Critique | Séries

Notre sélection séries: un docu hallucinant et une plongée dans la guerre en Bosnie

La série A Life’s Worth suit quatre Casques bleus envoyés en Bosnie.
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Un documentaire sur un gérant de pompes funèbres plus que véreux ou une fiction inspirée d’un témoignage d’un ancien Casque bleu envoyé en Bosnie: faites votre choix parmi notre sélection séries.

The Mortician

Disponible sur HBO Max

Une série de Joshua Rofé. Avec David Sconce, Andre Augustine, Darlynn Brandton-Stoa. 3 épisodes de 59 minutes.

La cote de Focus: 4/5

Gérant d’une entreprise familiale de crémation, les pompes funèbres Lamb à Pasadena, David Sconce a, derrière son petit côté Richie Cunningham (quoi, tu te souviens pas de Happy Days?), été condamné en 1989 à cinq ans derrière les barreaux. Le secteur est lucratif. Tout le monde meurt. Mais quand David a pris la société en main, les chiffres ont littéralement explosé. Et pour cause, il s’est mis à glisser deux ou trois corps par four à la fois. Ensuite, ça a été quinze… «On se débarrassait de viande avariée. L’âme était déjà partie de toutes façons», commente un de ses employés, membre de gang déjà à l’époque sorti de prison. «J’ai vu leurs méthodes, assène un autre. Ils cassaient une clavicule, une jambe ou un bras pour les mettre dans la position la plus compacte possible afin de tenir dans le four. Ils avaient un crochet de boucher qui sert pour les morceaux de viande. Ils accrochaient les corps sous les aisselles et les tiraient dedans.»

Sconce et ses sbires ont fait des concours à celui qui pouvait entasser le plus de corps pour une crémation. Ils ont revendu à l’occasion des vêtements et chaussures de défunts, coupé des membres pour mettre la main sur des bijoux et auraient même récupéré au marteau l’or de leurs dents (liste non exhaustive). «Je n’accorde aucune valeur aux gens après leur décès», essaie de se défendre David Sconce, dont la Corvette était immatriculée «Je brûle pour vous». Joshua Rofé (Lorena, Sasquatch…) signe une série documentaire assez hallucinante qui, à travers d’invraisemblables excès, questionne le contrôle du secteur, l’appât du gain, la dignité dans la mort, le deuil et ce qu’il advient de nos dépouilles.

J.B.

A Life’s Worth

Disponible sur Arte.tv

Une série de Mona Masri et Oliver Dixon. Avec Edvin Ryding, Maxwell Cunningham, Toni Prince. 6 épisodes de 44 minutes.

La cote de Focus: 3,5/5

Au départ, il y avait un livre paru en Suède en 2016. Le témoignage de Magnus Ernström, un ancien Casque bleu, qui racontait l’histoire d’un simple militaire en pays inconnu. Son expérience de soldat de l’ONU en ex-Yougoslavie. De cette histoire vécue, Mona Masri, Oliver Dixon et le réalisateur Ahmed Abdullahi ont fait une fiction. A Life’s Worth retrace l’histoire de quatre jeunes Casques bleus scandinaves (dont le fils du ministre de la Défense) envoyés à la guerre en Bosnie pour aider la population civile et maintenir la paix. Dans la scène d’ouverture, un char valse au fossé et des soldats sont capturés avant que la série fasse un bon de six mois en arrière dans le temps. Et de raconter, en parallèle, le père musulman d’une gamine asthmatique qui tente, tant bien que mal, de prendre soin d’elle dans un pays en proie à l’effroi.

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Série chorale, tendue et haletante, A Life’s Worth revient sur l’une des guerres les plus violentes en Europe. Pour recadrer, la Force de protection des Nations unies (Forpronu) a quitté la Bosnie-Herzégovine à la fin de 1995. La Suède a participé à cette mission de maintien de la paix en envoyant presque 1.000 soldats dans un bataillon nordique. Le nombre de victimes de ce conflit s’élève à plus de 110.000 et plus de deux millions de personnes déplacées. Porté par des acteurs convaincants (notamment Edvin Ryding vu dans Young Royals), A Life’s Worth interroge le poids de l’engagement et le coût de la paix mais aussi le conflit entre l’application des règles et la nécessité d’agir. Elle dit des trajectoires de vie chamboulées, questionne les marges de manœuvre des jeunes soldats alors que leur statut les contraint à la neutralité (comment conjuguer devoir et conscience morale quand l’inaction peut coûter des vies?) et aborde les conséquences de la guerre sur la population locale, dans une région où cohabitent différents groupes ethniques et religieux. Inspirés par la série Chernobyl qui, «sur le plan esthétique, montre une recherche de la beauté au milieu du désastre», comme par de vrais récits humains («dans ces situations extrêmes, les gens continuent à vivre, avec leurs sentiments et leur besoin d’amour»), ces six épisodes offrent une plongée terre à terre et humaniste dans un conflit armé.

J.B.

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