Werchter Boutique : Stromae brillant, Gorillaz pétaradant
Dimanche, Werchter Boutique a fait le plein de sensations fortes, avec le show de Stromae et le live débridé de Gorillaz. Cartoon network…
Werchter, épisode 1. Avant le Classic et la version « regular », la plaine brabançonne rouvrait sa Boutique. Avec en rayon, deux grosses têtes d’affiche pop. Voire carrément pop culture, tant les deux headliners ont réussi à créer tout un univers autour de leur musique. Celui-ci est d’abord visuel. Avant les comics débraillés de Gorillaz, place ainsi en début de soirée à la ligne claire pixar-esque du maestro Paul Van Haver, de retour au pays après avoir enfoncé le clou de son nouvel album en Amérique (à Coachella notamment).
De ses trois premières européennes en salle (dont le Palais 12, en février), Stromae a gardé quasi la même scénographie, impressionnante. Il y a les petits clips d’animations et les gadgets ludiques : le chien-robot qui vient faire son numéro de twerk et le fauteuil qui balade le chanteur d’un bout à l’autre de la scène sur le diptyque Bonne/Mauvais journée. Mais c’est surtout le ballet quasi permanent des écrans accrochés à d’immenses bras-robots qui donnent le tempo. Sur L’Enfer, par exemple, Stromae peut se permettre de chanter assis, derrière lui l’orage éclate en même temps que la musique. Même principe sur Quand c’est ?, où la maladie est figurée à la manière d’une ombre menaçante. Qui est le prochain ?, se demande Stromae d’une voix de fausset, devant 60 000 personnes, sonnées. « Encore une chanson joyeuse », se marre l’intéressé. C’est devenu un cliché que d’évoquer la formule « un sourire-une larme » pratiquée par Stromae. Que celle-ci garde toute sa puissance devant une plaine de festival remplie reste malgré tout sidérant.
Bien sûr, à l’applaudimètre, les tubes de Racine Carrée gardent la cote. Quand Stromae propose d’embrayer avec un titre du nouveau Multitude, la réaction du public se fait plus timide. « Quel enthousiasme », ironise le chanteur. Mais c’est bien à cela que sert la tournée : à faire connaissance et domestiquer la matière inédite. A cet égard, le set s’est encore affiné par rapport au spectacle du Palais 12. Le récit de Pas vraiment, par exemple, s’est précisé, et la cumbia décalée de C’est que du bonheur, sur le « métier de parents », a tout pour devenir un prochain hit. Mais c’est surtout Mon amour qui est transfiguré sur scène. Simplement exécuté en mode a capella au Palais 12, il se transforme ici en ballade aux influences rumba-zouk jouissives, un des grands moments du set. Et puis, il y a évidemment Santé. S’il avait peu surpris lors de sa sortie, force est de constater que le single est devenu un nouveau classique du répertoire du Bruxellois. Avant le rappel (l’inévitable Alors on danse), il est la parfaite conclusion d’un concert à nouveau bluffant, faisant danser jusqu’à l’autre bout de la plaine.
Des états d’âme de Stromae à la dystopie cartoonesque de Gorillaz, il n’y avait finalement qu’un pas. Ici aussi, les animations sont au cœur du concert. Elles sont même à la base du groupe virtuel de Damon Albarn et Jamie Hewlett. Il est loin cependant le temps où le groupe donnait ses premiers concerts planqué derrière des écrans. En 2022, Gorillaz est une troupe exubérante qui démarre pied au plancher avec la charge punky de M1 A1 et les angoisses de Strange Timez (avec la voix de Robert Smith). Faisant le grand écart entre le premier et le dernier album de Gorillaz, l’enchaînement préfigure parfaitement la setlist du soir, distillant parcimonieusement les titres de Song Machine, sorti en 2020, dans une sorte de grand best of (Dirty Harry, Clint Eastwood, Stylo, etc).
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Sur scène, se bousculent guitare, basse, plusieurs batteries, clavier, un chœur de cinq chanteurs, rejoints par une série de special guests, comme Fatoumata Diawara sur Désolé ou Posdnuos de De La Soul sur le classique Feel Good Inc. Damon Albarn lui-même est particulièrement déchaîné, allant chercher la foule à une heure déjà avancée de la soirée, testant même la longueur de son fil micro pour partir se balader dans le public pendant Pirate Jet. Tiré de Plastic Beach, et illustré d’images de chasse à la baleine, le morceau rappelle au passage à quel point le propos de Gorillaz, lancé il y a maintenant plus de 20 ans, reste pertinent…
Il paraît d’ailleurs que le groupe a réussi à accrocher un nouveau public, la Gen Z derrière laquelle toutes les plateformes courent. Le fait que Billie Eilish répète régulièrement son admiration pour Albarn (invité à la rejoindre sur la scène de Coachella) a pu aider. L’arrivée sur TikTok également. Lancé il y a un mois à peine, le compte de Gorillaz a déjà attiré quelque 1,4 millions d’abonnés. Les dernières capsules publiées présentent en outre de nouveaux visuels. Le personnage de Murdoc annonce ainsi le lancement d’un « nouveau culte », affublé d’une robe de bure fuschia – la même qu’a portée Albarn sur scène durant le morceau Fire Flies. Les fans sont forcément au taquet. Certains sites annoncent ainsi l’arrivée imminente du nouveau single Cracker Island (avec Thundercat), petit sucrerie funky jouée dimanche à Werchter. A suivre…
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