Qui est Lola Young, la nouvelle sensation pop anglaise?

Lola Young, chanteuse grande gueule "bordélique"
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

En concert (ultra sold out) ce vendredi soir au Botanique, l’Anglaise Lola Young agite les radars du buzz depuis des mois. Portrait d’une nouvelle pop star qui n’a pas peur d’afficher ses vulnérabilités (ni d’arborer une coupe mulet)

Après son concert au Pukkelpop l’été dernier, et avant de revenir en juillet à Rock Werchter, Lola Young est de passage en Belgique, ce vendredi soir, sur la scène du Botanique. Inutile de préciser que la date affiche ultra-complet depuis des mois. Dans les bagages de l’Anglaise, un tube – Messy – et un second album qui, sans jamais réinventer la roue pop, fait mouche. A 24 ans, Lola Young est en quelque sorte la dernière sensation made in UK, séduisant jusque de l’autre côté de l’Atlantique. Une chanteuse, ancrée dans sa génération, tout en ranimant des figures plus anciennes – de Lily Allen à Adele. Le tout avec un sacré caractère et la volonté de ne pas cacher ses vulnérabilités. Comment? Pourquoi? On vous explique tout.

Sur les traces d’Adele et Amy

Née en janvier 2001, Lola Emily Mary Young a grandi dans le sud de Londres, du côté de Crystal Palace. La famille est plutôt créative et musicale : sa tante, Julia Donaldson, est l’autrice du Gruffalo, et ses parents avaient l’habitude d’organiser des soirées salsa. Dès ses 13 ans, Lola Young court les open mics et autres scènes ouvertes. Pas question toutefois de précipiter les choses : quand les premiers managers déboulent pour proposer leurs services, les parents poussent leur fille à s’assurer un diplôme. Ce sera celui de la Brit School. Une institution réputée pour compter parmi ses alumni des noms comme FKA Twigs, Kae Tempest, Loyle Carner, ou, évidemment, Adele et Amy Winehouse.

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Ces deux derniers noms reviennent régulièrement quand on évoque Lola Young. Outre le fait d’avoir fréquenté les mêmes couloirs, Lola Young dégage un naturel qui rappelle volontiers la première ; et une sensibilité d’écorchée vive qui évoque la seconde. Et ce n’est pas tout. Lola Young est aujourd’hui managée par deux noms bien connus de l’industrie: Nick Huggett – qui a signé Adele – et Nick Shymansky – qui a découvert Winehouse, alors qu’elle n’avait que 16 ans, et l’a suivie jusqu’en 2006.

Après la mort de la chanteuse, en 2011, Shymansky avait pourtant juré de plus s’impliquer dans le management d’un artiste (à l’époque, il avait essayé vainement d’envoyer Amy en cure de désintoxication ; elle en avait fait un tube planétaire…). Mais « parfois vous rencontrez quelqu’un, et cela change tout », expliquait le producteur en 2022 au Telegraph.

En route pour la gloire

En 2019, la jeune femme signe sur le célèbre label Island et sort un premier projet – Intro. Problème : au moment où sort le mini-album, Lola Young doit se faire opérer pour des nodules sur ses cordes vocales. L’intervention est réussie. Mais quand elle ressort de l’hôpital, c’est le covid qui met un nouveau coup d’arrêt. Faux départ…

Soit. Cela ne l’empêche pas de remporter un Brit award en 2021 (celui de la Rising star, l’équivalent des Révélations aux Victoires de la musique), et de figurer dans le top 5 du BBC Sound of (la traditionnelle liste de la BBC annonçant les stars de demain) en 2022. A l’époque, Lola Young a encore les cheveux longs et se retrouve volontiers classée dans la case pop-R&B. Cela va bientôt changer. D’abord avec son premier véritable album, My Mind Wanders and Sometimes Leaves Completely, sorti en 2023. Le single Don’t Hate Me devient alors viral, faisant chauffer les serveurs de TikTok. Notamment grâce aux partages de stars comme Madonna, Bella Hadid ou Kylie Jenner. La hype est lancée.

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Elle va se confirmer un an plus tard. Lola Young enchaîne en effet directement avec This Wasn’t Meant for You Anyway. Toujours pop, mais plus rêche et frontal, le disque assume davantage ses affinités rock. Dans le NME, Young explique franco : « Ce n’était pas que j’étais fatiguée de ce R&B merdique. Mais j’étais à un endroit où rien ne fonctionnait et ne m’inspirait ». Deux choses vont débloquer la situation. S’envoler à Los Angeles pour y travailler avec le producteur Solomonophonic – connu notamment pour ses travaux avec Remi Wolf, autre électron libre pop. Et une nouvelle coup de cheveux : fini les longs cheveux lisses de diva, place à la… coupe mullet. « Opérer un changement drastique, quel qu’il soit, peut parfois avoir un effet domino… »

Comme quoi, le succès ne tient parfois qu’à un cheveu – ou une touffe de footballeur allemand des années 70. Et surtout au tube qui fait basculer son auteur dans une autre dimension. Avec le morceau Messy, Lola Young transforme le buzz. Invitée sur tous les late show, elle est citée par des artistes aussi différents que Snoop Dogg, Michael Stipe ou SZA. Ou encore Tyler The Creator, qui l’invitera sur son récent blockbuster Chromakopia (le titre Like Him).

Pourquoi ça marche?

Comment expliquer l’emballement ? Fondamentalement, This Wasn’t Meant for You Anyway n’a rien de vraiment révolutionnaire – certainement si on le compare aux canons pop avant-gardistes de ces dernières années. Le titre Messy, par exemple, a été enregistré à L.A. au 64Sound, un studio à l’ancienne, avec micros vintage, instruments patinés et matériel analogique. Cela ne fait pas de Lola Young une artiste rétro. Mais il est frappant de constater que, même si son succès a été boosté par une plateforme comme TikTok, il est plutôt le fruit d’un boulot « à l’ancienne », construit en passant par les portails classiques – maison de disque, radio, journaux, télé, etc.

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S’il ne renverse jamais la table, This Wasn’t Meant for You Anyway réussit cependant se rendre attachant. Cela tient essentiellement à la personnalité de Lola Young. Avec son accent vinaigré à couper au couteau, son maquillage appuyé, et sa gouaille toute londonienne, la jeune femme avoue avoir une grande gueule. Au point d’expliquer, dans Variety, « Ce qui m’effraie le plus c’est la cancel culture. Je ne suis pas la personne la plus politiquement correcte au monde »

Jusqu’ici, cependant, si Lola Young se lâche, c’est surtout pour disséquer ses amours foireux, et autres relations toxiques. Avec un art du sarcasme maîtrisé – « Said you got nowhere to go / Well, you could start with the lift to the ground floor », grince-t-elle sur Walk On By. Mais sans jamais s’épargner, pratiquant un humour auto-flagellatoire souvent drolatique. Comme sur Messy où elle balance : « OK, I smoke like a chimney/I’m not skinny/and I pull a Britney every other week ». Lola Young n’hésite donc pas à se mettre à nu et afficher ses vulnérabilités. En cela, elle est bien raccord avec sa génération qui a fait de la santé mentale un chantier à ciel ouvert.

La thématique est d’autant plus sensible que Lola Young souffre de troubles schizo-affectifs. Elle s’en est ouverte dans un post Instagram, en 2022. « Cette maladie ne me définit pas. C’est mon super pouvoir. Je passe par des pics incroyablement haut et des bas immensément profonds, et même parfois par les deux en même temps. » Depuis le diagnostic posé alors qu’elle avait 17 ans, Lola Young suit un traitement. Même si cela ne la met totalement à l’abri. A fortiori en évoluant dans un music business qui peut vite prendre l’allure d’un rouleau compresseur. Son entourage en est bien conscient, à commencer par Nick Shymansky. Interrogé par le Telegraph sur ses éventuelles appréhensions de travailler à nouveau avec une artiste aussi brillante que vulnérable, il avouait : « C’est complètement terrifiant. Mais j’imagine qu’il y a chez moi l’idée un peu bizarre et tordue que c’est une occasion de refaire le même chemin, mais cette fois de la bonne manière, comme j’aurais dû le faire pour Amy »

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