Ebon Moss-Bachrach (The Bear): “J’aime les personnages compliqués”
La troisième saison de The Bear débarque ce 17 juillet sur Disney+. En janvier dernier, son personnage de Richie lui offrait son premier Emmy Award. Ebon Moss-Bachrach recevait enfin la récompense qu’il mérite. L’année prochaine, il sera la Chose dans Les Quatre Fantastiques. Mais c’est dans sa cuisine que l’acteur est le plus heureux.
Lorsque la première saison de The Bear est sortie en 2022, le caractère révolutionnaire de la série ne sautait pas aux yeux. Et pourtant, elle a fini par hypnotiser. Son montage rapide, ses hausses de ton incessantes, sa nervosité constante nous ont rendu accros. Le mérite en revient pour une bonne part à Ebon Moss-Bachrach. Dans la série qui a pour cadre un restaurant familial en difficulté, il incarne Richie Jerimovich, le cousin rebelle de Carmy, le chef incarné par Jeremy Allen White. Il est le personnage avec le plus de « Fuck! » au compteur, et aussi celui qui irrite le plus. Dans la cuisine de The Bear, on ne peut l’éviter. « Je ne dirais pas que Richie est un connard, nous confie Ebon Moss-Bachrach via Zoom alors que la troisième saison de la série débarque ce 17 juillet sur Disney+. Vous savez quoi? Moi-même je suis un gros con. Mon travail d’acteur consiste à me battre pour mon personnage et à réaliser ses rêves et ses objectifs du mieux que je peux.«
Le fait que l’on ne sache pas toujours s’il parle de lui ou de son personnage en dit long sur la dévotion d’Ebon Moss-Bachrach à l’égard de Richie. Cette loyauté s’est révélée payante à l’écran. Le charisme du comédien de 47 ans inonde chaque scène et a progressivement permis à un Richie, être travaillé par des traumas plutôt que foncièrement mauvais, de devenir le personnage préféré du public.
Hey cousin!
En janvier, personne n’a vraiment été surpris par les six Emmy Awards décernés à la série créée par Christopher Storer. L’un d’entre eux est revenu à Ebon Moss-Bachrach. Jusqu’alors, sa carrière s’était résumée au théâtre et à de petits rôles à la télévision et au cinéma. On le découvre vraiment en 2014 dans la série HBO Girls grâce à son excellente interprétation de Desi, homme-enfant tourmenté. Mais c’est dans The Bear qu’il a véritablement explosé aux yeux du grand public. « On verra l’effet qu’aura la série sur ma carrière au final, déclare Moss-Bachrach à propos du succès des deux premières saisons. Mais il s’agit clairement d’une série populaire qui a un impact. Et je le ressens dans la vie de tous les jours. » Alors qu’il pouvait se promener dans le quartier en tout anonymat, des inconnus l’appellent désormais « cousin » dans la rue. Quotidiennement! « Mais surtout, j’aime en parler avec les gens. Le pouvoir de The Bear m’inspire profondément. Jamais je n’aurais pensé que la série pouvait relier autant de générations, de cultures et de pays.«
Dans Forks, septième épisode de la deuxième saison, on le voit éplucher les champignons avec Olivia Colman et fendre pour la première fois son armure: il n’en fallait pas plus pour que le personnage nous conquiert pour toujours. Forks résumait le meilleur de la série FX disponible chez nous sur Disney+, ce qui nous permet de traverser toutes les scènes horripilantes et hurlantes du show. Lorsqu’on retrouve Richie dans la troisième saison attendue sur Disney+ le 17 juillet, il semble avoir perdu toute la confiance gagnée en fin du fameux épisode précité. Ebon Moss-Bachrach confirme. L’affrontement entre Carmy et Richie dans le réfrigérateur, lors du final de la saison précédente, a été très éprouvant et lourd en attaques personnelles de part et d’autre. « Vieillir est toujours difficile. La vie n’est pas simple. Carmy et Richie essaient de briser les schémas qui les ont unis pendant des années.«
Alors que les deux premières saisons travaillaient encore à la concrétisation du restaurant The Bear, la troisième -sans trop spoiler- se concentre sur les efforts déployés pour le maintenir à flot. Et avec deux capitaines à bord champions de l’autosabotage, cela peut s’avérer compliqué. « C’est beaucoup plus facile de se réinventer au sein d’un nouveau groupe de personnes. Avec la famille, en revanche, c’est plus délicat. Elle vous rappelle constamment qui vous êtes. C’est en famille que je me comporte le plus mal. » À une exception près: lorsqu’il est avec ses enfants. C’est ce qu’Ebon Moss-Bachrach dit avoir le plus en commun avec Richie: ils sont tous les deux de bons pères. Richie a une fille de 10 ans, son interprète deux adolescentes qu’il a eues avec sa femme, la photographe Yelena Yemchuk. Ces derniers mois, il a séjourné à Chicago (où les acteurs ont mis en boîte la troisième et déjà la quatrième saison), mais New York, ville où il est né et vit toujours, reste l’endroit qu’il aime le plus. Parce qu’il y fait moins froid notamment. Mais c’est aussi là que se trouvent ses propres fourneaux. « J’adore cuisiner. J’aime l’acte de cuisiner et de progresser, une étape après l’autre. » Pour lui, ça relève de la méditation. « La cuisine est un moyen de donner un sens à l’existence chaotique que nous menons. » Et d’y voir aussi un geste d’amour. « Je n’ai jamais eu l’habitude de cuisiner. Ce n’est que lorsque ma femme était enceinte de notre première fille que je m’y suis mis. C’était une façon de prendre soin d’elle et de m’assurer que tout ce qu’elle mangeait était nourrissant. J’ai eu l’impression de contrôler la situation à ce moment-là.«
Dans The Bear, donner de l’amour, c’est cuisiner une omelette au Boursin ou encore servir de savoureux cannellonis. On demande à Ebon Moss-Bachrach l’assiette idéale pour dire « je t’aime ». « Préparer une soupe est toujours réconfortant, commence-t-il. Je fais aussi du pain mais peu souvent. Je ferais bien d’en faire deux tout de suite d’ailleurs. Je n’ai jamais vu quelqu’un se plaindre d’une miche de pain fumante fraîchement sortie du four. Faire du pain pour quelqu’un est un acte d’amour. » La liste pourrait être encore longue. Après une brève réflexion, il ajoute les spaghetti à la bolognaise. Ou tout ce qui nécessite une cuisson longue et lente.
Soupe, pain, spaghettis. Le menu dressé par Ebon Moss- Bachrach s’avère plutôt simple. The Bear n’a-t-il pas affiné son palais? « J’aime les bons restaurants et la bonne cuisine, nuance-t-il. Mais j’ai besoin d’espaces où l’on est détendu. La haute cuisine me rend nerveux. Dans les restaurants Michelin, la pression est si forte pour garantir un tel niveau de service que je ressens moi-même cette tension à long terme. Les restaurants étoilés me rendent fou. J’y ai toujours envie à un moment de mal me comporter, de hurler et de perdre tout contrôle.«
C’est justement ce tempérament qui lui a donné envie de décrocher les rôles de Richie, de Desi dans Girls ou encore d’Arvel Skeen dans la série Star Wars, Andor. « J’aime les personnages compliqués avec d’énormes nœuds et obstacles dans la tête. C’est ça jouer pour moi. Si j’interprétais une personne gentille, je m’ennuierais et ne m’amuserais pas beaucoup.«
En ce moment, Moss-Bachrach se prépare pour un rôle d’un tout autre calibre: la Chose dans le reboot des Quatre Fantastiques. La préparation le conduit non pas dans les cuisines de chefs étoilés, mais dans les salles de sport. Avec une constante toutefois: même la Chose est un peu con.
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