Pendant les Nuits, le Bota accueille No New Enemies. Un collectif qui fait bouger les choses. Et l’art sous toutes ses formes.

En 2003, George Bush clamait que l’ennemi est invisible. Que l’ennemi est partout. « Si c’est vrai, nous devons craindre nos voisins. De quoi balayer tout sens de la communauté », rebondit No New Enemies. Collectif d’artistes, d’écrivains, d’académiciens, de gens passionnés, No New Enemies résiste à la réalité propagée, médiatisée et préméditée.

No New Enemies rejette la culture de la peur et investira le Botanique pendant les Nuits. Du 7 au 17 mai. « Cela fait plusieurs années maintenant que nous expérimentons des liens entre le festival et les arts plastiques, retrace François Delvoye, le responsable expos du Bota. Après les collectifs Souterrain et BlowUp, nous avons accueilli l’installation Mélange des genres de Bernard Gigounon. Cette année, nous voulions revenir à quelque chose de plus actif. Pour remplir l’espace. Pour que le musée du Bota ne se transforme pas en enclave. »

C’est tout le contraire que prôneront les membres de No New Enemies pendant les Nuits.

« L’art ne doit pas être cher et confiné aux galeries, explique Harlan Levey, fondateur du collectif et éditeur en chef de Modart Magazine. Notre structure tente de soutenir les artistes et de répandre l’art dans la vie publique. Elle est guidée depuis ses premiers pas par des gens qui veulent se faire entendre. »

Par d’autres, aussi, qui sont prêts à les écouter.  » Nous avons peint un mur récemment à Bruxelles, poursuit Harlan, Américain installé dans la capitale de l’Europe. Quelqu’un est venu nous remercier en racontant que le coin avant sentait mauvais. Que les gens avaient l’habitude de pisser sur la façade. »

IMAGINATION, EMPATHIE ET DéMOCRATIE

No New Enemies croit en l’imagination, l’empathie. Ils sont moteurs de création. Pistes de démocratie. NNE s’interroge sur notre espace public, les nouvelles possibilités et l’art de la collaboration. Il explore les contradictions entre consommateur et citoyen. Il joue le rôle de plate-forme, de trait d’union entre public, experts et élus. Les questionne sur l’intersection entre le street art, l’industrie et les stratégies qui fabriquent l’opinion et le consentement.

Il se focalise sur la responsabilité, le risque, les procédés plutôt que sur le produit final.

« No New Enemies ne se limite pas au street art. Certains artistes du collectif n’ont d’ailleurs jamais travaillé dans la rue. Ce qui nous semble important c’est que l’art bouge. En ville, en public, sur un t-shirt. La rue est, avec la télé, le meilleur endroit pour communiquer. »

Harlan Levey et son collectif n’en jettent pas moins un regard critique sur les médias.

« Est-ce que la télé et la publicité nous vendent ce que nous désirons ou créent-ils des besoins pour servir d’autres intentions?, questionnent-ils sur leur site Internet. En quoi l’éthique de MTV diffère-t-elle de celle de ses artistes? »

Et en quoi, a-t-on envie d’ajouter, No New Enemies est-il lié à la musique?

« La performance, voilà ce qui lie les Nuits du Bota et notre exposition, précise Levey. Le groupe comme le graffeur, le peintre, le vidéaste investit l’espace et tente de communiquer une émotion. Ces trente dernières années, l’industrie et la pub ont mangé une bonne partie de nos paysages urbains occidentaux. Mais comme les publicistes, les artistes et les activistes ont trouvé des moyens astucieux de faire passer leurs messages. »

DOUBLE VIE

Harlen Levey refuse d’associer, comme on en a souvent l’habitude, le rap et le street art.

« Les gens font souvent l’amalgame entre graffiti et street art. Le street art est un terme très vaste qui, à mes yeux, convient par exemple pour qualifier la Toison d’or à Bruxelles. Je n’aime pas confiner. D’ailleurs, pour moi, le hip-hop est lié au jazz, au reggae, au punk. « 

« Les membres du collectif bossent pas mal avec des groupes qu’ils soient rock, rap ou électro », commente François Delvoye.

Sculpture, peinture, vidéo, graff lumineux, design… L’expo sera plurielle. « Nous proposerons des choses inédites, des £uvres éphémères. Que ce soit dehors ou dans les serres, poursuit-il. No New Enemies va donner beaucoup de son énergie pour une expo d’une si courte durée. »

« L’important, ce n’est pas No New Enemies. Ce sont les artistes qui le font vivre, insiste Levey. 24 d’entre eux se dévoileront au Bota mais je ne saurais dire combien au total garnissent les rangs. »

Le réseau vivant fonctionne grâce au bénévolat et à des partenariats. Les artistes mènent souvent une double vie. Sont prof de dessin à l’Université, bossent comme graphistes dans des boites huppées. Ils viennent des Etats-Unis, d’Allemagne, d’Italie, d’Angleterre… De Belgique aussi. C’est le cas de l’illustrateur et designer graphique Christophe Remy, alias Never Effect. « No New Enemies, c’est un esprit plutôt qu’un style. Un côté un minimum subversif et critique par rapport aux médias lourds et aux institutions. Chacun a ses caractéristiques. Personnellement oui, je suis lié à la musique. Je viens du rock. J’ai joué longtemps dans un groupe. Je bosse avec le milieu en tant que graphiste. Je me suis d’ailleurs occupé de l’affiche de Dour l’année dernière.  » Cette fois, il figurera à celle du Bota.

u No New Enemies, pendant les Nuits, au Botanique. u www.nonewenemies.net

TEXTE JULIEN BROQUET

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