The Chats, punks from Down Under
Trois jeunes punks australiens remplissent l’Orangerie et se paient Rock Werchter. Chats sauvages…
À l’été 2019, avant même la sortie de leur premier album (High Risk Behaviour), les Chats retournaient une des tentes du Pukkelpop. Smoko, clip bricolé avec 5 dollars (le prix du hot dog que le guitariste s’enfile) et single imparable et morveux qui célébrait à sa manière la pause clope, avait déjà tourné viral, présagé le grand retour de la coupe mulet et élevé le groupe australien au rang des punks à suivre. Trois ans et une pandémie plus tard, le trio emmené par Eamon Sandwith s’apprête à remplir le Botanique, à jouer sur la plaine de Rock Werchter et à sortir un nouveau disque (Get Fucked) taillé pour les fans de Johnny Thunders, des Pistols et des Ramones.
One, two, three, four… Eamon est né le 28 juin 1999 dans le Queensland, sur la côte est. Sa mère est journaliste à la radio, son père chef pâtissier. “Ils ne faisaient pas de musique, mais il y avait des CD qui traînaient à la maison et ils m’ont emmené à des concerts. Le premier, ça devait être Powderfinger. Ma maman avait des disques de Radiohead et de Coldplay. Mais mon daron, lui, c’était les Saints et Radio Birdman. À la base, je devais avoir 10 ans, je voulais apprendre la batterie. Mais ma madre a refusé. Trop bruyant. Donc, je me suis mis à la guitare.”
Eamon est chez lui, à Brisbane. Au mur trônent des posters de ses héros. L’un rend hommage à Joey, Johnny, Dee Dee et Tommy Ramones. L’autre met à l’honneur Jello Biafra, l’ancien chanteur des Dead Kennedys. Les Chats ne sont pas du genre à faire des cachotteries et à taire le nom de ceux qu’ils vénèrent. Ils ont consacré et dédié une de leurs chansons à AC/DC, sont fiers du rock australien et de son Histoire. “J’aime beaucoup Eddy Current Suppression Ring et Royal Headache. Plus près de nous, COFFIN et Stiff Richards. Cosmic Psychos, Hard-Ons, The Scientists… Franchement, on peut se targuer d’un riche passé.”
Sandwith a vécu dans une ennuyeuse ville de mineurs jusqu’à ses 12 ans avant de bouger sur la Sunshine Coast. Certes plus vivante, mais tout sauf punk. “Il n’y avait pas de concerts où on pouvait aller. Donc, on a commencé à les organiser et on a créé un groupe pour y jouer…” Après l’école, le rouquin a fini par s’installer à Brisbane, grande cité portuaire avec ses salles et une vraie scène musicale. Quand on lui demande s’il arrive à expliquer le succès de Smoko, Eamon se la joue modeste: “Je pense qu’à un moment, tout le monde se disait qu’on allait disparaître dans le mois. Mais avec l’album, on a montré qu’on avait des chansons. Le succès est sans doute lié à un truc d’algorithme du Net. Ça a gagné en popularité et tout à coup, c’est devenu dingo. Le morceau est apparu sur toutes les pages YouTube. Je tombe moi-même encore dessus aujourd’hui quand je vais y regarder des vidéos.”
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Nouveaux punks
Qu’est-ce que cela signifie d’être un punk en 2022? Est-ce que ça veut seulement encore dire quelque chose? “Grande question. Le punk dans sa forme la plus pure, c’est l’expression de soi. Être qui on est. Se battre pour ses idées. Peu importe à quoi tu ressembles et comment tu t’habilles. C’est un son aussi. Tu as toujours des gens pour te dire que les rappeurs sont les nouveaux punks. Mais il y a toujours eu des punks et il y en aura tout le temps. C’est juste qu’ils ne sont pas très exposés. Qu’ils ne sont plus mainstream.”
No fun. Sandwith le concède. Le punk et même le rock en général ont un peu perdu leur sens de la fête. “Beaucoup de concerts et de groupes sont décevants. Mais si tu ne te marres pas sur scène, comment veux-tu que les gens s’amusent dans la salle?” Comme ses paroles, le jeune homme a le sens de l’humour. Un tas de trucs le font rire. La satire, les blagues vulgaires, Les Simpson, Futurama ou encore la série It’s Always Sunny in Philadelphia, les aventures d’un groupe d’amis qui tiennent un bar irlandais miteux. Il ne peut s’empêcher de citer School of Rock avec Jack Black. Tout ce qui semble l’obséder, même simplement l’intéresser, touche à la musique. “ Pour l’instant, sur ma table de nuit, j’ai Get in the Van de Henry Rollins. J’ai lu récemment le bouquin de Monte A. Melnick, le tour manager des Ramones, mais aussi celui de Charles Perkins (un joueur de football, activiste et administrateur aborigène, NDLR).”
Eamon a longtemps eu la chevelure d’un footballeur. Mais plutôt celle d’une équipe allemande dans les années 70. “Il a vraiment fait chaud ici l’an dernier et je me suis rasé la tête. Mais mes tifs repoussent. Ils vont revenir, vous inquiétez pas. La coupe mulet est interdite dans certains bars ici en Australie. C’est incroyable. Ils te jugent par ta coupe de cheveux. Ils décident si tu es violent ou pas en regardant comment tu es coiffé. Je ne pense pas qu’on ait des gangs à coupe mulet mais s’ils existent, je suis vexé qu’ils ne m’aient pas envoyé d’invitation.”
Du haut de ses 21 ans, quasiment 22, Sandwith, sympa, bienveillant, concède que l’Australie reste raciste et conservatrice sur bien des points. “Notre dernier Premier ministre était extrêmement conservateur. Un mec très religieux. Le nouveau a l’air un peu mieux. On verra. En voyageant, je me suis rendu compte que l’Australie était clairement plus réac que les pays européens et même que les États-Unis.”
Dans la plus pure tradition de chez lui, Eamon a un CV bien fourni. Il chante et joue de la guitare dans le groupe de synth punk Headlice, s’assied derrière la batterie de Rick & The Sicko’s et épaule son nouveau guitariste (le précédent a décidé de suivre ses propres aspirations) dans The Unknowns – “du rock’n’roll façon 1977, presque de la power pop”. Comme il le résume, le nouveau Chats à paraître en août sera “plus rapide, plus tendu, plus drôle, plus tout” . Everybody wants to be a Chat…
Le 28/06 au Botanique (complet) et le 01/07 à Rock Werchter (complet).
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