Rock Werchter J2: Pharrell et le reste du monde
Oubliez l’après-midi mitigé, cette deuxième soirée au Rock Werchter fut belle et riche en beaux moments. Grâce à Pharrell, on sait désormais que le bonheur existe.
Après un après-midi en dent de scie, il s’agissait de se faire plaisir. Ça tombe bien: le gros de la deuxième journée du Rock Werchter est programmé en soirée. A 20h20, c’est ainsi Alt-J qui déboule avec son fameux Matilda sur la scène The Barn. Immédiatement repris en coeur, les Anglais peuvent être confiants. Ils se présentent en terrain conquis. Et séduisent. Du moins, le pense-t-on: c’est en effet de l’extérieur, en plein brouhaha, que l’on assiste au récital de Joe Newman et sa bande. Un fait regrettable, tant Alt-J, dont le deuxième album a peiné à confirmer les espoirs du premier forfait, semble avoir pris de l’assurance en live. Merci donc au Rock Werchter de prévoir des scènes aux jauges trop petites pour accueillir tous les festivaliers…
Sans rancune, pour autant. Dès 21h30 tout est même pardonné avec l’arrivée de FKA Twigs. Dans un Klub C à moitié vide (ou à moitié plein, c’est selon), celle qui se veut l’héritière de la pensée afrofuturiste (la politisation en moins) livre une performance d’une désarmante beauté. Telle une déesse mystique, elle impose de bout en bout un charisme subtil, entretenu avec aisance et liberté par des beats percutants, un chant suave et des chorégraphies savamment travaillées. On le dit sans honte: s’agissant d’une jeune artiste à la discographie assez réduite, on ne s’attendait pas à tant de prestance et de toupet mélodique.
Tout le contraire en somme de Mumford & Sons dont les rêves de grandeur – dans le son, le chant et le jeu de lumières – nuisent grandement à l’ampleur mélodique de leurs morceaux, plus que jamais taillés pour les stades. C’est regrettable, certains titres séduisent (l’imparable Little Lion Man), mais le collectif londonien n’avance aucun argument pour nous inciter à rester plus longtemps. D’autant que sur la plaine, l’ambiance s’électrise – des jeunes se biflent, des moins jeunes cuvent dans un coin malgré le port de leur t-shirt parodique « The Lord Of The Drinks » – et que Roisin Murphy s’apprête à investir le chapiteau The Barn pour une performance maîtrisée, par ses mélodies robotiques, ses synthétiseurs mécaniques et par un défilé impressionnant de costumes, tous plus kitsch les uns que les autres. Et ça fonctionne. À dire vrai, cette théâtralité, c’est précisément ce qui permet à cette nouvelle orientation esthétique de prendre vie en live.
Si l’on est particulièrement enthousiasmé par l’ancienne chanteuse de Moloko, ce n’est rien en comparaison à la star de la soirée: Pharrell Williams, qui fait son entrée en entonnant son Freedom – dont la version studio sera dévoilée en avant-première sur Apple Music le 30 juin – avant de se lancer pendant plus d’une heure dans une succession de tubes hédonistes dont lui seul a le secret. Qu’on aime le personnage ou non, qu’il chante parfois au-dessus d’une bande ou pas, qu’on le soupçonne de transformer son concert en immense publicité pour une marque à trois bandes, peu importe. Le fait est que l’on ne peut pas nier la magie de sa formule. Sans son désormais célèbre chapeau, Pharrell enchaîne ainsi les hymnes groovy, se lance dans un fabuleux medley de ses célèbres productions (I’m Slave 4 U, Hollaback Girl, Beautiful, Drop It Like It’s Hot) et de ses plus grands succès (Rock Star, She Wants To Move…), invite hommes et femmes à venir se dandiner sur scène, charme avec classe ces dernières, convie des enfants pour chorégraphier Happy et parvient à faire chanter tout le monde – même les grands papas baraqués – avec Get Lucky, avant de se lancer une dernière fois dans un Freedom tout en émotion. Bref, tout le monde est beau, tout le monde est bon et, c’est désormais une certitude, il suffit d’ouvrir les yeux pour entrevoir le bonheur. Oui, Pharrell est capable de tout ça. Depuis ses débuts avec Neptunes, Pharrell est tout simplement au-dessus.
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