L’oeuvre de la semaine: Dans les bleus traversés
Casser, reconstruire. Construire, briser. Telle pourrait être la leçon de l’oeuvre de Picasso. Celle qui alimenta la création de Willem de Kooning, Karel Appel et bien sûr Francis Bacon qui fut la référence de Marc Renard lorsqu’il entra en peinture au début des années 1980. Depuis, le peintre bruxellois n’a de cesse d’user de cette leçon de vie (de survie ?) pour pousser toujours plus loin les limites du pictural afin de dire tout à la fois, sa présence au monde et le monde en marche.
Depuis toujours détruit autant que gavé par cette urgence, face au mur de l’atelier et la musique hurlant pour faire silence, il bouleverse l’espace, les accords chromatiques, les rythmes, les formes et les procédures. Toujours au bord du vide, saisi de vertige, il hurle le désir d’une douceur qui s’échappe toujours plus loin, inatteignable. Il a tout vu des autres, tout observé des avancées modernistes et de celles des héros d’aujourd’hui qui ne cessent d’investir les dents creuses du langage.
Depuis toujours, il vise l’unique, évite les voisinages, et, comme l’écrivait Picasso, « ne cherche pas mais trouve » afin d’être aussi au plus près du temps présent. Soit, en fabricant de nouvelles couleurs de type fluorescent qui sonnent l’urbanité, en usant de matières inattendues comme certains tissus particuliers retenus pour leur brillance, leur teinture, leur texture aussi sensuelles qu’artificielles ou encore en cherchant de nouveaux supports.
Ainsi, cette fois, le choix de plaques d’aluminium Dibond sur lesquelles il orchestre d’abord une rythmique puis revient au vide du fond avec un outil particulier qui lui permet de retirer de manière nette et métallique des pellicules de matière. Une fois encore, cette opération de coupure construit autant qu’elle déconstruit et brouille les attentes et les espaces à la manière d’une cartographie écartelée. Ainsi, face à lui-même, face à l’actualité menaçante, le peintre se tient toujours debout… et dans les envols de bleus traversés de violences et de caresses, tord le cou à la beauté qu’il appelle.
Bruxelles, Marc Minjauw Gallery. Place du Jeu de Balle 68. Jusqu’au 21.11. Du mercredi au dimanche de 10h30 à 12h30 et de 14h à 18h. Samedi et dimanche de 10h à 18h. www.mmgallery.be
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