Talisco, un Bordelais à L.A.
Talisco figure à l’avant-garde de la pop française, mais c’est aux Etats-Unis principalement qu’il est allé chercher l’inspiration d’un deuxième album, sillonnant les grands espaces.
Il ne cache pas avoir été un peu anxieux, Jérôme Amandi, alias Talisco. Anxieux dans l’attente des premiers retours média sur Capitol Vision (1), son deuxième album tout frais. Mais trois semaines après son atterrissage dans les bacs, ils sont là, dans le sens espéré: « Il y a de l’enthousiasme, plein de bonnes réactions, c’est très positif et je suis soulagé. » Preuve que même à l’heure des réseaux sociaux et de la com directe avec les fans, le fameux syndrome du deuxième album existe toujours. Celui qui doit confirmer tout le bien qu’on a pensé de son prédécesseur, dont il ne peut être une redite ou une décalque.
Sans l’avoir assidûment écouté, on aurait difficilement pu passer à côté de ce premier Talisco intitulé Run. En 2015, The Keys, extrait du disque, était en quelque sorte devenu la bande-son officielle des clips publicitaires d’un tout gros opérateur téléphonique de l’Hexagone. Et il lui a tellement plu qu’il sert encore ces jours-ci à célébrer sa 4G, remixé façon « party » par Yuksek. En un mot comme en cent, Jérôme n’avait pas vraiment disparu des écrans radars. « Oui, Run avait été remarqué, commente-t-il sobrement. Vu l’enthousiasme, on se pose la question de savoir si le pari du deuxième va être réussi. Pour le moment, ça se passe très bien! »
Le natif de Bordeaux s’est vite casé parmi les noms de la pop qui sonnent made in France. Avec les Jain, les Christine & The Queens. Ceux qui sont allés se balader hors des sentiers balisés de la variété. L’histoire de Talisco, elle, a des couleurs américaines. Et ce nouveau chapitre, toujours en anglais, n’a pas fini de l’exciter. « Le premier album a été créé autour du fantasme, de rêveries. Avec celui-ci, on est purement dans la réalité. » Le concret, celui notamment de trois ans passés sur les routes, au fil de presque 250 concerts… « On a fait le tour de l’Europe, on est partis en Angleterre, au Canada… Et on a tourné un mois et demi aux Etats-Unis. On a vécu des moments fous, des moments qui ont été très, très forts. C’est de ça dont je parle dans cet album. Capitol Vision, c’est pour moi une métaphore. Le Capitole est un monument emblématique, historique, et j’ai imaginé m’être hissé à son sommet, pour contempler les moments les plus intenses de ces trois dernières années. »
Love story
Celui qui passe beaucoup de temps dans les avions s’est trouvé, à Los Angeles, un point de chute récurrent mais n’en caresse pas pour autant un rêve américain. « Je n’ai jamais dit que je voulais conquérir les Etats-Unis ou quoi que ce soit, s’empresse-t-il de corriger. Mais j’aime ce pays parce que c’est un mélange fou de cultures, de climats et de végétations… C’est un monde, en fait. » Un monde rempli d’opportunités, en ce qui le concerne. « Et dans l’univers de paysages que j’ai créé, les Etats-Unis sont plus appropriés. J’ai vu beaucoup d’images, de films et, à un moment donné, j’ai ressenti des affinités pour certains endroits, certains lieux comme la Californie. Sur le deuxième album, je me suis complètement approprié Los Angeles. »
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Los Angeles, et pas celui du bling-bling ou du glamour, Talisco y a passé pas mal de temps. Mais sans jamais y rester plus de quinze jours d’affilée. Juste ce qu’il faut pour être transformé, assure-t-il. « C’est le dessert exquis qu’on vous retire après trois bouchées. Vous voyez ce que je veux dire? C’est la durée parfaite pour apprécier et ne jamais être lassé. Ces allers-retours ont participé à cette love story que j’ai avec les Etats-Unis. Je ne me pose jamais dans un seul endroit, parce que je n’ai pas le temps, et du coup, je tombe amoureux de plein d’endroits. Je les fantasme, je les rends plus beaux qu’ils ne sont parce que je n’ai pas le temps de m’en lasser. »
L’ampleur des compositions de Capitol Vision se fait l’écho des grands espaces américains. On y entend du folk et des envolées lyriques mais aussi un peu d’électronique. Roots et contemporain. Sur scène, Talisco est un groupe. Sur disque, c’est Jérôme tout seul, mais à l’écoute de titres comme Thousand Suns ou The Martian Man, on a l’impression qu’il a été enregistré avec tout un orchestre. « Orchestrations luxuriantes », peut-on lire dans la bio du garçon… « C’est ce que je recherche. Je travaille énormément sur le son. J’aime créer dans l’instant et de manière très instinctive, mais après, j’y mets de la couleur, des arrangements. Et j’y passe du temps. J’ai envie que ce soit beau, que ça raconte une histoire. J’ai envie qu’on entende un son mais qu’à la deuxième écoute, on en découvre un autre et ainsi de suite. Par conséquent, je m’amuse à y glisser plein de petits détails. »
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L’expérience américaine
Ces détails sont peut-être moins perceptibles en concert : sur les planches, le ton est nettement plus rock. « C’est une volonté. J’adore la guitare. Sur scène, j’ai envie que ça sonne fort, que ça transpire. Sur disque, le rock me fatigue parfois, mais sur scène, j’aime quand c’est immédiat! » Dans quel genre? A la question de savoir quel groupe lui a récemment fait cet effet, il répond Band of Skulls. « Par exemple… Ça ne ment pas, ça livre directement quelque chose de brut! » Comme il l’a déjà dit à quelques reprises, pas question d’intellectualiser sa musique. « C’est propre à ma façon de fonctionner au quotidien. Je dis les choses sans détour. Je suis un curieux et j’aime aussi ce qui est complexe, mais je voudrais que ma musique s’adresse aux gens de manière franche. Quand j’intellectualise, j’ai l’impression que ça me ressemble un peu moins. J’aime donc l’idée de donner quelque chose de direct. »
Cette année, Talisco retournera encore aux Etats-Unis. Pour lui, « l’expérience américaine » se poursuit. Pas sûr pourtant qu’elle soit vécue comme auparavant, ou qu’elle lui apporte le même genre d’inspiration. L’élection présidentielle et l’actu sont passées par là… « C’est une vraie question, réfléchit-il. Mais je ne sais pas si ça m’atteint tant que ça. J’ai toujours été en dehors de ça, en fait. Je n’associe pas la politique à l’artistique. Pour l’instant en tout cas, ça n’a jamais gangrené mes compositions. Je pense que je vous dirai ça d’ici quelques mois. C’est vrai qu’il y a des événements politiques qui peuvent changer la donne, mais je ne sais pas du tout comment… »
(1) CD Capitol Vision chez Roy Music. En concert le 16 mars prochain au Reflektor à Liège (avec Konoba) et le 17 mars au Salon, à Silly.
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