
La sélection télé du 12 au 18 avril: le deuil virtuel, Glenn Close et le retour de No Man’s Land
A la télé cette semaine, le deuil au temps de l’IA, la deuxième saison de No Man’s Land, un portrait de Glenn Close et la Grande Dictée du Festival du livre de Paris.
Avec toi pour toujours
Mercredi 16 avril à 23.30 sur Arte
Documentaire de Hans Block et Moritz Rieswieck.
4/5
«Il y a quelque chose de plus fort que la mort, c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants», disait Jean d’Ormesson. Quelle place, cependant, doit-on leur y réserver? Et quel prix sommes-nous prêts à payer? Etant donné le développement de l’intelligence artificielle et les progrès technologiques ahurissants et effrayants qui l’accélèrent, la question du deuil semble plus que jamais d’actualité. Avec toi pour toujours raconte la naissance d’un business inquiétant et la course à l’innovation menées par des startups d’un genre nouveau désireuses de proposer un service global d’immortalité virtuelle.
Certaines permettent d’envoyer des vidéos à vos proches après votre mort. D’autres partent de l’empreinte numérique d’un individu et l’analysent pour essayer de reproduire sa personnalité. Plus inquiétants, certaines, en utilisant des données personnelles, créent déjà des avatars numériques de défunts capables de dialoguer et d’interagir avec les utilisateurs. Grâce à Project December, Joshua converse autant qu’il le désire avec le clone numérique de son amoureuse décédée. «La première fois que j’ai discuté avec le simulateur de Jessica, ça a duré toute la nuit. Le chatbot m’a dit des choses qui lui ressemblaient étrangement et j’ai fini par m’endormir à côté de mon ordi.» L’intelligence artificielle nous promet la même chose que la religion. Cette idée que la mort n’est plus une fatalité. Qu’on peut renaitre ailleurs sous une autre forme. Du moins ici donner l’illusion de notre présence…
«Si vous aviez la possibilité de parler à une personne morte que vous aimez, est-ce que vous le feriez?» Christi s’y est essayée. A voulu se rassurer. Mais a eu droit à son regretté petit ami qui lui affirmait être en enfer et hanter un centre de désintoxication. Même avec ses ratés, la machine est en marche. De plus en plus réaliste. De plus en plus immersive. En Corée du sud, dans le cadre de l’émission Meeting You dont le principe était simple –et si on pouvait retrouver l’un des membres de sa famille décédés–, Jang Ji-Sung a rencontré le clone en réalité virtuelle de sa fille disparue à l’âge de sept ans.
Tandis que les utilisateurs expliquent leurs raisons profondes et que les concepteurs fuient leurs responsabilités, une psychologue et sociologue, une critique technologique et analyste, un chercheur en éthique de l’IA et un autre dans l’industrie de la postérité numérique expliquent les mécaniques à l’oeuvre et soulèvent les dangers de ces entreprises qui font de la mort et du deuil un business. De ce capitalisme funeste qui se fait de l’argent sur la détresse des gens. Avec une question fondamentale sous-jacente: comment faire face à la perte de nos proches sans faire comme s’ils étaient encore là?
No Man’s Land (saison 2)
Jeudi 17 avril à 20.55 sur Arte
Série de Maria Feldman, Eitan Mansuri, Amit Cohen et Ron Leshem.
Avec Souheila Yacoub, Mélanie Thierry, James Krishna Floyd. Huit épisodes de 52 minutes. Aussi disponible sur Arte.tv.
4/5
En 2020, sa première saison avait récolté un retentissant succès public et critique. No Man’s Land racontait l’histoire d’Antoine, ingénieur parisien qui, après avoir cru reconnaitre sa sœur Anna dans un reportage télévisé aux côtés de combattantes kurdes de l’YPG, premier allié sur le terrain de la coalition occidentale contre le groupe Etat islamique en Syrie, décidait de partir à sa recherche.
Le point de départ de la saison 2 qui arrive enfin sur les écrans n’est pas bien différent. Quoique… Ellie, une jeune professeure texanne, repère un de ses anciens petits amis aux infos dans une vidéo de propagande de Daech. Mais Jake n’y est pas un résistant, un détenu ou une victime. Il y figure, menaçant, en bourreau. Pendant ce temps, au beau milieu des combats, alors qu’un journaliste tente de découvrir son identité, Anna sauve Nisrine une petite et frêle adolescente devenue esclave de l’organisation terroriste.
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Mêlant avec brio rigueur documentaire et intensité dramatique, la série franco-israélienne se focalise depuis ses débuts sur le combat des YPJ, les Unités de protection de la femme et éclaire le sort terrifiant qui lui est réservé par l’organisation djihadiste. Cette deuxième volée d’épisodes resserre de manière générale encore son récit sur ses figures féminines qu’elles soient victimes, résistantes, combattantes ou tortionnaire. No Man’s Land dépeint celles qui luttent. Prennent les risques les plus insensés et sont prêtes à tous les sacrifices. «Fermer les yeux n’est plus une option même si c’est la voie choisie par l’Occident.» Mais la série montre aussi celles vendues sur les marchés, emprisonnées, maltraitées, violées et celles réduites au rang d’esclaves au sein même de leur foyer.
Intelligente, haletante, terrifiante et bouleversante, brillamment interprétée aussi notamment par Souheila Yacoub (nommée cette année aux César dans la catégorie meilleure révélation féminine pour Planète B) et James Krishna Floyd en agent infiltré et tiraillé par l’amitié, la série questionne également ces Occidentaux en quête de sens mais qui sont partis dans le mauvais entretenir le bûcher de l’enfer à quelques heures d’avion.
Glenn Close, l’art de la transformation
Lundi 14 avril à 22.55 sur Arte
Documentaire de Catherine Ulmer Lopez.
4/5
Tour à tour marquise libertine (dans Les Liaisons dangereuses diffusé à 20h55 pour ouvrir une soirée qui lui est consacrée), majordome irlandais (Albert Nobbs), gardienne de la galaxie et méchante de Disney (Les 101 Dalmatiens), Glenn Close cache de son propre aveu, derrière ses grands yeux clairs, «un volcan dont la force tellurique est fréquemment contrainte».
Née dans une famille aisée du Connecticut tombée dans les filets d’une communauté religieuse conservatrice et fille d’un médecin réputé, docteur personnel du président Mobutu, Glenn Close a surmonté les blessures de son enfance par sa passion du jeu. Après s’être penchée sur le cas de Pedro Almodovar avec le documentaire L’Insolent de La Mancha, Catherine Ulmer Lopez brosse le portrait très habilement mené d’une comédienne qui a incarné l’une des méchantes les plus célèbres du cinéma (Cruella d’Enfer) et a refusé le Dune de David Lynch («je ne voulais pas être celle qui tombe»). D’une femme qui n’a jamais cessé de se battre contre les clichés et a toujours affiché, parfois au péril de sa carrière, une réelle volonté d’engagement sur les questions de société. S’élevant notamment contre les lois anti avortement. «Si les hommes portaient les enfants, ce problème ne se poserait pas.» Malin et copieusement alimenté par la principale intéressée.
La Grande Dictée
Mercredi 16 avril à 21.05 sur France 5
En 2023, selon un sondage de l’IFOP, I’Institut français d’opinion publique, 85% de nos voisins hexagonaux estimaient avoir un bon niveau en orthographe. Mais seulement 58% obtenaient une note supérieure à 12 sur 20 (36% au-dessus de 14) à la dictée avec des phrases basiques et sans piège majeur qui leur était soumise.
En Belgique, l’année dernière, l’épreuve portant sur la maîtrise approfondie de la langue française (l’EMLF) organisée pour les étudiants qui s’engagent dans des études pédagogiques n’a été réussie que par 12,67% des candidats. Envie de vous jauger? La Grande Dictée organisée le 11 avril au Petit Palais par le Festival du livre de Paris sur des textes d’Emma Green (pseudonyme derrière lequel se cache un duo d’écrivaines), Tatiana de Rosnay et Leïla Slimani autour de la thématique de la mer, est diffusée en télé ce mercredi sur l’antenne de France 5. Elle est présentée par Augustin Trapenard et Rachid Santaki qui animent également la correction des épreuves.
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