Redécouvrir les classiques de Wim Wenders

Parallèlement à la sortie en salles de Anselm et Perfect Days, plusieurs classiques de Wim Wenders sont réédités en versions restaurées.

Année Wenders, suite. Parallèlement à la sortie de Anselm et Perfect Days, une poignée de classiques du maître allemand Wim Wenders bénéficiant de restaurations 4K font l’objet d’éditions vidéo de référence. Premier chef-d’œuvre de son auteur, Alice dans les villes (1972) impose aussi son style, road-movie suspendu aux évolutions de Philip Winter (Rüdiger Vogler), un journaliste allemand en reportage aux États-Unis, et de Alice, une fillette de 9 ans, les circonstances amenant le premier à reconduire la seconde au pays pour la confier à une grand-mère introuvable. L’occasion d’une errance mélancolique balayant la géographie de la Ruhr à l’orée des années 70, tandis que s’ébauche une complicité entre les deux protagonistes. L’errance toujours est au cœur de Faux mouvement (1974), écrit par Peter Handke d’après Goethe. Vogler y campe un aspirant écrivain qui quitte sa petite ville natale pour Bonn, itinéraire pavé de rencontres insolites (Nastassja Kinski y trouve son premier rôle sous les traits d’une adolescente acrobate) et de réflexions diverses, le voyage embrassant aussi bien l’inconscient que le paysage germaniques. Enfin, Au fil du temps (1976) clôt cette trilogie de la route en opérant la jonction éphémère de deux solitudes, un réparateur de projecteurs (Vogler) et un homme venant de quitter sa femme (Hanns Zischler). Et le film de longer l’Elbe, dans un élan romantique, l’absence en arrière-plan, et la culture américaine en toile de fond -“Les Américains ont colonisé notre subconscient”, observent-ils, alors qu’ils bivouaquent à la frontière de la RDA.

Une influence qu’atteste L’Ami américain (1977), adapté de Patricia Highsmith, et qui voit Jonathan (Bruno Ganz), un encadreur de tableaux anciens atteint de leucémie, faire la connaissance de Ripley (Dennis Hopper), un trafiquant d’art, pour être bientôt engagé comme tueur par un troisième homme (Gérard Blain), moyennant des fonds pour se faire soigner. L’occasion, pour Wenders, de jouer avec maestria des codes du film noir entre Paris et Hambourg, et de livrer un curieux thriller existentiel, habité de caméos d’amis réalisateurs. Enfin, proposé en coffret ultra collector, Les Ailes du désir (1987) reste l’un des sommets incontestés de sa filmographie. Il a pour cadre, deux ans avant la chute du Mur, un Berlin parcouru par des anges invisibles recueillant les pensées des humains, l’un d’eux, Damiel (Bruno Ganz), tombant amoureux d’une trapéziste, Marion (Solveig Dommartin), pour qui il va envisager de sacrifier son immortalité. Soit un étincelant poème cinématographique en noir et blanc et en couleurs, aux accents métaphysiques doublé d’un hommage inspiré au Berlin d’alors. Cinéaste du temps, Wim Wenders est aussi celui de la mémoire.