La mort d’Amy
Amy Winehouse, la diva soul, a été retrouvée sans vie dans son appartement de Londres. Retour sur son parcours.
Amy Winehouse a donc battu son aîné Pete Doherty dans la course à une mort précoce, sinistre et pathétiquement rock. Qui assez cyniquement, entretient la pseudo-légende de la myriade de rock-stars fauchées autour de leur 27e anniversaire: Jimi Hendrix, Janis Joplin, Kurt Cobain, Jim Morrison, Brian Jones. Pas vraiment une surprise même si la nouvelle a pris de court, la police londonienne découvrant le corps de la jeune femme dans son appartement de Camden ce samedi 23 juillet vers 16 heures. Les analyses toxicologiques devraient révéler quel genre de cocktail aura fini par noyer la chanteuse, mais un probable mojito d’alcool et de came dure, reste dans les prévisions les plus banales.
Née le 14 septembre 1983 dans une famille de la classe moyenne juive anglaise, Winehouse a effectué le plus fascinant et le plus flingué des parcours, comme une caricature d’à peu près tout ce qu’il ne faut pas faire. Amy n’a que 23 ans quand sort, à l’automne 2006, l’album Back To Black: ce deuxième disque -qui se vendra à trois millions d’exemplaires rien qu’en Grande-Bretagne- porte au pinacle une voix ensorcelante, à la fois captive et dominatrice. Digne du meilleur des interprètes soul américaines ou du grand jazz absolu. Cet insolent talent vocal, récompensé de cinq Grammy Awards, croasse des textes déjà fissurés par la vie où Amy se joue en improbable petit canard devenu superstar. La pression du succès et de la reconnaissance ne fait qu’amplifier les fameuses mauvaises habitudes, c’est-à-dire une consommation d’alcool qui tend d’autant plus vers le gargantuesque qu’elle est mélangée à la prise d’héroïne, de cocaïne, d’ecstasy et même de crack. Ajoutez-y des désordres anorexie/boulimie, de la dépression, du valium, la mort d’une grand-mère adorée, et un mariage calamiteux avec un type douteux -emprisonné pour avoir agressé un propriétaire de pub- et vous aurez un scénario sans commentaires. A la hauteur des multiples cures de désintox, comme narrées dans son tube Rehab, prouvant que les parois entre réalité et fiction sont décidément trop minces.
Naviguant depuis trois ans vers un retour scénique et discographique attendu mais de plus en plus improbable, Amy Winehouse était récemment apparue à Belgrade, le 18 juin, pour une pitoyable prestation enivrée qui l’amènera à avorter le concert et à annuler la tournée « de retour » prévue. On ne saura sans doute jamais distinguer le rôle du méga-succès ou de la génétique dans cette triste histoire -inconnue, Amy aurait peut-être fait pareil- mais il est frustrant de voir un énorme potentiel anéanti par les avatars supposés de la gloire.
Philippe Cornet
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