Rebeka Warrior est-elle la nouvelle queen de l’indé français? (spoiler : oui)
De Sexy Sushi à Kompromat en passant par Mansfield. TYA, Rebeka Warrior est devenue non seulement une icône queer, figure incontournable de la scène indé française, mais aussi une référence pour la nouvelle génération.
C’est bien connu, les héros ne portent pas forcément de cape. Prenez Rebeka Warrior. En interview, elle est bavarde, affable, déconneuse. Sur scène, aux côtés de son comparse Vitalic par exemple, il lui suffit d’enfiler ses lunettes noires cerclées, façon Matrix, pour se transformer. Crâne rasé de près, dégaine de boxeuse poids plume, elle enchaîne harangues et caresses, emmenant le public avec elle sans jamais le manipuler. «C’est vrai que j’ai envie de créer une espèce de communion. J’aime vraiment être avec les gens, créer du collectif. Je ne me force pas du tout. C’est même quelque chose qui me semble nécessaire à mon bien-être.»
C’est sans doute l’une des raisons qui explique que Rebeka Warrior est devenue ces dernières années l’une des figures clés de la scène musicale indépendante française. Voire un modèle pour la jeune génération. Comme Eloi ou Zaho de Sagazan. «C’est évidemment une référence », confirmait par exemple cette dernière, quand on la rencontrait pour la sortie de son album. Bien avant le carton de La Symphonie des éclairs, Rebeka Warrior invitait d’ailleurs la jeune femme à faire sa première partie. «A l’époque, je n’étais encore jamais montée officiellement sur scène, mais je ne pouvais pas dire non…»
La vie à deux
Les deux ont en commun Saint-Nazaire. C’est là que Julia Lanoë est née, en 1978. Ado, elle se bute au son techno-gabber des compilations Thunderdome. Mais est également fascinée par la démarche indie-punk radicale de Bérurier Noir. Autre genre, même intensité. A 18 ans, elle s’inscrit aux Beaux-Arts, à Nantes. Julia veut devenir peintre, mais se fait rapidement rattraper par la musique.
Au début des années 2000, Sexy Sushi est son premier exutoire. Constitué avec Mitch Silver, le duo mélange beat techno et attitude punk-trash. Une musique prétexte à des concerts souvent foutraques, tenant quasi de la performance. Par exemple en proposant au public de tourner la « roue de l’infortune » pour désigner le morceau suivant (avec le risque de tomber sur la case banqueroute, signifiant la fin du concert).
Dans la foulée, Rebeka Warrior va monter un autre duo, avec la violoniste baroque Carla. Baptisé Mansfield. TYA, le projet se détache de l’humour potache de Sexy Sushi pour explorer des sentiments plus intimes. Sans abandonner les sonorités électroniques, mais en les accompagnant cette fois de couleurs plus organiques. En 2021, six ans après le dernier album, le binôme sort Monument ordinaire. Un succès d’estime qui, à défaut de se vendre par camions, va donner une nouvelle dimension à la trajectoire de Rebeka Warrior.
Sous un même drapeau noir
Pote d’Odezenne (avec qui elle partage le même esprit DIY), elle fraye aussi de plus en plus avec le cinéma (les B.O. de Langue étrangère ou Les Reines du drame). En 2020, elle a également lancé son propre label, Warrior Records. Une maison-mère entendant rassembler «Techno, Acid, Hardcore, Poésie sonore, EBM, Chanson Mélancolique, Musique Expérimentale […], sous un même drapeau noir». En évitant la posture politique, mais en affichant malgré tout «clairement ses valeurs: queer, transféministe, anti-raciste et résistante». Une démarche qui a forcément aussi joué dans le fait que Rebeka Warrior se pose aujourd’hui en figure tutélaire de la scène indé. «C’est vrai que j’ai été une des premières en France à chanter des paroles queer avec Sexy Sushi, il y a plus de 20 ans. Et puis avec tous les autres projets collectifs, le fait de chanter dans toutes les langues… je pense qu’au bout d’un moment, cela a fini par rassembler. Tant mieux. C’est quelque chose dont je suis assez fière.»
J’ai été une des premières en France à chanter des paroles queer avec Sexy Sushi, il y a plus de 20 ans
Rebeka Warrior
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