L’Homme au pousse-pousse
Des cinéastes ayant tourné un remake de l’un de leurs propres films, il s’en trouve quelques-uns, Alfred Hitchcock ( The Man Who Knew Too Much) et Michael Haneke ( Funny Games) en étant deux exemples fameux. Réalisateur de la trilogie Musashi, Hiroshi Inagaki fut l’un de ceux-là également, signant, à quinze ans d’écart, en 1943 et 1958, deux versions de L’Homme au pousse-pousse, aujourd’hui restaurées, et réunies par Carlotta en une même édition. Adapté du roman de Shunsaku Iwashita, le film se situe sur l’île de Kyûshû au début du XXe siècle et raconte l’histoire de Matsugoro, généreux conducteur de pousse-pousse au caractère bien trempé. S’étant un jour porté au secours d’un petit garçon, Toshio, il va faire la connaissance de ses parents, acceptant, à la mort soudaine du père, de veiller sur l’enfant, non sans tomber secrètement amoureux de la mère, la différence de milieu étant toutefois rédhibitoire. Une star succède à une autre dans le rôle de Matsugoro, Tsumasaburo Bando cédant le témoin à Toshiro Mifune, tandis qu’Inagaki opère un passage du noir et blanc à la couleur. Si certaines scènes sont tournées à l’identique, les deux versions varient en de nombreux points, le moindre n’étant pas un glissement vers le pur mélodrame dans celle, couronnée du Lion d’or vénitien, de 1958, d’une souveraine maîtrise esthétique (là où la première offre quelques moments étonnants, comme la stupéfiante scène de la course à pied). Un intéressant documentaire retrace par ailleurs l’histoire du film, soulignant l’audace de son réalisateur qui tournait l’original dans le contexte de la guerre du Pacifique -“ La censure devait dormir”, observe l’un des intervenants. Une découverte.
J.F. PL.
De Hiroshi Inagaki. Avec Tsumasaburo Bando. 1943. 1 h 19. Dist: Carlotta. Deuxième version avec Toshiro Mifune. 1958. 1 h 44. Dist: Carlotta.
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