Les Ardentes J4, le grand final

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

De Stromae à ASAP Rocky, le festival liégeois avait mis les petits plats dans les grands pour clôturer sur son nouveau site une édition 2022 couronnée de succès.

Ce n’est pas tout de lancer un (quasi nouveau) festival. Encore faut-il le terminer. Et pour ça, on peut toujours faire confiance à Paul van Haver. Au moment de boucler son week-end, les Ardentes ont pu ainsi compter sur un Stromae des tout grands jours, le genre à livrer une prestation qui restera gravée dans les annales liégeoises. La parfaite cerise sur un gâteau qui, dimanche, avait carrément des allures de pièce montée. Autant la journée de la veille avait pu en effet laisser sur sa faim (kikou PNL, ces petits filous qui déboulent en retard de trois quarts d’heure, histoire de faire passer en douce une setlist festival qui ne dépasse de toutes façons pas les 50 minutes), autant celle de dimanche a multiplié les coups d’éclat. Et pas seulement sur les scènes principales, d’ailleurs. Du Wallifornia Stadium (l’intensité d’Eesah Yasuke) au chapiteau Hood (le concert choral de Luidji) en passant par le plus petit podium du Konbini Forcing Club (la révélation La Fève, qui marque encore des points), il y avait moyen de contenter toutes les oreilles, même les plus repues par quatre jours de festival.

Les têtes d’affiche ont tenu leur rang, n’hésitant pas à mouiller le maillot. On pense à Burna Boy par exemple, présent avec un groupe imposant (cuivres, basse, guitare, batterie, percussions, choristes-danseurs, etc). Vendredi dernier, le géant africain sortait son sixième album, Love, Damini, poussant encore plus loin son crossover pop. À Liège pourtant, il a surtout honoré ses racines afrobeat nigérianes, et plus généralement africaines (la reprise de Jerusalema), avec une énergie assez contagieuse. A sa suite, A$AP Rocky n’a pas davantage ménagé ses efforts. Déboulant en cagoule et hoodie siglé Balenciaga, il est seul sur scène. Heureusement, le rappeur fashion montre vite qu’il n’est pas seulement là pour agiter ses bagouzes en or, et se retrousse directement les manches.

A$AP Rocky

Juste avant, sur fond de bruits de chantiers, des ouvriers se sont d’ailleurs activés pour dresser un mannequin géant, le genre à être utilisée pour des crash-test. De fait, le set du mari de Rihanna a des allures de dérapage plus ou moins contrôlé, où la liste des morceaux semble se décider quasi en direct. Un hommage à feu ASAP Yams entre deux bangers ? OK. Des extraits vidéos de violences policières aux Etats-Unis sur Wild For The Night, sa collaboration avec Skrillex et Birdy Nam Nam ? D’accord. Après tout, en vrai homme d’images, ASAP Rocky est un habitué de ce genres de « collisions ». Quitte à ce que l’exercice devienne brouillon. Mais avec au moins trois consignes claires. Elles sont données en début de concert : amusez-vous, prenez soin de vous et des autres – pendant de longues minutes, le rappeur jettera quasi une palette entière de bouteilles d’eau aux quatre coins du public -, et pour le reste, tout pour le moshpit ! Alors que les soutiens-gorge pleuvent sur scène, le rappeur s’agite, hurle comme un beau diable, excite les premiers rangs, finit même par descendre de scène pour traverser la foule et rejoindre la tour de mixage, qu’il finit par escalader. Sans queue, ni tête, mais avec une vista imparable.

Restait donc ensuite à Orelsan et Stromae à terminer en beauté. Désormais idole des familles, le premier a le show qu’il faut pour les festivals XL de l’été, efficace, sans jamais perdre de sa proximité, ni abandonner complètement ses côtés plus anguleux (L’odeur de l’essence). Avec ce petit plus, d’avoir ramené Stromae sur scène pour La pluie. Quelques minutes plus tard, les deux inverseront d’ailleurs les rôles, le Français rejoignant le Belge sur la grande scène.

Orelsan

On ne va pas redire tout le bien que l’on pense du show de Stromae. Sinon qu’il gagne toujours plus en fluidité et en émotion – il faut voir et entendre 50 000 personnes danser et chanter en chœur des morceaux désormais ancrés dans l’inconscient collectif. Plus encore qu’à Werchter, le maestro avait l’air à l’aise, heureux d’être là, profitant réellement du moment. En toute fin, dans une liste de remerciements toujours très longue, il n’oubliera pas non plus d’avoir une pensée pour Gilbert Lederman, directeur artistique important de la scène musicale belge, récemment disparu. La classe, toujours.

Stromae a clôturé le festival avec une prestation 5 étoiles

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