Pukkelpop J4: les tops et les flops
Amoureux perturbé, DJ déjanté, remplaçant déprimant et musiciens oscarisés… Ultime remise des bulletins. Le Pukkelpop suite et fin.
Pukkelpop 2024, c’est fini. Le dimanche a réservé aux festivaliers quelques belles cartouches, mais aussi de moins belles. Notre sélection…
Le plus canin: Fat Dog
Chien qui aboie ne mord pas. Certes. Je ne mettrai pas pour autant la main dans la gueule de Fat Dog. Dernière signature du label Domino (Franz Ferdinand, Wet Leg…), originaire du sud de Londres et formé dans l’ennui du confinement, Fat Dog est l’un des groupes les plus excitants que l’Angleterre caresse pour le moment. Le chiot le plus turbulent de la portée. Celui plein d’énergie qui va pisser dans la cuisine et déchirer les fauteuils du salon. Joe Love a perdu son kimono et le batteur du groupe sa tête de clébard (il devait faire chaud là-dessous faut dire)… Mais la bête n’est pas encore passée par le dressage. Fat Dog cultive l’absurde et le chaos. Réinvente l’électro rock avec une énergie punk, un saxophone fou (un petit côté éthiopien par-ci, balkanique par-là) et des beats technoïdes qui rendent tout aussi zinzins. Fat Dog sortira son premier album, Woof, le 6 septembre. Se produira le 6 octobre au Grand Mix (Tourcoing) et le 10 au Botanique. Garanti sans muselière.
Le plus mystérieux: Glass Beams
Ils ont sorti un EP en mars chez Ninja Tune et sont apparemment déjà passés par le Bota début avril. Les Australiens de Glass Beams ont assurément constitué notre plus chouette surprise et notre plus grande révélation du week-end. Mystérieux, le trio de Melbourne avance masqué. Aime la musique psychédélique et les polyrythmies cosmiques. L’Inde et l’Asie du sud. Kraut, funk, jazz, surf rock, musiques traditionnelles… Glass Beams danse dans la même cour que Yin Yin, Kikagaku Moyo, Khruangbin, Goat ou encore Fujiya et Miyagi… Plébiscité par Gilles Peterson et le NME, Glass Beams devrait beaucoup à un concert organisé en hommage à George Harrison pour lequel Ravi Shankar avait invité un orchestre indien. Rajan Silva est le fondateur et seul membre connu du projet. Irrésistible.
Le plus entertainer: Marc Rebillet
En 2022, il s’était fait remarquer au Touquet Music Beach en insultant sur scène le président Macron (Brigitte y a une maison). Musicien (il a commencé le piano à quatre ans, étudié le classique, fréquenté la Booker T. Washington High School for the Performing and Visual Arts ) et vidéaste web franco américain, Marc Rebillet est né à Dallas fin des années 80. Il a commencé sa carrière en publiant des livestreams et des vidéos YouTube de lui-même improvisant des sets dance, funk et soul en peignoir dans sa piaule, son appartement et des chambres d’hôtel. De nombreuses chansons seraient d’ailleurs inspirées par les demandes directes de ses fans qui l’appelaient à partir d’un numéro de téléphone publié sur les réseaux sociaux. Barjot? Ses sets sont en tout cas encore aujourd’hui presque entièrement improvisés. Rebillet s’imprègne de tout ce qui l’entoure et des réactions du public (comme cette pancarte au Pukkelpop d’une festivalière réclamant un peu plus d’attention à l’orgasme féminin) pour dérouler à chaque sortie des shows uniques et enflammés. Dimanche soir, après s’être rapidement désapé, Rebillet, avec ses lunettes et son boxer moulant, a fait exulter un Marquee surchauffé qu’on a rarement vu aussi blindé. Drôle et provocateur, Loop Daddy (c’est son surnom) moque le DJ superstar en même temps qu’il l’incarne. Carton plein.
Le plus cinglé: Loverman
Il a son cheval de bois. Son piano. Sa guitare. Son tambourin. Et surtout une approche singulière du concert. Au croisement de la performance, de la danse et du théâtre. On se demande parfois ce qu’il se passe dans la tête de James De Graef (Shht). Mais le singer songwriter aime bousculer le spectateur. Le mettre mal à l’aise avec ses gloussements, ses bruits de bouche, ses rires inquiétants. Ou en l’obligeant à chanter. Le pari est osé avec un album qui aime Leonard Cohen, Johnny Cash et Nick Cave. Mais l’exploit d’autant plus remarquable.
Le plus cul entre deux chaises : Chalk
Il reste encore et toujours difficile de se prononcer sur le cas de ce prometteur trio irlandais. Chalk a définitivement quelque chose. Des solides bases qui l’ancrent à la fois du côté du Gilla Band et du post punk britannique. Mais aussi de New York, de LCD Soundsystem et du label DFA. Il manque cependant un truc à ces anciens étudiants en cinéma qui ont remporté l’oscar 2023 du meilleur court métrage de fiction avec An Irish Goodbye. Le groupe de Belfast donne constamment l’impression que ses chansons pourraient et devraient aller plus loin. Puis qu’il a du mal à les terminer. C’est dans leurs moments les plus sauvages que les Irlandais sortent de la mêlée. A suivre.
Le plus déprimant: Royal Blood
On aurait dû avoir droit aux Queens of The Stone Age au Pukkelpop. Pour pallier le forfait de Josh Homme (il a quand même dû se faire opérer d’urgence) et de ses ouailles, le Pukkelpop n’a rien trouvé de mieux à proposer que les insupportables Anglais de Royal Blood. Râlant quand on sait que c’est Jack White qui a joué les pompiers de service sur une bonne partie des dates annulées. Puis carrément minant quand on se souvient qu’il y avait aussi The Smile dans un premier temps au programme du jour (victime d’une infection, Jonny Greenwood a dû être hospitalisé). Le Pukkelpop n’a pour info pas remboursé les tickets.
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