On était au concert de J Balvin : Les Ardentes, version kermesse caliente
En invitant la star reggaeton J Balvin, les Ardentes faisaient le pari d’ouvrir leur affiche aux musiques pop latino. A l’arrivée, un megamix pas toujours subtil mais efficace.
On ne vous apprendra rien : depuis que le Net a éclaté les schémas culturels habituels, taillant dans l’hégémonie anglo-saxonne, les musique latino affolent les chiffres – Despacito, 2e titre le plus écouté de l’histoire de Youtube (plus de 8 milliards de vue). Le reggaeton, en particulier, est devenu l’une des musiques les plus populaires de la planète. Sur Spotify, depuis trois ans, le Portoricain Bad Bunny est l’artiste le plus streamé au monde (2020, 2021, 2022). Au printemps dernier, il est devenu également le premier artiste hispanophone à être programmé en tête d’affiche du festival de Coachella… On imagine que les Ardentes auraient bien voulu mettre également la main dessus. A la place, ils ont tout de même réussi à faire venir J Balvin, l’autre star incontournable du genre.
United colors of reggaeton
Samedi, quand il débarque, sur le coup de 20h50, l’air commence à peine à se rafraîchir. Mais cela n’empêche pas la superstar colombienne de débouler masqué, sous une cagoule, entièrement vêtu de noir, à la manière d’un membre des forces spéciales. Il trône sur l’un des deux tanks gonflables argentés qui occupent la scène – l’autre est pour son DJ. Au pied des deux chars d’assaut glitter, la troupe de danseuses amazones, également cagoulées, a lancé sa première choré : il y en aura une pour quasi chaque morceau du set.
Celui-ci démarre avec l’inédit Click Click, avant d’enchaîner avec Reggaeton. C’est le début d’un concert fonctionnant à la manière d’un megamix, ne comptant pas ses hits. Très vite, suivent par exemple Loco Contigo (signé DJ Snake), Con Altura (feat. Rosalía) et La canción (avec Bad Bunny). A ce moment-là, José de son prénom a tombé la cagoule, tout comme ses danseuses. Cela lui permet de mieux voir et saluer les différents drapeaux déployés dans le public : Espagne, Venezuela, Brésil, Colombie évidemment, etc. Mais pas question pour autant de faire de sa musique un « ghetto » latino. Il le répète sur tous les tons : ce n’est pas « une question de langues », mais bien de « feeling ». Pas besoin de se comprendre pour se comprendre : le reggaeton est pour tout le monde.
Dérapage eurodance
C’est sa grande mission. J Balvin n’est peut-être pas l’artiste reggaeton le plus révolutionnaire qui soit. Mais il a à cœur de rendre sa musique la plus universelle possible. D’un côté, il le fait en cédant volontiers à certains clichés du latin lover – parfois douloureusement anachroniques, comme quand ses danseuses se lancent dans des chorés de strip club, aussi subtiles qu’un film de Verhoeven des années 90. De l’autre, il n’hésite pas à frayer avec d’autres genres et territoires. Il file en Jamaïque avec Sean Paul (Contra la pared) ou vers Cuba et Portorico (I Like It Like That, avec Cardi B). Il n’oublie évidemment pas non plus la pop, le rap ou le r’n’b (quand il sample le Yeah de Usher).
Bon, à un moment, cela dérape quand même. Qui trop embrasse mal étreint. Comme lors de votre dernière soirée au Havana, la musique finit par prendre des airs de kermesse bling bling et de bande-son eurodance d’auto-tamponneuse (Ritmo, avec les Black Eyed Peas). Dans la dernière ligne droite, le tube XXL Mi Gente remet un peu le concert sur les rails. Mais on a déjà filé ailleurs. On avait été pourtant prévenu : après tout, J Balvin est arrivé à bord d’un tank… Il en avait la subtilité. Mais aussi l’efficacité, idéal pour enfoncer les lignes d’un samedi soir qui ne demandait qu’à s’ambiancer.
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