La sélection télé du 19 au 25 avril: Léonard de Vinci, Marcello Mastroianni et la femme d’Oskar Schindler

Dans la sélection télé de la semaine, on retrouve le génie de Léonard de Vinci par un documentariste hors pair.
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

A la télé cette semaine: Léonard de Vinci raconté par Ken Burns, des portraits de Marcello Mastroianni et Emilie Schindler, et la construction de la paix…

Léonard de Vinci

Samedi 19 avril à 20.55 sur Arte

Documentaire de Ken Burns, Sarah Burns et David McMahon.

4/5

Adepte des documentaires fleuves, Ken Burns explore l’histoire américaine à la télévision depuis plus de 40 ans. Guerre de sécession, Vietnam, prohibition… Le réalisateur, né à Brooklyn en 1953, s’est fait pour spécialité de raconter, décortiquer et analyser sans concession le passé de son pays. Epinglant notamment dans l’une de ses dernières œuvres l’apathie des Etats-Unis face à l’holocauste. Burns a été nommé aux Oscars dès son premier essai consacré au Pont de Brooklyn. Il s’est penché en huit épisodes sur l’histoire de la country et en a pris quatre pour brosser le portrait de Mohamed Ali. A travers ses fresques documentaires, il questionne inlassablement les mythes qui ont fait et font l’Amérique. Que ce soit le baseball, le jazz, les parcs nationaux, les Roosevelt ou encore Benjamin Franklin…

Gardien de la mémoire publique outre Atlantique, Burns a aussi donné son nom à un effet cinématographique de panoramique et de zoom avant simultanés sur un document statique (photo, peinture, dessin…). Il n’en est pas l’inventeur. C’est Steve Jobs, le fondateur d’Apple, qui lui a demandé s’il pouvait utiliser son nom pour qualifier un nouvel effet de son logiciel iMovie. Opposé à l’idée du parrainage commercial, Burns n’a finalement accepté que contre plusieurs centaines de milliers de dollars de matériel informatique pour des organisations caritatives.

Une fois n’est pas coutume, le réalisateur se désintéresse des Etats-Unis pour retracer l’histoire extraordinaire et le parcours atypique de Léonard de Vinci. Cet homme qui avait compris que le savoir et l’imagination étaient intimement liés. Ce peintre, scientifique, ingénieur, inventeur, anatomiste, sculpteur, urbaniste, architecte, botaniste devenu le modèle absolu du génie de la Renaissance.

«Léonard est celui qui a émancipé les peintres de leur position de simples artisans.»

Adam Gopnik

Ecrivain

«Plus que n’importe qui d’autre, Léonard est celui qui a émancipé les peintres de leur position de simples artisans pour les élever au rang qu’ils occupent encore aujourd’hui, celui de visionnaires, de philosophes, de princes de l’esprit,» explique l’écrivain Adam Gopnik qui alimente au même titre que les biographes Carlo Vecce et Charles Nicholl et que le cinéaste Guillermo del Toro ce foisonnant documentaire. En deux épisodes (L’Art et l’expérience, La Quête de la beauté) qui s’appuient entre autres sur les riches carnets laissés par le principal intéressé, Burns raconte un homme de cour extrêmement rationnel et d’excellente compagnie. Drôle, plaisant, sympathique et à la mode. Un génie obscurci par des siècles de romantisme. Un homme qui se déclarait disciple de l’expérience et de la nature. Et qui voulait décrypter le mystère de la vie organique et comprendre tous les mécanismes de notre cerveau. Un dessinateur incomparable qui a élevé la peinture au rang de quête intellectuelle. Il analyse et décrypte certaines de ses œuvres, évoque entre autres ses inventions mécaniques et sa sexualité, questionne son rapport à la religion. Un diptyque riche et passionnant.

Mettre fin à la guerre ou bâtir la paix?

Mardi 22 avril à 21.00 sur Arte

Documentaire de Jobst Knigge, Susanne Utzt et Cristina Trebbi.

3,5/5

«On peut continuer à s’entretuer mais ça ne mènera à rien.» «Qu’est-ce que vous entendez par victoire? C’est quoi la victoire?» Alors que les conflits armés pullulent et que la planète ressemble de plus en plus à une gigantesque poudrière, Jobst Knigge, Susanne Utzt et Cristina Trebbi invitent à s’interroger sur la construction de la paix et proposent de plonger avec de notables médiateurs sur de marquantes négociations passées.

Cyril Ramaphosa, président de l’Afrique du sud et Juan Manuel Santos, l’ancien président de la Colombie et prix Nobel qui a traité avec les FARC, décortiquent des paix réelles mais fragiles. La négociatrice et militante des droits des femmes Fatima Gailani évoque l’échec d’un processus inclusif au Moyen-Orient. Mettre fin à la guerre ou bâtir la paix? questionne l’injustice, l’humanité, le pardon et lève le voile sur le fonctionnement de la diplomatie. S’il est 1.000 fois plus facile de faire la guerre que la paix, il est des circonstances où il vaut mieux délaisser le simple au profit du compliqué… 

Emilie Schindler: une liste, une héroïne

Mercredi 23 avril à 23.00 sur Arte

Documentaire d’Annette Baumeister.

3,5/5

Le monde n’a longtemps connu que l’histoire de son mari. Même quand Steven Spielberg en a fait un film, elle n’y est apparue que dans trois scènes sous les traits de l’épouse trompée et humiliée. Derrière chaque grand homme se cache une grande femme. Plusieurs même parfois. Et Emilie Schindler (née Pelzi) était bien plus que la femme bafouée d’Oskar. Annette Baumeister, qui avait déjà retracé le combat pour le droit de vote mené par quatre militantes oubliées dans le docu-fiction Quand les femmes s’émancipent, brosse le portrait de cette héroïne longtemps accablée par un cruel manque de reconnaissance.

Engagée, la scénariste et réalisatrice raconte cette fille d’agriculteurs prospères née en 1907 en Moravie qui a joué un rôle fondamental et déterminant dans le sauvetage de 1.200 à 1.300 Juifs sous le régime nazi. «Jusque dans les années 60, le récit historique, y compris concernant le nazisme et la résistance était clairement dominé par les hommes. Les femmes n’avaient pas le droit de cité», explique Kirsten Heinsohn. Ce documentaire d’une petite heure remet avec beaucoup d’à-propos les faits dans leur contexte et Emilie au cœur du récit.

Mastroianni, irrésistiblement libre

Vendredi 25 avril à 22.50 sur France 5

Documentaire de Jean-Frédéric Thibault.

4/5

Avec son charme désinvolte, son regard enfantin un peu désabusé et son sourire triste à peine esquissé qui faisait craquer les femmes, Marcello Mastroianni a dû combattre durant toute sa carrière l’image de latin lover qui lui collait à la peau. Réalisateur entre autres de documentaires sur Charlie Parker, Alexandre Dumas et Yul Brynner, Jean-Frédéric Thibault brosse le portrait d’un homme tout en contradiction. Irrésistiblement libre commence avec la première de La Dolce Vita et un public outré qui hurle à l’immoralité. Marcello se fait traiter de lâche, de clochard, de communiste mais sera rapidement célébré sur la Croisette où le film décrochera la palme d’or.

Né en 1924 dans un village situé entre Rome et Naples et très tôt figurant dans les studios de Cinecittà, Mastroianni a suivi des études en architecture et découvert le monde du théâtre vers l’âge de 20 ans à l’université. Il s’est fait repérer par Visconti qui l’a embauché dans sa troupe et parle d’un grand garçon très simple et très pauvre. Nourri par de nombreux extraits de films et interviews d’archives, ce documentaire raconte ses films à scandale, sa relation avec Fellini, le tandem qu’il formait avec Sophia Loren dans des comédies échevelées… Il cherche aussi à savoir qui se cache derrière le comédien en apparence indolent pour qui les cascades de la Fontaine de Trevi se sont pendant quelques minutes arrêtées de couler (c’était à son décès). Recommandé.

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