Album - Red Moon In Venus
Artiste - Kali Uchis
Genre - Pop
Label - Geffen
Critique - L.H.
Sur son nouvel album, Kali Uchis baigne dans un océan de miel r’n’b, femme fatale d’une romance pop formidablement lascive, jusqu’à toucher au spirituel.
Vous aussi, vous aviez remarqué? Ces derniers temps, la pop vous le dit avec les fleurs. C’est le carton plein de Miley Cyrus qui chante Flowers, sorte de version 2023 d’I Will Survive. Et puis, c’est également Kali Uchis. Pour annoncer son nouvel album, elle sortait en janvier dernier le single I Wish You Roses. Ici aussi, l’amour a fané. Mais au ressentiment, Uchis préfère l’apaisement. “Sache que tout l’amour que je t’ai donné, tu peux le conserver à jamais”, chante-t-elle, la voix sublimement traînante. Dans le clip, couchée au milieu de pétales (oui, comme dans la scène iconique d’American Beauty), elle insiste, lascive: même si “avec les jolies fleurs vient parfois la piqûre de l’abeille”, elle souhaite à son ex le meilleur -“I wish you love, I wish you well/I wish you roses while you can still smell ‘em”…
Kali Uchis est décidément surprenante. Non pas que son succès -plusieurs tubes, des nominations aux Grammys (dont une victoire)- soit complètement inattendu, que du contraire. Après tout, on parle d’une artiste qui, avant même d’avoir sorti son premier album, Isolation en 2018, avait déjà pu collaborer avec Snoop Dogg, Gorillaz, Diplo ou Tyler, The Creator… Non, ce qui est plus étonnant dans la trajectoire fulgurante de Kali Uchis, c’est ce qu’elle a réussi à en faire. Dès son deuxième album, celle qui est née Karly-Marina Loaiza, en 1993, et a grandi entre la Colombie et les États-Unis, a par exemple osé switcher vers l’espagnol. En 2020, Sin miedo (del amor y otros demonios) était l’occasion de mêler encore un peu plus ses influences latinos à son r’n’b indé. Avec Red Moon in Venus, Kali Uchis revient à l’anglais mais continue d’expérimenter.
Bardot latino
En introduction, les 25 secondes de In My Garden… posent directement le décor: celui d’une nuit tropicale, au milieu d’un jardin luxuriant. Cette ambiance, Kali Uchis va la cultiver dans une soul-r’n’b charnelle (Worth the Wait, le plan rétro de Love Between…) et une pop hypersensuelle (Happy Now). En cela, Red Moon in Venus est moins un album qu’une longue douche chaude (avec shampoing senteur monoï). Ou plutôt une caresse musicale veloutée, capable de rendre amoureux les cœurs les plus désabusés.
Sur Isolation déjà, Kali Uchis chantait: “All we ever do is French like Brigitte Bardot”. Plus que jamais, elle se glisse dans la peau de la femme fatale, comme une déclinaison exotica de l’icône française sixties, qui aurait croisé La Lupe. Gémissant sur Como te quiero yo, feulant sur l’obsédant Moral Conscience, elle détaille encore sur Worth the Wait: “The mirror is on my ceiling/so I can watch you top me”. Plus loin, dans un registre plus feutré, la somptueuse ballade Blue rend l’attente d’un prochain album de Sade un peu plus supportable.
Cohérent d’un bout à l’autre, Red Moon in Venus réussit à maintenir la tension sans jamais accélérer. Avec Kali Uchis, en héroïne lascive, dont la séduction ne serait jamais soumission, dont l’autorité n’empêche jamais la confession. “Love is the message”, explique l’intéressée. Reçu cinq sur cinq.
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