Critique | Musique

Que penser de Hackney Diamonds, le nouvel album des Rolling Stones?

3 / 5
© MARK SELIGER
3 / 5

Album - Hackney Diamonds

Artiste - The Rolling Stones

Genre - Rock

Label - Universal

Critique - L.H.

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Fringants octogénaires, les Rolling Stones sortent Hackney Diamonds, leur premier album original en 18 ans. Les diamants sont éternels…

Depuis maintenant près d’un demi-siècle, les Rolling Stones réussissent une véritable prouesse: enchaîner les albums moyens, voire franchement dispensables, sans pourtant jamais mettre à mal leur mythologie. Chaque nouvelle sortie a ainsi continué de faire l’événement. C’est encore le cas de Hackney Diamonds, dont l’annonce, lors d’une conférence de presse diffusée en livestreaming, a remis une pièce dans la machine.

Business as usual? Si l’on se fie à la pochette, qui suit la ligne graphique adoptée depuis au moins Steel Wheels (1989) -en gros, du banal au hideux-, c’est clair. Si l’on se penche sur le contenu, il y a matière à discussion. Pour des raisons objectives, d’abord. Hackney Diamonds est le premier album de compos originales depuis A Bigger Bang, en 2005! Il arrive surtout deux ans après la disparition de Charlie Watts. Le batteur historique est encore crédité sur deux titres –Mess It Up, Live by the Sword. Le reste du temps, c’est un jeunot -Steve Jordan, 66 ans, habitué de la maison- qui garde l’église au milieu du village.

Baroud d’honneur

Hackney Diamonds titille aussi la curiosité par son générique ronflant. Sont ainsi venus donner un coup de main Elton John, Stevie Wonder, Lady Gaga, et même Bill Wyman (bassiste du groupe pendant 30 ans), tandis que la présence de Paul McCartney met officiellement fin à la (fausse) rivalité entre Stones et Beatles (c’est sa basse qu’on entend sur Bite My Head Off). Ce n’est pourtant pas ce casting clinquant qui fait le sel de Hackney Diamonds. Mais bien, encore et toujours, ses protagonistes principaux. En l’occurrence le trio Jagger-Richard-Wood, qui continuent de pétarader leur classic rock, comme si de rien n’était.

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Passons Angry, premier single goguenard qui fait mine de refléter l’époque pour mieux se vautrer dans un clip ranimant la figure de la bimbo peroxydée tout droit sorties des années 80 (OK, boomer?). Plus intéressant est par exemple Depending on You, dont la couleur country renvoie presque à Dead Flowers (1971), tandis que le rock sudiste Bite My Head Off réussit à conserver tout son gras. Si Mess It Up rappellera les (mauvais) souvenirs de Tattoo You (1981), la vraie pièce de résistance du disque -les 7 minutes blues-soul de Sweet Sounds of Heaven et son jeu de ping-pong entre Jagger et une Lady Gaga en feu- pourrait vous amener à faire ce qu’aucun disque des Stones ne vous avait poussé à faire depuis longtemps: réappuyer sur la touche play. Même le morceau obligatoire de Keith Richards –Tell Me Straight- tient la route…

Hackney Diamonds est-il l’ultime album des Stones, menés aujourd’hui par deux octogénaires (depuis juillet pour Jagger, en décembre pour Richards)? Sans faire d’âgisme, l’hypothèse tient la route. Comment manœuvrer sa sortie de piste? Ces dernières années, certains en ont fait des gestes artistiques forts (Bowie, Cohen). Roublard, Hackney Diamonds évite cette route-là. Si ce n’est en toute fin, quand Jagger et Richards se retrouvent pour une reprise de Muddy Waters, intitulée… Rolling Stone Blues. Si ce n’est un adieu, c’est en tout cas une belle manière de boucler la boucle.

© National

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