Pukkelpop: au nom d’Hannah
Dix scènes. Une soixantaine de groupes. Une journée qui commence tôt (11h20) et qui se termine tard (4h du matin pour les plus fêtards)… Contrairement à certains festivals qui prônent la taille humaine et l’urgence de ralentir, le Pukkelpop joue la carte du gigantisme, de la profusion et du divertissement façon parc d’attraction.
Ca fait déjà un bail qu’on peut prendre de la hauteur et admirer la vue depuis la grande roue. Maintenant à Kiewit, il y a du théâtre, des performances artistiques, des rampes de skate, des paniers de basket et même des tables de ping pong bizarres.
Et ce vendredi, la programmation laissait clairement l’occasion de se promener. Il y a bien eu Cypress Hill. Sans Sen Dog (passé sur le billard fin mai pour une opération du coeur) avec un B-Real toujours jeune qui fumait des pétards gros comme son bras.I wanna get high (ben oui forcément), I Ain’t Goin Out Like That, (Rock) Superstar, Insane In The Brain et une reprise pour terminer du Jump Around d’House Of Pain. Certainement pas inoubliable mais le grand juke-box du rap a fait le taf. Et c’est quand même nettement moins risible que le métal carnavalesque de Slipknot. Jamais vraiment compris ce grand cirque lourdingue.
De la journée, assez pauvre, on retiendra surtout un concert. Celui de King Hannah. Trois guitares, une batterie et une voix ensorcelante… Le groupe de Liverpool ravive une certaine idée des années 90. On pense à PJ Harvey. A Hope Sandoval et Mazzy Star, à Jennifer Charles et Elysian Fields, à Beth Gibbons et Portishead. Et si on se laisse embarquer, envoûter par le timbre hallucinant et doux d’Hannah Merick, on s’emballe tout autant sur les riffs cinglés de son acolyte Craig Whittle.
A la voix vaporeux et incendiaire. Victoire haut la main. Faut dire que Wu-Lu, auteur d’un très bon album cet été (Loggerhead), a laissé un peu sur sa faim. Pas assez Dean Blunt (auquel il peut parfois faire penser) et un peu trop bourrin. Signé sur le label Warp, le frère jumeau de Ben Romans-Hopcraft (Warmduscher, Insecure Men) a mélangé le rock, le rap, le dub et son discours engagé sans tout à fait parvenir à nous charmer. Pas vraiment de consécration non plus pour Kokoroko. Pour le coup un peu trop sage. Après avoir pas mal fait patienter ses fans, le groupe de jazz londonien a enfin sorti son premier album, Could We Be More, au début du mois d’août. Tout dans la vie est une question de contexte, de timing. Et pour le coup, les planètes ne sont pas vraiment alignées.
Meilleure pioche du côté de Pascal Arbez-Nicolas, alias Vitalic. Le Dijonnais qui fête ses 20 ans de carrière n’a rien perdu de son savoir faire. Il reste d’ailleurs à 46 balais l’un des meilleurs ambassadeurs des musiques électroniques françaises. Sur son avant-dernier album (le premier épisode de Dissidænce), Vitalic a intitulé une chanson Rave against the system… Une référence aux raves illégales qui ont émaillé et rythmé les confinements. Vitalic est le genre de type pour qui la fête et la musique sont éminemment politiques («la disco des années 70, les chants des esclaves noirs dans les champs de coton»)…. Le genre de gars qui regrette qu’on vende aux kids de maintenant une sorte de Big Mac de la rave party (souvent organisées par de gros groupes financiers) et qui n’hésite pas à dire que sa musique est inspirée par les Gilets jaunes. Eh bien Dissidæncez maintenant…
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