Late Night with the Devil sur Pickx: Quand le diable s’invite sur un plateau de télévision
Titre - Late Night with the Devil
Genre - Horreur
Réalisateur-trice - Cameron et Colin Cairnes
Quand et où - Pickx
Casting - David Dastmalchian, Laura Gordon, Ian Bliss
Durée - 1 h 29
Late Night with the Devil fagocyte les codes de l’âge d’or des talk shows américains, pour dévorer de l’intérieur les vanités télévisuelles. Un found footage perturbant et gore, porté par un inquiétant David Dastmalchian.
Souvent utilisée comme un lieu commun, l’expression « abonné aux seconds rôles » prend tout son sens lorsqu’il s’agit de David Dastmalchian. On a vu sa tête anxieuse s’allonger dans Dune, Oppenheimer et Suicide Squad, tel un Poulidor enfilant les prestations marquantes mais auquel le premier rôle semble toujours échapper. Jack Delroy est un peu comme lui. Ce présentateur de talk show de fin de nuit, Night Owls (« Les Oiseaux de Nuits »), qu’il incarne dans Late Night with the Devil, peut se targuer d’une certaine popularité et d’un professionnalisme bon teint. Mais il reste dans l’ombre de son concurrent Johnny Carson qui (fait réel celui-ci) cartonne avec son Tonight Show. Une émission qui, pour le coup, a authentiquement révolutionné la télé américaine et dont les standards sont toujours indépassables aujourd’hui, de Jimmy Kimmel à Jimmy Fallon.
Face à cette machine de guerre, Delroy signe un pacte diabolique: aller toujours plus loin dans les méthodes et les mises en scènes afin de stopper l’érosion des audiences. Un soir, son plateau dépasse toutes les conventions du genre: le voyant hurluberlu Christou est opposé au plus virulent contempteur du paranormal perlimpinpin Carmichael Haig, ainsi qu’une jeune fille, Lilly, qui a échappé au culte d’une secte morbide. Mais un commentaire déplacé de la part de Delroy, des démonstrations et un débat mal embouchés, et ce sont les plus implacables forces du mal qui se déchaînent en direct, dans un long carnaval d’effets saisissants aux crescendos calibrés.
Signé par les frères australiens Cameron et Colin Cairnes, abonnés aux horror flicks singeant les séries B, Late Night with the Devil tente une nouvelle forme de found footage, saturée des ambiances capiteuses aux teintes marron de la télé nocturne US des années 60-70. Mais l’ensemble puise aussi dans le faux documentaire, avec en démarrage un mini-reportage portraitisant le présentateur d’une biographie aux bien troubles filigranes: veuf, revanchard, membre d’une confrérie occulte réservée à l’élite, pâtissant de la concurrence, il mise tout sur cette émission spéciale Halloween pour relancer sa carrière. Ce sera son chant du cygne.
La réalisation, enlaçant le kitsch, le suspense et le terrifiant sur des coupes de noir et blanc montrant les coulisses anxieuses de Delroy et de son producteur, satirise allègrement les codes de la célébrité télé, de la vanité, de l’hubris. Rien de bien original au demeurant, si ce n’est la prestation de Dastmalchian: extraordinaire, d’une noirceur qui coule littéralement de son regard. Portant l’émotion de son personnage vers une intériorité abyssale et presque insondable, il est un contrepoint formidable aux excès visuels qui frappent à un rythme implacable son plateau, devenu le décor d’une fable horrifique bien plus éthique qu’il n’y paraît.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici