Au Prado, des chefs d’oeuvre s’offrent aux caresses des visiteurs
Les malvoyants sont invités à toucher le visage de la Joconde à Madrid. Il ne s’agit évidemment pas de l’oeuvre originale, mais d’une reproduction en 3D. « Touching the Prado » est une exposition dédiée aux malvoyants.
Quelques reproductions de chef d’oeuvre dans une pièce attenante au musée du Prado, à Madrid. Une expérience tactile. « Touching the Prado« , c’est la nouvelle exposition qui donne la possibilité aux malvoyants de venir toucher l’art, jusqu’au 28 juin. Pour la plupart des gens, l’art est une expérience visuelle, mais pour les personnes malvoyantes, les sensations se trouvent au bout de leur doigts.
Une expérience sensorielle
« C’est une sensation incroyable, je sens cette peinture dans les moindres détails, sous chaque ongle » raconte José Pedro Gonzalez, malvoyant de passage au Prado au New York Times. Une exploration tactile minutieuse de chaque peinture, pour compléter le puzzle et créer l’image mentale. Pour faciliter l’expérience, les reproductions n’excèdent pas 120 centimètres de large. Au-delà, la personne devrait se déplacer et perdrait de l’expérience « one-shot ». Des reproductions d’El Greco, de Goya, de Vinci… sont ainsi proposés aux caresses des malvoyants et des voyants. Car le Prado propose aussi aux voyants de découvrir l’exposition, avec un masque obstruant. Avec pour but de changer de perception et faire vivre le temps d’une exposition, sans la vue. Le commissaire de l’exposition, Perez Suescun a évidemment tenté l’expérience, « Il y a vraiment beaucoup de détails auxquels je n’avais jamais prêté attention« .
Des initiatives de la sorte, il en existe déjà dans quelques grands musées internationaux. La National Gallery de Londres, le Louvre à Paris et le Metropolitan Museum of Art de New York organisent des activités pour les visiteurs malvoyants, comme des cours de dessins, des visites spéciales, des ateliers tactiles où tableaux et sculptures sont disponibles au doigté.
Une technique coûteuse
Mais ce genre d’exposition a un coût assez important pour les musées. La reproduction de chef d’oeuvre demande un véritable savoir-faire, c’est quasiment de l’artisanat. Il faut compter 6680$ par reproduction, soit environ 6150€. A partir d’une photographie haute résolution, il faut sélectionner les textures et reliefs à développer. Finement sélectionnés pour le ressenti procuré. L’impression s’effectue ensuite avec une encre spéciale qui va venir gonfler aux endroits souhaités par procédé chimique. Les couleurs sont conservées, pour certains malvoyants qui perçoivent les nuances colorimétriques.
Même si certains visiteurs relèvent un manque de nuances dans certains tableaux, pour Andres Oteo, qui a perdu la vue à 35 ans, l’expérience est une réussite: « c’est comme retrouver la vue » s’enthousiaste-t-il au New York Times.
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