[Critique scènes] Bienvenue au zoo
Pour la rentrée de l’Atelier 210, Jean Le Peltier s’intéresse, par l’intermédiaire d’un robot-caillou, à ce drôle d’animal qu’est l’être humain. Son Zoo s’impose comme une fable d’anticipation aussi drôle que douce.
C’est un spectacle multicouche. Il y a d’abord un comédien, Jean Le Peltier (la révélation Vieil, Juste avant la nuit, Les Loups) qui brise le quatrième mur pour s’adresser au public et lui expliquer qu’à « trois », il sera une femme. « Un, deux, trois ». Magie du théâtre: il est devenu une femme! Puis il y a cette femme, qui passe sa journée derrière un ordinateur à traiter des données, des fragments de vidéos et qui s’infiltre pas très légalement dans la vie d’inconnus via les caméras des robots domestiques. Elle observe la vie des autres, comme les visiteurs d’un zoo observent les faits et gestes des animaux en cage. Et comme nous spectateurs observons les agissements des comédiens dans cette cage qu’est la scène, nous regardons « des gens qui font semblant d’être quelqu’un d’autre dans des lieux qui ne sont pas là ». Et enfin -troisième couche-, il y a la vie de ces inconnus-là, qui bientôt ne le seront plus, certains détails de leurs existences nous étant révélés au fur et à mesure que l’histoire avance.
Zoo est une légère anticipation. Dans la vraie vie, les robots comme Pedro, ce drôle de caillou à pattes d’araignée, n’ont pas encore intégré notre quotidien. En tout cas, pas sous cette forme ni dotés d’une telle capacité de répartie. Mais le spectacle tient plutôt du conte que de la science-fiction, par la grâce du regard singulier de Jean Le Peltier. A ses côtés, une chaîne humaine se forme dans les montagnes qui surplombent Grenoble, les galaxies se collent, moites, comme dans une boîte de nuit, les lieutenants de l’armée ne savent pas compter et le béton hydrophobe émeut jusqu’aux larmes.
Des interactions entre l’homme et la machine ou des interactions entre les humains, lesquelles sont les plus simples, les plus évidentes? Jean Le Peltier sème des petits cailloux qui sont des fragments de réponse en parlant d’urbanisme, de psychologie des conducteurs, de management d’entreprise et d’exercice militaire avec une poésie insensée. Une belle bouffée d’oxygène pour spectateurs masqués.
Zoo: jusqu’au 26 septembre à l’Atelier 210 à Bruxelles, www.atelier210.be
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