DEPUIS 20 ANS, ETIENNE LÉCROART MANIE COMME PERSONNE L’HUMOUR ET LA RECHERCHE FORMELLE. NOTRE COUVERTURE ORIGINALE LUI RESSEMBLE BEAUCOUP.

L’Ouvroir de la Bande dessinée Potentielle, extension BD de l’Oulipo, compte un maître dans ses rangs. Etienne Lécroart, 20 ans de BD et de dessins de presse au compteur, et roi de la contrainte formelle. Membre actif de L’Association, il est le rédacteur en chef du mois de sa revue Mon Lapin. Un Lapin bien à lui: Lécroart a fourni à 20 auteurs la matrice d’une planche, décrivant son contenu sans en dire l’essentiel. Avant cela, il a déjà commis une BD palindromique (lisible dans les deux sens), des pages pliables, des narrations mathématiques… Toujours drôle et souvent formidable: c’est à lui qu’on décerne notre Fauve à nous.

Pourquoi cette relance de Lapin?

Lapin, c’est depuis toujours la revue traditionnelle de L’Association. On a tourné autour de l’envie pendant un an, puis est venue l’idée de Mon Lapin et d’un rédac’ chef par numéro. Je n’ai pas l’âme d’un homme comme ça, mais sur un numéro, c’est très amusant.

Comment est née cette manie de mener des réflexions formelles autour de la bande dessinée?

Je fais ça depuis longtemps. Des petits projets, des petits bouquins. Le premier, c’était un flip book à six entrées. Tu avais une histoire différente en fonction de l’endroit où tu plaçais le pouce. Puis j’ai fait des détournements de gravures, des pages divisées en trois… Un vrai plaisir de la déconstruction, de la recherche formelle. Je ne veux pas refaire des choses déjà faites, et bien mieux, par d’autres. Mais même ici, il ne faut pas se répéter: refaire un palindrome, ça n’a aucun intérêt. Je me dirige de plus en plus vers des contraintes plus simples, qui laissent de la place à la narration, aux récits plus intimes. Quand les contraintes deviennent trop lourdes, ce n’est plus intéressant. J’ai longtemps réfléchi à une sorte de rubik’s cube de cases de BD… J’ai calé, mais un ami a peut-être trouvé une astuce.

Et toujours, de l’humour. Il est omniprésent…

Car la contrainte amène l’humour. Je me réfère à la définition de Bergson: « L’humour, c’est un effet mécanique plaqué sur du vivant. » C’est ce que je fais: à une narration classique, vivante, j’impose une mécanique, la contrainte. Et elle amène toujours quelque chose d’inattendu, de comique et de léger.

Un avis sur l’élection du Président?

Ça m’a surpris qu’il n’y ait aucun francophone dans la sélection finale. Peut-être une envie des organisateurs de définitivement ouvrir Angoulême à l’international? Beaucoup d’auteurs étrangers ont sans doute voté, mais que les auteurs aient leur mot à dire, je trouve ça très bien. Sans ça, on n’aurait jamais eu Willem. L’idée de cette présidence, à mon sens, c’est de mettre en lumière une référence pour les auteurs, même si elle est méconnue du grand public. Comme Goossens à l’époque.

O.V.V.

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