Avant d’incarner Dieu, Jeff Bridges renfile le costume de Dan Chase dans la série The Old Man

Dans The Old Man, Jeff Bridges y incarne Dan Chase, un vieil espion de la CIA. © Disney+

Avec une tumeur cancéreuse de près de 30 centimètres, Jeff Bridges n’était pas certain de pouvoir rejouer un jour. Et pourtant, trois années ont passé, et son emploi du temps est de nouveau bien garni. On le retrouve ici pour la deuxième saison du surprenant thriller d’espionnage The Old Man qui sort sur Disney+ .

Quiconque voit Jeff Bridges botter des fesses d’espions dans The Old Man a du mal à croire que la légende hollywoodienne pouvait à peine se lever de son lit il y a trois ans. En raison d’une grave infection au Covid en plus de sa chimiothérapie contre un cancer lymphatique, sa vie ne tenait plus qu’à un fil en 2021. Aujourd’hui, « Je suis de nouveau sur mes deux pieds, explique-t-il depuis son bureau de sa maison de Santa Barbara, où il vit avec sa femme Sue. Je peux faire ce que j’aime: être avec mes enfants et mes petits-enfants.« 

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Mais sa résurrection est aussi celle de The Old Man, un thriller d’espionnage enlevé qui a su trouver un équilibre entre les conventions classiques du genre et un drame familial complexe. Jeff Bridges y incarne Dan Chase, un ancien agent de la CIA actif lors de l’invasion soviétique de l’Afghanistan. Il y semble plutôt inoffensif avec sa respiration difficile, ses appels téléphoniques quotidiens à sa fille et sa démarche lente. Mais lorsque ses anciens ennemis le retrouvent, Chase se révèle être un véritable anti-héros. La première saison ressemblait à un jeu du chat et de la souris, multipliant les rebondissements et les vieux secrets, avec un Jeff Bridges magnétique.

C’est en Afghanistan que cette suite commence. Avec son ancien collègue Harold Harper (John Lithgow), Dan Chase espère récupérer sa fille auprès de Faraz Hamzad, le chef de guerre qu’il a poignardé dans le dos en s’enfuyant avec sa femme. Dans cette deuxième saison, The Old Man se concentre plus explicitement sur le drame axé sur les personnages, même s’il y a toujours de la baston. Mais c’est au tour de Bridges d’encaisser un peu les coups. « Dans la première saison, il y a une longue scène de bagarre de près de 11 minutes. Il s’est avéré par la suite que j’avais une tumeur de 23 centimètres sur 30 dans l’abdomen à ce moment-là. C’était une tumeur de la taille d’un bébé, et je n’avais rien remarqué.« 

La production a donc dû être interrompue pendant un an jusqu’à ce qu’il reprenne des forces. « Je ne savais même pas si je pourrais revenir, se souvient-il. Mais le soutien sur le plateau a été énorme. Les acteurs et l’équipe sont restés en contact tout au long de ma maladie. Et la plupart d’entre eux sont de retour avec moi cette saison, ce qui est formidable. » Il n’en est pas encore tout à fait revenu lui-même. « Quelque chose a changé. Même si je ne peux pas vraiment mettre le doigt sur quoi exactement. D’un autre côté, qui peut regarder les cinq dernières années de sa vie et ne pas ressentir la même chose? Apparemment, vos cellules sont censées se renouveler tous les sept ans, alors c’est peut-être juste ça. »

Dans la nouvelle saison de The Old Man, Jeff Bridges retrouve John Lithgow. © Disney+

Jeff Bridges avait aussi des raisons personnelles de revenir: cette deuxième saison lui permettait de jouer enfin face à Lithgow, avec qui il entretient une relation de frères ennemis dans la série. En dehors du plateau, c’est même devenu un ami proche. « Au cours de la première saison, nous étions constamment au téléphone, mais ce n’est que maintenant que nous avons pu jouer toutes ces scènes ensemble. Un vrai plaisir. » Il semble partager beaucoup de choses avec Lithgow. « Je me suis senti en sécurité et très à l’aise avec lui. » Ils abordent leur travail de la même manière, « classique », pourrait-on dire. Jeff Bridges n’a pas une très haute estime des adeptes de « la méthode ». « Certains acteurs veulent toujours être appelés par le nom de leur personnage, mais je ne travaille pas de cette façon, et John non plus. »

Enfant de la télé

Avant même de savoir marcher, le petit Jeff évoluait déjà devant la caméra dans Seahunt, la série d’action dans laquelle son père Lloyd a joué pendant de nombreuses années. Lorsqu’il décroche son premier rôle sérieux au cinéma, à l’âge de 20 ans, dans The Last Picture Show de Peter Bogdanovich, il obtient immédiatement sa première nomination aux Oscars, celui du meilleur acteur dans un second rôle. Ce qui l’a conduit à collaborer avec des réalisateurs légendaires tels que John Carpenter et à des rôles dans des classiques tels que Tron, Iron Man, True Grit et Crazy Heart, ce qui lui a valu son premier -et jusqu’à présent- seul Oscar. Mais le rôle le plus marquant de sa carrière restera celui du Dude, dans The Big Lebowski, fumeur de joints, buveur de russes blancs, et joueur de bowling aux prises avec le milieu criminel.

Il ne s’était jamais aventuré à la télévision. « J’ai longtemps résisté, explique-t-il. Enfant, j’ai vu mon père travailler dur et à quel point il était insatisfait de la vitesse avec laquelle les séries étaient réalisées. J’avais peur de me retrouver dans le même bateau ». Mais le plaisir est là. La télévision lui a offert un tout nouveau terrain de jeu. « On peut difficilement comparer ça à la réalisation d’un film où il y a un début, un milieu et une fin. Avec The Old Man, je n’ai toujours aucune idée de comment ça va se terminer. J’ai exactement les mêmes surprises que le spectateur en chemin. Chaque fois que je pense savoir comment Dan Chase va s’en sortir, je me trompe complètement. »

Aujourd’hui sa voie est toute tracée. En 2025, il va reprendre le rôle de Kevin Flynn dans Tron, face à un Jared Leto qui incarnera un programme informatique sophistiqué appelé Ares. Est-il attiré par les rôles de héros complexes? « La nuance est toujours bonne ». Ce qui fait de Dan Chase un personnage si intrigant dans The Old Man, c’est qu’il ne peut pas être classé comme bon ou mauvais. « C’est l’une des raisons pour lesquelles les téléspectateurs sont fascinés par la série. Nous y voyons une partie de nous-mêmes. Nous avons tous un passé que nous préférerions peut-être effacer. »

Son plus grand rôle est encore à venir. En juin, Jeff Bridges a été choisi pour jouer le rôle de… Dieu dans The Carnival at the End of Days de Terry Gilliam. Johnny Depp, un peu à la surprise générale, a été choisi pour incarner Satan. Après Tideland et The Fisher King, ce sera son troisième film avec le réalisateur iconoclaste. « Je ne peux pas encore en dire plus sur ce projet, mais il sera fascinant. C’est formidable de pouvoir être à nouveau sur le plateau avec Terry ». Au moins, dans le rôle de Dieu, il jouera le personnage le plus âgé que l’on puisse imaginer.

The Old Man (saison 2) **(*) de Jonathan E. Steinberg et Robert Levine

Disney + Avec Jeff Bridges, John Lithgow, Amy Brenneman.

Toujours coincé entre les séquelles d’un passé qu’il voudrait effacer et un présent dont ses anciens employeurs voudraient bien l’éradiquer, ce bon vieux Dan Chase (Jeff Bridges), agent très spécial et très vétéran, est désormais à la recherche d’Emily. La fin de la première saison, dans un de ces twists qui peuplent en abondance la série, révélait que celle-ci n’était pas la fille de Dan, mais bien celle de Faraz Hamzad, son kidnappeur et vieille connaissance de Dan avec qui il s’était infiltré en Afghanistan durant la guerre contre l’URSS. Désormais réconcilié avec Harold Harper (John Lithgow), Dan tente de retrouver sa fille.

Cette deuxième saison démarre avec la promesse d’une nouvelle dynamique, imposée par le duo relancé des meilleurs ennemis, Dan et Harold, nourrie de flash-back justifiant leur relation… compliquée. De même, l’alliance improvisée en première saison entre Dan et Zoe donne une nouvelle épaisseur au personnage incarné par Amy Brenneman. Mais The Old Man s’avère un peu rouillé lorsqu’il veut embrasser trop d’intrigues, jouer les gros bras et les gros cerveaux toutes les 15 minutes. La série aurait pu être un drame sombre sur les rouages et traumas d’une vie de couverture; elle se résume à un thriller d’espionnage musclé et paranoïaque de plus, délaissant ce que la première saison pouvait encore avoir de finesse et d’ambiguïté morale au profit du bruit, de la fureur et d’une obsession pour la résilience corporelle de Jeff Bridges. L’enchaînement de rebondissements et de victoires in extremis sur les ennemis successifs jusqu’au coup de théâtre final -histoire de réveiller la curiosité assoupie- devient à force ultra prévisible, quand il n’est pas carrément suspect.

Nicolas Bogaerts

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