Widowspeak envoûte avec un concept album de dream pop vaporeuse et ouatée.
Une brodeuse travaille pour un tailleur spécialisé dans la confection de costumes à destination de groupes de reprises country western, art rock et yéyé qui animent les bars d’une ville sans nom dès que tombe l’obscurité. Un beau jour, elle décide de tout planter et de rejoindre une de ces formations. Elle tombe amoureuse d’un de ses compagnons d’aventure. Le Tex se met à écrire ses propres chansons. Mais dans leur quête de succès, le couple et le groupe se désintègrent et la jeune femme femme retourne à ses broderies. Ça ferait un chouette sujet de film, mais c’est l’histoire d’un disque. Le sixième en onze ans pour les New-Yorkais de Widowspeak.
Écrit durant les mois qui ont précédé et suivi la sortie de son précédent album Plum, The Jacket est une réflexion sur le succès, l’absurdité de l’ego, le temps qui passe et la vie en groupe. C’est l’Amérique de la nuit, l’Amérique de la route, l’Amérique des backstages et celle des saltimbanques. Là où des morceaux comme Everything Is Simple et The Drive questionnent les concepts de performance et d’ambition, la chanson titre de l’album parle des choses que l’on choisit, dont on s’habille et qu’on adopte comme des signes de ce que nous sommes. Ces objets qui se gonflent de sens, de signification, de sentiments, de souvenirs jusqu’à ce qu’on les perde, les casse, les abandonne et peut-être s’en affranchisse. La veste (jacket) en question représente les clichés qui vont avec le rock’n’roll, la jeunesse, le cool, le fait de faire partie d’un groupe… Elle matérialise cette croyance dans le pouvoir du symbole et du costume pour aider à trouver et définir le vrai soi.
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Irréel
Emmené par la chanteuse Molly Hamilton et le guitariste Robert Earl Thomas, Widowspeak renvoie aux années 90 et aux grandes heures de la dream pop, ce sous-genre du rock alternatif caractérisé par ses textures sonores et son chant murmuré. Ce monde sonore vaporeux et cet univers irréel qui confine à la magie. L’étiquette cherche à décrire l’immersion de l’auditeur dans la musique. Celle de Widowspeak invite clairement au songe, à la lévitation, à la découverte d’un ailleurs moelleux.
La voix douce, fragile et ensorcelante d’Hamilton renvoie à quelques-uns des plus beaux et hypnotisants timbres féminins de ces 30 dernières années. On pense à Hope Sandoval, à Margo Timmins, à Jennifer Charles, à Victoria Legrand. À Mazzy Star, aux Cowboy Junkies, à Elysian Fields et à Beach House… Widowspeak ne retourne pas sa veste, elle est toujours du bon côté. Mais c’est une jacket de survie. Une veste de cosmonaute, de grand explorateur et d’éternel rêveur. Dream pop, slowcore, country de hors-la-loi… Difficile de résister aux charmes ensorcelants de ces gens-là.
Widowspeak, « The Jacket », distribué par Captured Tracks/Konkurrent. ****
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