Toonzie
Les éditions 2024 ne cherchent décidément pas la facilité et ne reculent devant aucun concept fumeux. Pour preuve, leur dernière production. Xavier Bouyssou, auteur de bande dessinée français basé à Bruxelles, nous plonge dans une vertigineuse mise en abyme. Il s’imagine en auteur de BD raté qui a une révélation: chaque être humain possède un personnage inspiré des dessins animés d’Hanna-Barbera flottant au-dessus de la tête: un “Toon”. Notre auteur, appelé à présent Toonzie, est le seul à les percevoir, ceux-ci restant invisibles pour le commun des mortels. Son but dans la vie est désormais de révéler au monde l’existence d’un univers parallèle où chacun est représenté par un alter ego “Toon”. Grâce à son bagou, il rassemble de plus en plus de fidèles et crée une secte autour du concept suivant: Toonzie doit mourir naturellement, le plus tard possible, riche et aimé. À cette condition, l’humanité entière pourra voir les Toons. De prime abord, cette bande dessinée ressemble à une grosse farce peuplée de personnages ridicules. Mais très vite, Xavier Bouyssou nous plonge dans les affres de la vie d’une secte. La majeure partie de l’histoire se déroule en 2070, en Coolifornie, où la communauté vit ses derniers instants. Peuplée d’une petite vingtaine d’individus, la secte est criblée de dettes. Ne gravitent plus autour de Toonzie que ses fidèles seconds, qui se livrent une bataille discrète pour la succession, les enfants de ceux-ci, pris entre fascination et désir d’émancipation, mais aussi des agents de l’IRS, la police fiscale américaine. C’est extrêmement bien maîtrisé. Sous des dehors foutraques, Toonzie est plus amer que rigolo, aidé dans ce sens par une logorrhée typique des sectes: on s’y croirait.
de Xavier Bouyssou, éditions 2024, 294 pages.
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