Souffrance, Iliona, Alabaster DePlume, et Dienne: on écoute quoi cette semaine?

Sur son nouvel album, le rappeur Souffrance collabore notamment avec Chilly Gonzales
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Dans les sorties du moment, on vous conseille de jeter une oreille aux rimes teigneuses du rappeur Souffrance, aux tourments amoureux d’Iliona, mais aussi au jazz poétique d’Alabaster DePlume ou au road trip ambient de Dienne

1. Alabaster DePlume – A Blade Because a Blade Is Whole

Même au sein de la bouillonnante scène jazz londonienne, Alabaster DePlume a toujours fait figure d’ovni. Pierrot lunaire et solaire à la fois, Angus Fairbairn publiait l’an dernier le recueil de poésie Looking for My Value: Prologue to a Blade, une réflexion de 70 pages sur le fait que la dignité et l’autodétermination sont des conditions préalables à devenir entier et donc à guérir.

A Blade Because a Blade Is Whole explore ces pistes en musique, se demande comment vivre avec les forces qui cherchent à nous détruire (Invicibility) et s’inspire du moine et activiste vietnamien Thich Nhat Hanh (Thank You My Pain)… Les paroles du disque, à demi instrumental, sont extraites de l’ouvrage et lient ces onze titres qui mêlent folk, jazz, poésie et spoken word. Là où le saxophone ténor de DePlume et son envoûtante sonorité éthio-jazz, sa voix à la Devendra Banhart et les arrangements de cordes de Macie Stewart (Momoko Gill et Rozi Plain figurent aussi entre autres au casting) portent cet album guérisseur. Splendide. ● J.B.

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Distribué par International Anthem. Le 22 mai à l’Aéronef, à Lille, et le 23 mai au Botanique, à Bruxelles.
La cote de Focus : 4/5

2. Iliona – What if I break up with u

En 2020, en pleine pandémie, Iliona sortait ses premiers morceaux, suscitant instantanément la curiosité. D’aucuns se seraient dépêchés de surfer sur le début de hype. La Bruxelloise a préféré prendre son temps. Trois ans déjà après l’EP Tête brûlée, elle sort l’album What If I Break Up with U.

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Sa première qualité est d’affiner une identité musicale, sans jamais s’y enfermer. Remuant blessures amoureuses et vertiges existentiels –au hasard: «C’est pas les traumas qui remontent, c’est juste la tendance que j’ai à me détester», sur Text Back–, Iliona confirme son don pour combiner classicisme chanson et angles plus générationnels. De la dégaine rock de De ton côté à la ballade en cinémascope de Fishsticks, en passant par les agitations new wave à la PinkPantheress de Le Lapin. Une vraie réussite. ● LH.

Distribué Jevousamour. En concert le 15/1 , à l’Ancienne Belgique (Bruxelles)

3. Souffrance – Hiver automne

Originaire de Montreuil, membre du collectif L’uZine, Souffrance ne s’est jamais beaucoup éloigné de sa ligne de conduite: celle d’un rap teigneux, préférant la rime vicieuse au gimmick calibré pour cartonner sur TikTok. Quitte à le condamner à la marge. Quand il sort son tout premier album, en 2021, il a déjà 35 ans… Dans la foulée de Tranche de vie, il apparaît cependant sur le Classico de Jul, enchaîne avec Tour de magie, puis, en 2023, avec le puissant Eau de source. Il publie aujourd’hui Hiver-Automne, nouvelle collection de morceaux rap à la dent dure.

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Sur le titre Meilleur, en duo avec Isha, Souffrance résume: «Je suis pas inconnu/mais je suis pas très connu.» Désormais mieux identifié sur la carte du rap FR, il est en effet encore loin d’en être une tête d’affiche. Et ce n’est peut-être pas plus mal –«Succès risque de m’emmener jusqu’en psychiatrie», glisse-t-il par exemple. Il continue donc de faire pousser ses rimes dans le bitume. «Bienvenue tout en dessous», annonce-t-il sur King Size, là où «comme les autres, j’ai vrillé zombie», ajoutant, narquois: «Les flics me collent au mur/je suis un Banksy.»

A l’aise dans la position de l’underdog, Souffrance ne s’y complaît pas pour autant. A côté d’Isha et Jewel Usain, il invite par exemple aussi Soprano, le rappeur des familles, à peine reconnaissable sur Compte double. Sur Barbecue en hiver, Souffrance rappe également avec Chilly Gonzales. Ce n’est pas forcément le meilleur passage du disque. Co-producteur principal (avec TonyToxik), l’impact du pianiste canadien est surtout précieux dans les touches plus musicales qu’il apporte sur des titres comme Tango, Bizon ou Puissance en bars. Hiver-Automne est ainsi le genre de disque de rap où l’on (ré)entend à la fois des scratch (!), des guitares, du bandonéon ou des orgues. Un album qui permet à Souffrance de donner à ses textes, toujours aussi saignants, une nouvelle intensité. «Le rap est mort, je suis venu dépecer la charogne»: vive le rap! ● L.H.

Distribué par Hall 26/Pias. Le 19 avril à l’Eden, à Charleroi.
La cote de Focus : 4/5

4. Dienne – Conducturis

En 2022, Dienne Bogaerts sortait Addio. Une élégie ambient, publiée sur le label de la superstar Nicolas Jaar. Trois ans plus tard, elle revient avec Conductiris, bande-son d’une installation artistique, réalisée par Cédric Noël et Mira Sanders. En découvrant l’existence d’une liaison par fibre optique entre un centre de calcul de Lugano et un labo scientifique de Genève, impliqué dans le Human Brain Project (un milliard d’euros investis dans les neurosciences de 2013 à 2023), ils ont imaginé une sorte de road movie digital.

Dienne en fournit la B.O., entremêlant à nouveau instruments organiques et textures électroniques: voix d’opéra s’invitant sur les nappes angoissantes dans The Great Cable, hautbois se greffant sur Beneath the Laboratory ou blips cérébraux connectant sur Motor Cortex. Le résultat est à la fois fascinant et angoissant, dans sa manière de flouter toujours plus la frontière entre l’humain et la machine. ● L.H.

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Distr. Cortizona
La cote de Focus : 3,5/5

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