du Nord. Josette, la mère, est bien décidée à se la couler douce, entre shopping et glandouille sur la plage. Les enfants, Steven et Lourdes emportent leur caméra afin d’immortaliser ces vacances tant attendues. Alphonse, quant à lui, est au volant de sa voiture, bon pied bon oeil, traînant la caravane de la mémé.

Mais les vacances commencent mal, Josette se fait voler son sac par un motard. Hors de lui, Alphonse s’arrête dans un bar, histoire de retrouver son calme avec une bonne bière. Pendant ce temps, les ados s’amusent à filmer sous les portes des toilettes et y font une macabre découverte, le cadavre du motard. Arrivés à la pension « Les mouettes rieuses », ils s’aperçoivent rapidement que ce n’est qu’un trou à rats. Les vacances en enfer ne font que commencer…

Pouvez-vous nous parler de ce nouveau roman?

C’est un livre tout à fait décalé par rapport aux autres. J’ai eu envie de prendre quelques vacances pour changer des thrillers plutôt noirs, même s’il y a toujours de l’humour quand j’écris. Si vous deviez résumer votre parcours en quelques mots. Atypique, totalement libre, inclassable. J’ai toujours fait ce que je voulais, je me suis toujours fixée ça comme objectif, je me suis toujours battue pour réaliser mes rêves. Je trouve qu’il n’y a rien de pire que d’arriver à la fin de sa vie et de se dire « J’aurais pu faire ça et je ne l’ai pas fait ». Pour moi, la chose essentielle dans la vie c’est de tout faire pour réaliser ses rêves, quels qu’ils soient.

Vous avez écrit des livres dans des styles très différents: des poèmes, des contes et des romans érotiques, un album pour enfants, un roman historique pour adolescents, mais vous revenez toujours au polar. Qu’est-ce qui vous attire dans ce genre littéraire?

En tant que lectrice, j’adore ça. Je préfère le polar car il est ancré dans la réalité des choses, mais il permet de divaguer. On peut démarrer d’une réalité et partir dans un monde bien personnel, bien à soi. J’adore qu’on me raconte des histoires. Donc, j’aime faire ça aussi pour les autres.

Vous sautez d’un genre à l’autre. Pourquoi?

C’est un peu comme Frédéric Dard, qui était mon parrain pour ma série du commissaire Léon, le flic qui tricote. C’est (aussi) lui qui m’a donné l’envie d’écrire quand j’avais quinze ans. J’écrivais des poèmes, mais il m’a vraiment donné envie d’aller dans le polar. Ce n’est pas anodin si j’ai aimé ce qu’il fait car, comme moi, il a les deux côtés. À la fois polar, avec ses livres dans le style du Cauchemar de l’aube, et complètement barré avec San-Antonio. On a tous besoin d’ombre et de lumière. On ne peut pas passer toute sa vie dans un endroit où il fait froid. On a de temps en temps envie d’aller au soleil, et inversement, on a parfois envie de voir un peu de neige.

Dans Vacances d’un serial killer vous écrivez de manière très « belge » ce qui change de vos romans habituels. Pourquoi?

J’avais déjà écrit « belge » pour Nickel Blues et La vieille folle. J’ai de temps en temps besoin de ressortir ce côté belge parce que j’adore profondément mon pays. Il n’y a rien qui me fait plus kiffer que lorsque je vais dans un bistrot aux Marolles, d’entendre l’accent bruxellois, j’adore ça. C’est une façon pour moi de sauvegarder ces saveurs parce que c’est en train de disparaître.

Vos personnages sont assez atypiques. Où puisez-vous votre inspiration?

Partout dans la vie. Je crois que c’est surtout une question de lieux qu’on fréquente. Si je ne fréquentais que les bars d’hôtels chics, je ne créerais pas des personnages comme ça. Je viens d’un petit village dans le Brabant-Wallon où il y avait une époque encore bénie avec des bistrots et des personnages hallucinants, très drôles et hauts en couleurs. Aujourd’hui, il faut aller dans un restoroute pour prendre un café, ce n’est plus aussi typique. Par contre à Montmartre, où je vis actuellement, ça l’est toujours. Il y a encore des bistrots de quartier. Bien sûr, il y a des bars pour bobos, mais je ne vais pas là dedans. Quoiqu’il y ait une faune chez les bobos qui peut être intéressante aussi. Je n’ai pas écrit que sur des personnages à la « Deschiens », j’ai également écrit sur des bourgeois. Je crois qu’en tant qu’écrivain, on est observateur de tout.

La plupart de vos personnages ont eu une enfance assez difficile et des parents pas très doués. Est-ce pour vous une façon de justifier certains de leurs actes?

Oui, car je pense que beaucoup de gens ont des circonstances atténuantes. J’ai toujours de la compassion pour mes personnages, que se soient des serial killers ou des gens qui sont un peu tombés du camion. Il faut toujours voir, quand quelqu’un plante un couteau dans le ventre d’une victime, qui lui a mis le couteau dans la main. J’ai lu beaucoup de choses sur les serial killers, ça me passionne car ces personnes sont tellement aux antipodes de ce que je peux imaginer ou comprendre. Pour moi, ce sont des martiens. J’ai donc essayé d’aller vers eux comme un avocat le ferait pour défendre un personnage. Je ne défends absolument pas leurs actes, mais j’essaie de voir ce qui les a amenés à agir de la sorte. Dans toutes mes recherches, j’ai pu constater qu’ils avaient eu une enfance merdique, quelque chose d’horrible, et je me suis beaucoup posée la question de savoir ce que je serais devenue si j’avais eu cette enfance-là.

Dans vos romans, vous fonctionnez avec des chapitres très courts. Y a-t-il une raison à cela?

En tant que lectrice, j’aime beaucoup les chapitres très courts où il y a un rythme soutenu, un parcours haletant et où on ne sait pas lâcher le bouquin de la première à la dernière page. En procédant comme ça, moi, ça me permet d’écrire un chapitre par jour et cela permet aussi de laisser le lecteur au bord du précipice. J’aime faire ce genre de farce pour que le lecteur ait envie de savoir ce qu’il va se passer et qu’il n’ait plus envie de lâcher le bouquin.

Vous avez créé votre propre maison de production Les Productions du Chapeau Boule. Si vous deviez choisir entre votre métier d’auteur et celui de réalisatrice, lequel aurait votre préférence?

J’ai un plaisir fou à écrire et quand j’ai fait mon film, je me suis dit que si le paradis n’existait pas là haut, il existait sur terre. J’étais tellement dans un bonheur total quand j’ai tourné Madame Edouard. Je sais que j’ai encore furieusement envie de faire deux films au moins: Nickel Blues et Il neige en enfer. Mais arrêter d’écrire, je ne pourrais jamais. C’est comme si on me demandait d’arrêter de respirer. À moins qu’un jour, j’aie l’impression d’avoir tout dit avec l’écriture. C’est une question très difficile: c’est comme si on me demandait de choisir entre mes deux enfants. Je ne peux pas choisir.

J’ai pu découvrir sur votre site que vous êtes amie avec John Malkovich. Quel rôle lui donneriez-vous dans l’un de vos livres?

J’ai failli faire Madame Edouard avec lui, il devait jouer le rôle de Madame Edouard, le travelo ménagère. Finalement c’est Didier Bourdon qui l’a fait parce que John avait des problèmes personnels qui l’empêchaient de venir sur le territoire français. Mais nous sommes vraiment restés amis. C’est quelqu’un que j’adore humainement et artistiquement. Je trouve que c’est un très grand acteur. Il pourrait tout jouer dans mes films. Aussi bien les tueurs que les barrés.

Est-ce que vous avez déjà des pistes pour vos prochains romans?

Oui, je suis en plein dedans. Je suis un peu comme les fumeurs invétérés qui rallument une autre clope avec leur mégot. Mon éditeur aimerait que j’écrive moins, mais moi je ne peux pas. J’ai un besoin mental et physique de replonger tout de suite dans une autre histoire. Mon prochain livre sera un mélange de contes de fées et d’horreur.

Marie Devroede (stg)

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