Ruiner, un jeu vénéneux qui saute à la gorge
SHOOTER/BEAT THEM ALL | Invoquant notamment la techno noire d’Antigone & François X, Ruiner, trip cyberpunk ultra violent, marie beats et gaming avec un talent fou.
La nature a perdu tous ses droits dans les rues métalliques de Rengkok City. Même les chats de gouttière ne sont plus que des hologrammes espions à la solde d’Heaven. Cette mégacorporation anesthésiant la population dans la virtualité a pour d’obscures raisons enlevé le frère du héros sans nom de Ruiner. Sauver son bro? Le scénario faiblard de ce trip entre shooter et beat them all n’affaiblit en rien sa nature brutale et cagneuse. Cyberpunk jusqu’au bout du néon, ce jeu vénéneux saute à la gorge. Mieux, sa 3D isométrique oldschool cache mille détails. Akira, Ghost in the Shell et Cowboy Bebop sont passés par-là. Blade Runner aussi.
La récente et magistrale adaptation de l’oeuvre de Philip K. Dick au cinéma par Denis Villeneuve embrasse une lenteur magnétique. Ruiner, réunissant une dream team de vétérans qui ont façonné Witcher 3, This War of Mine, Dying Light et Shadow Warrior (excusez du peu), préfère au contraire emmener le gamer sur des montagnes russes. Jongler entre armes blanches, flingues et pouvoirs exotiques (par dizaines) y est vital. Et le titre polonais multiplie les moments d’ultra violence, sur fond de BPM dans le rouge. Le palpitant s’emballe. Pas besoin de caféine. Invitant des représentants de la nouvelle scène électronique européenne, la techno noire du jeu dope son gameplay.
Techno noire pour nuits blanches
Les beats froids et hypnotisants de Zamilska tapissent les phases combats de Ruiner. La DJ polonaise sublime les bullet times et les téléportations du joueur. Difficiles à maîtriser mais gratifiantes, ces dernières permettent de se matérialiser au pied de l’adversaire pour le surprendre et le balafrer de coups de sabre. Le joypad et la BO bastonnent de concert. Deuxième invité de marque hantant les cinématiques vaporeuses du jeu, Antigone & François X coulent, eux, dans la mélancolie spatiale. Aux côtés d’autres artistes (Memotone, DJ Alina, Sidewalks and Skeletons…), le duo français marie les beats et l’image pour une expérience totale. La playlist colle à la peau et se hisse à la hauteur de WipeOut (1995) ou REZ (2001). Rare, donc.
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Ménageant des phases d’accalmie forcément douteuses, Ruiner dessine des paysages industriels et dystopiques peuplés d’adversaires très mobiles. Les deux sticks de la manette dansent. Celui de gauche déplace le héros sans visage du jeu tandis que son voisin de droite dirige son tir. Fusil à pompe, lance-flammes, sulfateuse… Difficile malheureusement de viser avec précision d’autant que les vagues de vilains se succèdent sans temps mort. Gare à la confusion.
Vache avec le joueur, Ruiner lui offre toutefois une foule de pouvoirs spéciaux se débloquant au fil de ses missions en noir et rouge. D’un bouclier magnétique à une onde incapacitante étourdissant l’entourage immédiat du gamer, leur usage exige de retenir une partition précise au joypad, mais l’effort paie. Et entre deux boss de fin de niveau, on se repose volontiers lors de phases d’exploration et de dialogues. L’occasion de s’attarder sur la personnalité graphique fascinante de Ruiner. Des jeux d’ombres industriels où il fait bon se perdre…
Ruiner, édité par Devolver Digital et développé par Reikon, âge: 16+, disponible sur PC, PlayStation 4 et Xbox One. ****
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