Nos 3 sélections TV de la semaine: soumission chimique, commémoration de la libération d’Auschwitz et dessous de la Prohibition
Il y a 80 ans, le camp d’Auschwitz était libéré. Arte se met à l’heure de ces commémorations. De son côté, France 2 nous propose un documentaire sur les viols par soumission chimique alors que la cour a rendu son verdict sur le procès de Mazan. Enfin, la Prohibition américaine a-t-elle profité à la France?
La Prohibition américaine, une aubaine française
Dimanche 19/01 à 23h sur France 5
Documentaire de Xavier Fréquant et Yassir Guelzim
3,5/5
Plus besoin de se cacher pour picoler. En décembre 1933, le congrès des Etats-Unis abroge la loi qui interdit de consommer de l’alcool. Fin de la Prohibition. Vu comme l’ennemi à abattre (surtout par les conservateurs mais aussi par les femmes dont les maris dilapident dans la bibine les maigres rentrées familiales), il était illégal depuis 1920 mais avait mené au plus grand marché noir de l’histoire.
Rythmé par des incroyables images d’archives et des passages en dessin animé, ce documentaire en noir et blanc de Xavier Fréquant et Yassir Guelzim raconte les speakeasies, les bars clandestins tenus par la pègre où on peut danser et boire à volonté. Les stocks d’alcool rapidement vidés quand ils ne tombent pas entre les mains de la police. Les distilleries clandestines et les alambics bricolés… Mais comme l’alcool de mauvaise qualité, souvent frelaté, a provoqué de nombreux décès, la mafia a décidé de se tourner vers l’étranger. Et la petite colonie de Saint-Pierre-et-Miquelon va faire mieux que de tirer son épingle du jeu. Stratégie de l’alcool médicament (le champagne est prescrit sur ordonnance), moteurs d’avion utilisés sur les bateaux pour ne laisser aucune chance aux garde-côtes… Récit d’un improbable et juteux business.
Programmation spéciale Auschwitz
Dès lundi 20/01 à 21h sur Arte
À la veille du 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz, le 27 janvier, ARTE s’associe aux commémorations en proposant une vaste programmation à l’antenne et en ligne. A l’agenda? Des films. Comme le Music Box de Costa-Gavras (20/1, 21h00) et L’Instruction (27/1, 22h30) de Rolf Peter Kahl d’après la pièce de théâtre de Peter Weiss. Mais aussi une petite dizaine de documentaires. Un écrivain dans l’enfer nazi (22/1, 23h00) reviendra sur Les Bienveillantes, roman fleuve de Jonathan Littell, récit sans remords d’un haut gradé nazi au coeur de la Shoah.
Mais on vous recommande surtout Les Quatre Sœurs de Claude Lanzmann (dans la nuit du 21 au 22 janvier, 00.25). Une collection documentaire de quatre films reposant chacun sur le témoignage d’une rescapée de l’Holocauste. Ruth Elias a été broyée par le médecin SS Josef Mengele. Ada Lichtman a été déportée à Sobibor après avoir assisté aux fusillades massives. Paula Biren a été affectée à la police du ghetto. Et Hanna Marton a échappé à la solution finale à la faveur d’une négociation.
Soumission chimique: pour que la honte change de camp
Mardi 21/01 à 21h10 sur France 2
Documentaire de Linda Bendali
3,5/5
Ils étaient 51, âgés de 21 à 68 ans au moment des faits, sur le banc des accusés. Sans emploi, ouvrier agricole, journaliste, militaire, pompier… La cour criminelle du Vaucluse a rendu son verdict le 19 décembre dernier et mis fin, une première fois du moins (17 ont décidé de faire appel) au procès de l’horreur et de l’impensable. Celui des viols de Mazan. Pendant une décennie, Dominique Pelicot a drogué son épouse afin d’en abuser sexuellement lui-même et de la faire violer par des dizaines d’hommes. L’affaire du Vaucluse, qui a captivé les médias du monde entier, a mis en lumière l’un des stades ultimes de la domination masculine: la soumission chimique.
Plus que l’histoire d’une famille détruite par le mensonge et la perversion, c’est tout le sujet de ce documentaire narré par Caroline Darian, la fille de la victime et de son bourreau, cofondatrice du mouvement #mendorspas, et réalisé par la journaliste d’investigation Linda Bendali. Selon l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, la soumission chimique désigne «l’administration d’une substance psychoactive à une personne, sans qu’elle en ait connaissance ou sous la contrainte, dans le but de commettre un délit ou un crime, comme un vol, une agression sexuelle, un viol…»
Le GHB, souvent surnommé la drogue du violeur, n’est retrouvé que dans 5% des affaires de soumission chimique. Dans deux cas sur trois, les substances utilisées sont des médicaments. Somnifères, anxiolytiques, antidouleurs, antiépileptiques ou encore anti-allergiques… Tous, à hautes doses, peuvent provoquer un black-out de plusieurs heures.
Docu choral d’une heure et demie sereinement et abondamment nourri, Pour que la honte change de camp fait témoigner six personnes violées après avoir été droguées à leur insu. Des histoires d’amnésie la plupart du temps puisqu’une victime de soumission chimique sur deux ne se souvient de rien.
Zoé, 15 ans lors des faits, n’a aucune idée de ce qui s’est passé la nuit de son viol, après la Fête de la musique 2006. Katia connaît son agresseur (un jeune banquier) mais sa culpabilité n’a pu être démontrée (94% des plaintes pour viol ont été classées sans suite en 2021). Violée par son père, Lilwenn a pu bénéficier des prélèvements capillaires prouvant qu’elle était régulièrement droguée. Et Renald se rappelle des heures de supplice après avoir eu le malheur d’accepter un verre d’un type à qui il se refusait…
Documentaire d’utilité publique, Pour que la honte change de camp raconte le chemin de croix, la justice expéditive et l’acquittement. La classe politique moins mobilisée que la société et l’hallucinante attitude des auteurs. Sur les 50 coaccusés de Mazan, 35 nient le viol tandis que 17 ont fait appel et sont donc à ce jour encore présumés innocents…
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