Visions, revue belge de cinéma

Aussi improbable que cela puisse paraître aujourd’hui, la presse francophone belge a eu sa revue de cinéma. Succédant aux très respectables et catholiques Amis du film et de la télévision, Visions débarque en librairies en septembre 1982.  » On avait espéré les relancer, mais Les Amis du film étaient en état de mort clinique, et ne survivaient que grâce à leurs abonnés, se souvient Philippe Reynaert, rédacteur en chef ayant assuré la mutation d’un média à l’autre. Il n’y avait pas de renouvellement, et avec Louis Danvers, on s’est dit qu’il fallait, avant qu’il ne soit trop tard, tenter le coup de changer complètement la formule de manière à se réinstaller en librairie, sachant que les abonnés nous permettraient de tenir le temps nécessaire. »

La fortune sourit aux audacieux: imprimé en noir et blanc sur papier journal et à un format tabloïd, le premier numéro, qui consacre sa une à Wim Wenders, se vend à quelque 3 000 exemplaires. Le début d’une aventure qui durera six ans, la revue défendant  » une ligne éditoriale qui était de dire il n’y a pas le mauvais cinéma commercial d’un côté et le bon cinéma d’auteur de l’autre, poursuit l’homme aux lunettes blanches. La première couverture, c’était Hammett , et la quatrième, E.T. On a conféré un statut d’auteur aussi bien à Spielberg qu’à Rohmer, la ligne de démarcation entre cinéma d’auteur et cinéma commercial ne correspondait plus à l’époque. » Si la publication atteint rapidement son rythme de croisière, avec des ventes en kiosque autour de 4 000 exemplaires en plus des abonnements, et fonctionne sur  » un modèle économique tendu, mais réel et pas subventionné« , la nécessité d’introduire de la pub entraîne une fuite en avant: quadrichromie d’abord, format magazine standard et papier glacé ensuite, pari sur la France enfin, avec le lancement, en 1988, de Visions International et ses 30 000 exemplaires.  » On a bien démarré, mais on a atterri dans un jeu de quilles qu’on n’avait pas imaginé » . À l’issue de quoi la revue se retrouvera dans le giron du magazine Studio, tout juste créé par Marc Esposito, dont il devient le supplément belge. Et de jouer les prolongations quelques années encore sous l’appellation Studio Belgique avant de disparaître. N’empêche, l’aventure était belle, et Visions, qui a notamment accueilli en ses rangs Stephan Streker, futur réalisateur de Noces, a aussi nourri celles de beaucoup d’autres…

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